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Kris Valaydon: «Le vieillissement de la population se constate tardivement»

9 juillet 2009, 19:24

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Kris Valaydon, avocat et démographe, s’exprime sur les enjeux liés à la population.

Quel est l’impact des questions liées à la population sur le développement d’un pays?

En général, il y a deux types de questions qui se rapportent à la population. Celle relative à l’effectif de la population et celle relative à sa composition ou ce que nous pouvons aussi appeler les caractéristiques de la population.

Que comprenez-vous par ces termes?

Concernant l’effectif de la population, c’est-à-dire, le nombre de personnes habitant sur un territoire donné. Il est influencé par le nombre de naissances, de décès et la migration externe. Par rapport à la composition à la population, il s’agit de la distribution de la population quant à des critères tels que l’âge, le sexe, les zones géographiques. Il existe aussi d’autres critères, notamment, en termes de distribution par groupe ethnique, socio-économique, des groupes marginalisés, les indigènes.

La population mauricienne vieillit. Quels sont les enjeux liés à cet état des faits?

Actuellement, 10% à 11% de la population mauricienne est âgée de plus de 60 ans. Dans 35 ans environ, cette partie de la population sera à 25%. Cela aura des conséquences sur la vie à l’île Maurice, tant au niveau économique que social. Le taux de dépendance – le nombre de personnes en âge de travailler est en baisse en comparaison au nombre de personnes qui sont des retraités – donc, qui ne contribueront plus au développement économique du pays. Si nous nous ne préparons pas stratégiquement à l’avance pour y faire face, nous aurons des problèmes De plus, le vieillissement de la population arrive très lentement. Dans ce sens, nous ne le constatons que tardivement. Et soudain, quand nous serons en 2040, le vieillissement de la population se présentera de manière concrète. Alors, si la technologie n’a pas suivi jusque là, nous serons très mal.

Comment pensez-vous qu’on puisse renverser la tendance?

Il faut se rendre compte qu’à Maurice, avec une population de quelque 1,2 million, nous sommes avec une population de 6,4 milliards sur la planète. Avec la mondialisation, les frontières sont de plus en plus ouvertes, il ne faut pas croire que la solution au problème démographique de Maurice est à l’intérieur de Maurice. Je pense que nous devons nous considérer comme des habitants de la Terre et pas de Maurice. Dans ce contexte, il y a nécessairement des flux migratoires assez importants. En 1965 par exemple, les gens partaient pour l’Australie. En 1970-80, ils émigraient plutôt en France. Maintenant, ils se tournent vers l’Australie, la Nouvelle Zélande ou le Canada, mais avec un statut différent. Il y a une évolution. D’ailleurs, l’Office International de la Migration qui fait des études chaque année et prépare des rapports. Ceux-ci nous indiquent que les pays développés auront besoin d’un certain nombre de professionnels… Ces personnes viendront des pays en voie de développement tels que Maurice. Forcément, il y aura un exode des cadres de Maurice qui va s’opérer.

Cela est en contradiction avec le rappel, par exemple, des autorités mauriciennes pour un retour des matières grises mauriciennes au pays…

Non, ce n’est pas inquiétant si on se prépare de manière dynamique. C’est une bonne chose que la population soit dynamique. Parce que le vide sera rempli de toutes les façons. Il s’agit de trouver des stratégies pour combler ces vides. Cela implique ouvrir nos frontières et permettre aux professionnels étrangers de pouvoir s’installer ici. Ainsi augmenter notre puissance intellectuelle.

Quelles doivent être les caractéristiques d’une politique de population?

Elle doit être une politique à long terme. Il faut essayer de voir tous les facteurs concernant l’effectif, la composition ethnique et voir comment cela évoluera.

Y a-t-il des aspects relatifs à la population qui sont négligés à Maurice?

C’est vrai que dans les années 1950 et 1960, nous avions des problèmes de démographie différents. Notamment à cause du fait qu’on avait beaucoup d’enfants par famille. Actuellement, nous sommes à 1,6 enfant par femme.

Nous sommes donc en-dessous du taux de remplacement qui est de 2,1 enfants par femme. Cela causera certainement des problèmes. Il faudra essayer de voir comment compenser. Il y a aussi des problèmes liés à la planification familiale. A Maurice, il y a 85% de taux de prévalence de la contraception. Dans ces 85%, 50% des méthodes utilisées ne sont pas fiables.

Faudrait-il donc revoir le système au niveau du family planning?

Le nombre d’avortements, c’est à peu près 17 000 par an. Si cela est vrai, il y aurait autant de naissances que d’avortements à Maurice. Les gens n’utilisent pas les services gratuits de planification familiale. Il y a aussi un problème avec les grossesses précoces. Il y a des adolescentes qui se retrouvent enceintes de manière précoce. Il y a un ensemble de choses à revoir.

Batrice Hope/Miguel Hermelin