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Mali : une guerre de conséquence

4 février 2013, 00:00

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Mali : une guerre de conséquence

L''opération militaire engagée au Mali vise très largement à contrer une des conséquences d''une précédente intervention, en l''occurrence en Libye, en vue de déloger un régime indésirable. Quelle seront les conséquences de la guerre au Mali, dans le pays, entre Maliens, mais aussi en dehors du pays où l''un ou l''autre pourrait vouloir porter la vengeance ? En attendant, c''est dans la région de Kidal, dans le massif de l''Adrar des Ifoghas, vers la frontière algérienne, que sont susceptibles de se porter les combats.

A la mi-janvier 2013, le précédent secrétaire général des Nations unies décrivait la réalité au Mali comme un « dommage collatéral » de l''opération militaire de l''OTAN en Libye. « La situation au Mali n''est que la dernière leçon en matière de conséquences non-voulues des interventions militaires », ajoutait Kofi Annan. Et ce dernier de s''inquiéter des suites, sur les territoires voisins, voire en Europe, des combats menés au Nord-Mali. Par ailleurs, si l''on s''en tient au message diffusé le dimanche 3 février par les Talibans du Pakistan, l''intervention au Mali suscite un appel à la mobilisation internationale des djihadistes contre les Occidentaux.

Alors qu''il était reproché à Bamako de ne rien entreprendre pour mettre fin aux lucratives prises d''otages d''al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), le président malien d''alors, Amadou Toumani Touré (ATT), accorda, en octobre 2010, une interview au quotidien communiste français L''Humanité. A une question sur le rétablissement de l''ordre au Nord du pays, ATT répondit : «Demander à notre armée de contrôler toute cette zone, avec ses modestes moyens, c’est lui demander l’impossible. Le Mali n’est pas opposé à l’option militaire. []]]…] Mais cela ne suffira pas, si nous ne gagnons pas la bataille au sein de populations exposées aux contraintes et à la peur. []]]…] Ces populations du Nord vivent dans une grande précarité. Les jeunes n’ont pas accès à l’éducation, ils n’ont pas de travail, pas d’avenir. []]]…] Sans développement, les méthodes militaires, même généralisées, seront vouées à l’échec ».

Alors que les populations sont pauvres, leurs méthodes d''élevage artisanales, leurs jeunes sans espoir, les sous-sols, en revanche, sont riches. Si le pétrole et, à plus forte raison, son exploitation sont encore des mirages, selon un chercheur français, de la revue Africa Energy Intelligence, en revanche, l''or a été exploité depuis l''époque de l''empire du Mali, au XIVe siècle. Aujourd''hui, l''industrie s''intéresse au kaolin, au gypse, au manganèse, au lithium au fer, aux schistes bitumeux, au fer, au nickel, au zinc, au plomb, à l''uranium. Les richesses convoitées sont, à n''en point douter, à la base des courant sécessionistes du Nord. Mais l''itinéraire d''Iyad ag Ghali, le fondateur d''Ansar Dine, longtemps autonomiste avant de devenir djihadiste, pourrait indiquer que les ressources matérielles n''expliquent pas tout.

À la mi-octobre 2012, sous le titre Mali : l''Afghanistan au nord du Burkina, cette même rubrique, Le Tour du Web, notait : « Après avoir hâté le retrait des troupes françaises d’Afghanistan, quel rôle François Hollande et sa majorité accepteront-ils d’accorder à la France dans cette guerre ? Aux frontières, entre autres, de l’Algérie et de la Mauritanie. Susceptible de provoquer aussi des actes de terrorisme sur le territoire français ».

Y-a-t-il eu, au sein du gouvernement Hollande, des va-t-en-guerre, des néoconservateurs comparables à ceux qui orientaient la pensée de George W. Bush en 2001 et en 2003 ? Ne s''est-il trouvé personne pour évoquer les leçons que la France pourrait tirer de l''engagement occidental en Afghanistan et, encore plus vivement, dans le bourbier d''Iraq ? Jusqu''à quand les troupes françaises resteront-elles au Mali ? L''apparente fuite des djihadistes est-elle réelle ? Quelques unes des questions que pose l''intervention française au Mali.

Depuis des siècles, le Mali compte en son sein une multitude d''ethnies. Son emplacement, au point de croisement des populations nomades du Sahara et des peuples sahéliens noirs en a toujours fait, tout aussi bien, un lieu de tension que d''échanges, tant l''enjeu de divergences religieuses qu''une plate-forme pour le trafic de drogue. Qu''est-ce qui est susceptible de se passer désormais ? L''anthropologue français André Bourgeot, spécialiste de la bande sahélo-saharienne, envisage que l''opération puisse « se transformer en guérilla ». Autant de points de ressemblance avec l'' Afghanistan.