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Méthadone : Quand le manque d’accompagnement plonge les toxicomanes dans l’assistanat

20 mai 2012, 00:00

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Méthadone : Quand le manque d’accompagnement plonge les toxicomanes dans l’assistanat

La distribution de la méthadone, produit de substitut à la drogue suscite bien de controverses. Six ans après son introduction à Maurice, les conditions dans lesquelles la méthadone est distribuée ne convainquent toujours pas.

L’état se charge de la distribution de la méthadone, aux organisations non gouvernementales (ONG), de s’occuper de l’accompagnement. C’est la réplique du ministère de la Santé lorsqu’on interroge les responsables sur le rôle de l’état dans l’encadrement offert aux patients qui sont sous traitement de la méthadone.

Quelques virées dans les hôpitaux où est distribué ce substitut de l’héroïne viennent en effet confirmer que ceux qui sont sous traitement se contentent quotidiennement de venir récupérer leurs doses, l’avaler d’un trait et ensuite prendre la direction de la porte de sortie.

La suite est en un attroupement guère agréable pour les membres du public. Dans bien de cas, une fois la dose ingurgitée, les patients n’ont aucun endroit où aller. Une situation qu’on retrouve pratiquement tous les jours aux abords des différents centres de distribution, ou alors à quelques mètres  des caravanes du ministère de la Santé.

Kader Hossen âgé de 50 ans qui est en traitement depuis maintenant deux ans, déplore-le manque de considération des autorités envers 5,393 usagers de la méthadone (5103 sont des hommes, 290 sont des femmes). « Je viens trois fois la semaine pour ma dose et une fois terminée je reste là à poireauter pendant des heures et après errer ça et là tout le long de la journée », explique-t-il.

Cette situation résume bien le quotidien des quelque 30 autres personnes postées en file indienne devant la caravane du ministère de la santé. Chercher du travail, disent-ils, relève de l’impossible. « Quel employeur voudrait avoir recours aux services d’un toxicomane. Nous avons sur notre front une étiquette où c’est écrit drogué », indique pour sa part Cooraban Ayoub. De plus des chiffres émanant du ministère de la Santé, révèlent que 50% des patients sous traitement de la méthadone sont porteurs du virus VIH/SIDA, ce qui vient ainsi démontrer l’handicap de ces personnes à trouver du travail.
Le travailleur social et responsable de Lakaz A, Cadress Runghen explique que la réhabilitation d’un toxicomane qui a recours à la méthadone dépend largement d’un programme d’accompagnement. « La méthadone n’aide qu’à 10%, l’accompagnement social est primordial pour la réhabilitation de ces personnes », avance-t-il. « L’état a placé ce programme d’accompagnement sur notre dos, et là aussi avec le peu de moyens dont nous disposons, nous ne pouvons pas dire que c’est une réelle réussite », ajoute-t-il.

A Lakaz A, il explique que 50% des patients sont réfractaires au programme qui leur est offert. « Nous n’avons pas les outils nécessaires pour les convaincre d’être partie prenante. Il faudrait être capable de les obliger à prendre part, comme c’est le cas dans plusieurs pays, au cas contraire ils vont éternellement se contenter de la méthadone et par la suite être condamnés à l’assistanat », affirme Cadress Runghen.

Le ministère de la Santé se dit néanmoins conscient que l’accompagnement se trouve être un point faible de l’Etat dans le processus de réhabilitation des toxicomanes. Il y a à ce jour deux Drop-In centres qui ont été créés par le gouvernement pour combler ce vide. L’un se trouvant à Cassis, le deuxième à Ste Croix, un troisième est en passe d’être construit à Roche-Bois, malgré la réticence affichée par les habitants de la région, qui avaient manifesté contre le projet. Le ministre du Travail, Shakeel Mohamed qui est aussi député de la circonscription a néanmoins été catégorique. « Il y aura bel et bien un centre à Roche-Bois ».