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L''intégralité de l''entretien avec Vijay Makhan
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L''intégralité de l''entretien avec Vijay Makhan
Vijay Makhan : «La diplomatie mauricienne a toujours été économique»
De la diplomatie économique, qu’on présente comme quelque chose de neuf, Vijay Makhan hausse les épaules. Lui, il insiste que la diplomatie mauricienne a toujours reposé sur des impératifs économiques. Aujourd’hui, il propose de restituer les faits et, surtout, d’aller au-delà des lieux communs.
Pas besoin de mots ronflants. Encore moins de prétendre qu’on réinvente la roue. Ou encore de dresser des plans sur la comète. Les faits, souligne Vijay Makhan, parlent d’eux-mêmes. La diplomatie mauricienne a été active avant même que l’île n’accède au statut d’Etat indépendant. Déjà en 1964, rappelle-t-il, l’île disposait d’une mission diplomatique à Londres, plus précisément au Trafalgar Square. «Cette posture a été dictée par la force des choses. De par notre positionnement, éloignés des marchés et avec une économie monoculture, nous nous devions de gagner en visibilité afin de pouvoir exister dans un monde régi par le marché», explique, d’emblée, l’ancien diplomate.
Si chaque homme est une île, l’île Maurice, elle, se devait d’agir comme un continent. Au début, comme dans toutes les histoires d’émancipation, les premiers pas sont difficiles. Mais il fallait coûte que coûte les faire. Afin d’obtenir cette visibilité qui lui permettrait d’explorer de nouveaux marchés et se faire de nouveaux amis, il fallait s’appuyer sur ces pays qui sont déjà des amis. «Ainsi la mission en Angleterre, c’était un moyen pour nous occuper de nos relations avec les pays de l’Europe. Il ne faut pas non plus oublier l’Inde qui avait, elle aussi, une mission à Maurice. D’ailleurs, ces initiatives prouvent qu’on était déjà dans la logique de l’indépendance. C’est la raison pour laquelle que, moi, je ne crois pas qu’on était appelé à faire un choix entre l’indépendance et l’intégration car le monde était déjà dans l’ère et la dynamique de la décolonisation», lance Vijay Makhan. Il ne faut pas oublier que notre interlocuteur n’est pas uniquement ancien diplomate. Il est aussi aujourd’hui politicien, actif au sein du Mouvement Militant Mauricien. Donc, de temps à autres, il ne fera pas l’économie d’un petit message politique.
 Cependant, il se défend de faire de la politique politicienne. Pour illustrer ses propos, il insiste sur les vérités historiques. «La diplomatie économique a toujours influencé nos décisions et nos choix, et cela, avant même l’indépendance. L’île était ainsi active lors du processus de Yaoundé, précurseur des Conventions de Lomé. Grâce à Yaoundé 2, Maurice tissera des liens plus étroits avec le monde francophone à travers les liens existants avec la France. L’île était parallèlement membre du Commonwealth Sugar Agreement. Une fois que l’Angleterre intègrera le marché commun, Maurice va tirer profit du Protocole Sucre. A l’image d’autres anciennes colonies anglaises, nous avons commencé à vendre notre sucre dans le marché commun», explique longuement Vijay Makhan. C’est aussi sa manière pour situer la genèse de la diplomatie mauricienne qui est, réitère-t-il, d’essence économique.
«Sir Seewoosagur Ramgoolam avait cette vision et les contacts nécessaires pour rattacher le pays aux grandes puissances. Le dossier qui préoccupait le pays de loin et de près, c’était le sucre. Et elle va s’appuyer dessus pour développer sa diplomatie», affirme Vijay Makhan. Cette diplomatie va s’étoffer de nouvelles ambitions et de nouveaux défis avec les secteurs de la zone franche et du tourisme qui émergent dans les années 1970. La coopération avec les pays d’Europe s’en trouve accentuée.
Graduellement, Maurice prend confiance en soi. Jusqu’en 1976, c’est sir Seewoosagur Ramgoolam qui dirige la diplomatie mauricienne. «De temps à autres, il déléguait des responsabilités à sir Harold Walter. Globalement, il existait un esprit d’initiative. C’était quand même courageux de la part de tout le pays d’accueillir le sommet de l’OCAM dès 1973 et, en 1976, celui de l’OUA, alors que de nombreux pays africains traversaient des moments troubles», raconte l’ancien diplomate.
Durant cette période postindépendance, Maurice se signalait déjà par ses prises de position. Dans un monde divisé en deux blocs, l’Est et l’Ouest, l’île n’hésitait pas à prendre place auprès des non-alignés. Parallèlement, elle misait sur ses relations bilatérales pour faire avancer ses dossiers économiques.
L’île Maurice ne serait pas devenue ce qu’elle est si elle ne comptait que sur ses liens «historiques et fraternels» avec quelques grandes nations. Seule, la diplomatie économique ne peut accomplir des miracles. D’où le sens de la «diplomatie éducative». «Le pays avait vite compris que le projet de développement allait se trouver handicapé si un effort n’était pas fait dans le sens de l’éducation. On a ainsi commencé à négocier avec l’Inde, le Pakistan et, dans une moindre mesure, avec Nairobi, Accra et d’autres pays encore pour développer cette diplomatie éducative. A l’époque, la seule voie de sortie pour nos jeunes, c’était l’enseignement. C’est ainsi que les universités indiennes ont fourni, au départ, à Maurice nombre de ses diplômés. D’ailleurs, la diplomatie mauricienne, à ses débuts, recrutait parmi la classe des enseignants», confie Vijay Makhan.
Aujourd’hui, Vijay Makhan ne fait plus l’enseignant comme il l’a été au début de sa carrière professionnelle. Il veut surtout que Maurice prend moins de temps à réaliser ses ambitions que ce soit en diplomatie ou dans ses grands desseins nationaux.
   
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