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Ibrahim Koodoruth, Sociologue

24 juillet 2012, 12:16

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Le Mauricien souffre d’un sentiment d’impuissance par rapport aux institutions»

L’affaire Harte, la remise en question du système judiciaire qui s’est ensuivie, voire les événements au sein de la classe politique, ces faits de société ont- ils une infl uence sur l’imaginaire collectif des Mauriciens ?

Cela inspire le sentiment que nous avons des institutions qui fonctionnent, mais pas les personnes appropriées aux places qu’il faut. En d’autres mots, si les procédures sont suivies, les compétences sont absentes.
Les Mauriciens sont désabusés.

La classe politique est un des motifs à cela. Un jour, on voit que certains partis sont adversaires, le lendemain, ils se font des clins d’oeil. Il n’est pas question de principes, de valeurs. Et, dans leur logique, on se rend compte que toutes les formations politiques sont sur la même longueur d’onde.

Cette perte de confiance, en somme, a- t- elle des conséquences sur la façon dont les individus appréhendent la société ou sur leur rôle au sein de celle- ci ?

Cela amène les gens à se dire que même s’ils font de leur mieux, en fi• de compte, leurs efforts n’aboutiront à rien.

Il y a clairement une démotivation, des cadres surtout.
Dans la classe politique, toujours, on ne s’attend pas à voir un renouvellement.

Les leaders actuels continueront ainsi à n’en faire qu’à leur tête.
Dans les institutions aussi, on voit la même chose, et le rapport de l’Audit sur les gaspillages qui y ont cours en est une bonne indication. Si souvent les cadres font leur travail, c’est toujours la volonté du chef qui prime.

A vous écouter, on pourrait presque croire qu’il n’y a plus de règles, qu’on est presque dans un état d’anarchie généralisé, où les institutions ne servent pas l’ensemble de la population…

Ce n’est pas généralisé. Ce sont surtout ceux au pouvoir qui peuvent contourner les règles. C’est triste à dire, mais de tels agissements ont tendance à causer un laisser- aller, à laisser penser que nos institutions ne nous appartiennent pas.

Dans les faits, quels rapports les Mauriciens développent- ils avec ces mêmes institutions ?

Parlons franchement. Regardons autour de nous. Est- ce qu’il y a une institution qui fait honneur au pays ? Encore une fois, c’est le manque de personnes compétentes qu’il faut blâmer.

Cela engendre le sentiment que certains sont avantagés. Résulte alors la tristesse, voire le désespoir. Sur le plan social, on se dit qu’on n’a aucune chance. Le Mauricien se sent perdu et se dit qu’il n’a aucune maîtrise. C’est un sentiment d’impuissance, en soi.

Peut- on dire pour autant que le pays connaît un sentiment délétère et que la confusion s’est installée ?

Les jeux politiques, le manque de vision et de leadership dans les institutions, tout cela engendre, à coup sûr, une confusion dans la société. Les gens sont dans l’attente d’un renouveau.

Mais ils ne veulent pas s’engager ! La société civile a peur de s’engager, de créer une nouvelle dynamique.

Ils ont eu tellement d’exemples de tentatives qui n’ont pas abouti. Mais l’attente de changement, elle, est bien là.

 

Propos recueillis par L. A.