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Le Festival International Kreol 2008, du malaise à la cause
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Le Festival International Kreol 2008, du malaise à la cause
Le Festival International Kreol (FIK) 2008 est placé sous le sceau de «Liberté, égalité, fierté». Un slogan qui résonne aux notes de la Marseillaise. Au-delà de l’analogie avec «Liberté, égalité, fraternité», l’île Maurice organise son troisième festival créole. Une initiative que saluent de nombreux observateurs. Mais le choix du thème ne fait pas toujours l’unanimité. Quelles seraient les retombées de ce festival? En quoi fait-il avancer la cause créole? Autant de questions que quatre de nos invités tentent d’apporter des réponses. Nous reproduisons ci-dessous leurs appréciations critiques. A vous d’en juger…
Henri Favory
Homme de théâtre
«Je suppose qu’ils ont choisi liberté parce qu’elle évoque la libération de l’esclavage. Or liberté peut aussi vouloir dire liberté de création. La fierté d’être Mauricien est un idéal en soi. Car elle implique un vivre-ensemble, le dépassement des clivages et des questions liées à la race et aux castes. Mais je ne crois pas qu’on ait atteint l’égalité. Il y a de cruelles inégalités de classes encore à Maurice. Dans l’ensemble, je pense qu’organiser un troisième festival d’affilée est déjà quelque chose de positif. Je note que Xavier-Luc Duval gagnera des points avec cette initiative quand on sait que les gouvernements précédents, surtout ceux se réclamant de gauche, n’ont rien entrepris en ce sens. Je souligne cependant que lorsqu’on parle de festival, on invite les artistes à participer. Reste donc, pour moi, la question de savoir à quel point, nous avons à Maurice la liberté de création?»
Jimmy Harmon
Responsable des projets pédagogiques au Bureau de l’éducation catholique
«Sur la question de l’égalité, nous avons encore du chemin à faire. Aussi longtemps que la langue créole ne sera pas dans nos écoles, nous hypothéquerons les chances d’un certain nombre d’enfants. C’est presque présomptueux de parler d’égalité lorsqu’il y a tant d’inégalités linguistiques dans nos écoles»
Jean-Maurice Labour
Vicaire-général du diocèse de Port-Louis
«Le fait que le gouvernement ait inscrit le Festival créole comme passage obligé dans le calendrier des célébrations nationales confère une forme de reconnaissance à la cause créole. C’est la légitimation d’un discours de revendication au sein de la République mauricienne. Pour le créole, c’est une grande fierté. Aujourd’hui, je constate que cette question créole à Maurice est débattue comme une thématique nationale et, cela, dans la sérénité. On ne parle plus de malaise créole. Je ne dis pas que les transformations sociales nécessaires ont été réalisées. Mais cette cause créole, désormais, est inscrite dans un processus d’apaisement. Nous savons que le malaise créole a traversé la société mauricienne et qu’il a même gagné l’église catholique. Cependant, aujourd’hui, on n’a plus peur d’en parler. Il y a certainement du chemin à faire. Par exemple, sur la question de la discrimination à l’emploi. Or, même sur cette question, on avance avec sérénité. Il en est de même sur la question de l’utilisation du créole à l’école. L’essentiel à présent, c’est qu’il y a une liberté à exprimer toutes ces questions. On est passé du malaise à la cause. Il y a un pas que le créole a, lui-même, franchi pour reconnaître la valeur de son identité. Il y a eu un travail de fond qui a été fait. Le créole n’a plus honte de son passé, de ses échecs, de son identité. C’était la condition pour poser la revendication. La cause créole avance même s’il n’y a pas d’unanimité. Le débat est sain»
Lindsay Morvan
Président du Mouvement pour le Progrès de Roche-Bois
«Je suis partie prenante du choix du thème retenu: Liberté, égalité, fierté. Tout choix, toute thématique sont développés en fonction d’un contexte. Dans le contexte actuel, il y a deux événements qui portent le thème retenu. D’abord, il y a eu l’inscription de la montagne du Morne sur la liste du patrimoine mondial. La créolité dispose ainsi, à Maurice, d’un lieu qui célèbre la libération de l’esclavage. Le Morne, c’est aussi le symbole de la résistance. Liberté, c’est une manière de valoriser le créole après l’esclavage. Sa lutte pour la liberté est reconnue. Le thème de l’égalité surgit par rapport aux grands débats contemporains. Il y a toujours eu le sentiment que le créole n’a pas eu un traitement égal. Avec la prochaine présentation de l’Equal Opportunity Bill, on est inscrit dans une mouvance positive. Enfin, il y a cette fierté des créoles de faire partie de la République mauricienne»
 
 
 
 
 
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