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Japon : Course contre la montre des « liquidateurs » de Fukushima-Daiichi
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Japon : Course contre la montre des « liquidateurs » de Fukushima-Daiichi
Loin des caméras de télévision, quelque 300 hommes sans visage livrent un combat contre la montre pour tenter de rétablir les systèmes de refroidissement à la centrale de Fukushima-Daiichi et éviter une catastrophe nucléaire sans précédent depuis celle de Tchernobyl, en 1986.
"J''''ai les larmes aux yeux en pensant à leur travail", dit Kazuya Aoki, de l''Agence de sûreté nucléaire et industrielle japonaise.
A la suite du séisme du 11 mars, des explosions et des incendies ont frappé la centrale située à 240 km au nord de Tokyo.
Des fuites radioactives ont été enregistrées et l''eau s''est en partie si ce n''est totalement évaporée de piscines où sont entreposées les barres de combustibles usés.
Faute d''eau pour les refroidir, les barres peuvent s''échauffer et dégager des radiations toxiques.
L''Agence de sûreté nucléaire et la compagnie Tepco, propriétaire de la centrale, restent très discrètes sur ces 304 ouvriers de l''ombre et sur leur tâche exacte.
Elles n''ont pas précisé combien appartenaient à Tepco et combien travaillaient pour des sous-traitants ou pour l''armée. On ne sait pas davantage s''il s''agit de volontaires ou s''ils ont répondu à un ordre de mission.
"C''est leur travail. Je pense qu''ils le font de leur propre gré. Ce n''est pas nécessaire de les convaincre: c''est quelque chose qu''ils doivent faire", estime Masato Furusawa, ouvrier du BTP à Tokyo.
Cette attitude illustre une tradition nippone consistant à obéir sans réserve aux consignes d''un supérieur.
Qu''il s''agisse de guerriers du XVIIe siècle au service d''un chef de guerre local ou de techniciens du nucléaire du XXIe siècle, les Japonais apprennent dès leur plus jeune âge à accomplir avec rigueur les missions qui leur sont confiées.
Il en était de même pour les "tokkoutai", les forces spéciales d''attaque de la Seconde Guerre mondiale, dont faisaient partie les kamikazes qui n''hésitaient pas à aller jusqu''au sacrifice de leur vie.
Précautions
A Fukushima, des précautions bien sûr sont prises pour éviter de telles extrémités. Equipés de combinaisons, de lunettes et de masques de protection, les "liquidateurs" ne sont exposés aux radiations que pendant une durée limitée.
La dose moyenne d''exposition en cinq ans d''un employé de centrale nucléaire est de 50 millisieverts. Tepco a déclaré vendredi que le plafond d''exposition pour des travaux d''urgence avait été relevé à 100 millisieverts par heure, avec un maximum de 250 millisieverts par an.
Cent millisieverts représente environ dix fois la dose de radiation reçue si l''on vit pendant un an sur une plage brésilienne, selon l''agence japonaise de sûreté nucléaire. Un scanner médical de l''ensemble du corps représente une dose de 20 à 30 millisieverts.
"A l''évidence, une dose accrue occasionne une certaine augmentation du risque, mais cela reste dans des limites qui ne devraient pas avoir de véritable effet", estime Tony Irwin, ancien directeur d''une centrale nucléaire en Australie.
Les ouvriers sont dotés de détecteurs de radiation afin de s''assurer qu''ils ne sont pas surexposés et de déterminer quand ils ont atteint la dose limite.
Après leur travail, ils se douchent encore vêtus de leur combinaison pour une première décontamination, ils retirent ensuite leur combinaison et prennent une nouvelle douche. Un contrôle de radioactivité est pratiqué sur tout le corps pour vérifier qu''il ne reste plus rien.
Les médias japonais n''ont pas précisé les identités ou les tâches des "liquidateurs" de Fukushima-Daiichi, mais l''agence japonaise Jiji rapportait mercredi les propos d''un technicien du nucléaire de 59 ans qui, à six mois de la retraite, s''est porté volontaire pour ce travail.
"L''avenir de l''énergie nucléaire dépend de la manière dont cela sera géré. Je veux y aller car j''ai le sentiment qu''il s''agit d''une mission", a-t-il dit à sa fille.
Certains, à l''instar de Daisuke Nakao, 40 ans, ne voient là rien d''extraordinaire. "C''est leur travail, ils doivent le faire. Ils ne le font pas pour leur pays, et ils ne le font pas gratuitement - c''est pour cela que nous payons l''électricité et les impôts", dit-il.
En revanche, Kumiko Tanaka, une Tokyoïte de 73 ans, exprime toute son admiration à ces travailleurs de l''ombre. "Ils prennent un tel risque pour nous. Je ne peux qu''être pleine d''une profonde gratitude. Je ne sais pas qui ils sont, mais je prie pour eux. Je crois qu''ils ont le sentiment d''une tâche supérieure qu''ils doivent accomplir pour leur pays. Lorsque tout cela sera fini, ils seront des héros."
(Source : Reuters)
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