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Lindsey Collen : pour guérir de la malaria et des préjugés
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Lindsey Collen : pour guérir de la malaria et des préjugés
Le nouveau roman signé Lindsey Collen, «The Malaria Man and her Neighbours» est lancé aujourd''''hui. Il traite entre autres, de la lutte des travailleurs.
Première réaction. Instinctive. The Malaria Man and her Neighbours. Le titre du tout nouveau roman de Lindsey Collen nous fait sursauter. Pourquoi man et her ? Nous voilà captivés dès la couverture. Combien d’auteurs peuvent se vanter de susciter un intérêt aussi immédiat ? Et surtout de le garder ?
Tout au long des 250 et quelque pages de son septième roman. L’ouvrage, publié par Ledikasyon Pu Travayer, sera lancé cet après-midi. Titre énigmatique. Cristallisant l’attention autour d’une maladie aujourd’hui disparue de nos tropiques, la malaria. Et de ces préposés qui nettoyaient rivières et canaux, les malaria men. Une maladie tout allégorique car tant de parasites subsistent encore dans notre société.
Ce sont les parasites qui font la trame de ce roman tant de fois remanié et signé Lindsey Collen. Que ce soient certaines conditions de travail effarantes dans l’industrie sucrière. Ou les préjugés contre tous ceux qui sont nés Zan Pol et qui s’assument plutôt comme Polet.
Question légitime. Qui est le malaria man ? Lindsey Collen prend son temps pour nous le faire découvrir. Elle procède par petites touches. Complices, caustiques, sarcastiques. Intimistes aussi. Des talons aiguilles rouges par-ci. Une robe longue plaquée sur le corps par-là. « (…) lids pull sideways to mask the hurt they have known. Past hurt. That anyone can see. That no amount of mascara can hide.»
Du fard pour contredire la nature qui a fait Zan Pol homme. Du fard pour être femme. Du fard érigé en barricade, derrière lequel Zan Pol Kanzy. Zan Pol. Lepap, s’abrite des moqueries irrémédiablement associées aux travestis. Son corps finira-t-il par passer à l’église pour des funérailles en grande pompe ? Ou les préjugés le/la suivront-il/elle jusque dans la mort ?
Refaire le monde
D’avant en arrière, de fl ash back en bonds dans le temps, Lindsey Collen joue sur les mots. Joue avec nos nerfs. Passe des nerfs sur les mots. Pour leur faire dire des jurons ou des titres de chansons. Il y a tant de vérités «vraies», celles des kamarad travayer. Lindsey Collen a ces derniers à coeur depuis ses décennies d’engagement social et politique.
La différence, c’est que la romancière peut refaire le monde d’une façon dont la femme politique de gauche ne peut que rêver. Elle peut nous faire sourire alors que l’on a envie de pleurer.
Un univers nourrissant l’autre – sa longue expérience des grèves, des actions syndicales, des actions des squatters, des laboureurs – peuple le paysage romanesque de The Malaria Man and her Neighbours. Mais d’une manière tellement plus drôle que dans la réalité. Sa mem so bote.
C’est ce qui fait la richesse de l’écriture de Lindsey Collen. Ses choix sont clairs. Comme celui d’écrire systématiquement les noms de lieux en créole. Comme celui qui consiste à s’amuser avec les noms de personnage. Pour nous faire rencontrer un patron baptisé Mal Benny, Melomann, qui est le saxophoniste-chanteur, ou encore Brij-over-troubled-waters.
Attention, ce n’est que le premier niveau. Lindsey Collen pousse la subtilité plus loin. Par exemple, elle fait du dernier mot d’un chapitre, le titre du chapitre suivant. A commencer par Death. Mort violente des quatre principaux protagonistes. Un chanteur retrouvé mort en prison (cela vous rappelle quelque chose ?), un pendu, un noyé, une mort naturelle plutôt suspecte. Au départ, comme sans rapport l’une avec l’autre.
Que le jeu de piste commence. L’auteur tissera patiemment sa toile. En phrases souvent courtes, faites d’un mot. Pour nous communiquer le sentiment d’urgence, de catastrophe imminente. Nous ne serons pas déçus.
Aline GROËME-HARMON
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