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Olivier Bancoult: «Notre combat n’est pas contre les Anglais, mais pour les Chagossiens»

11 novembre 2009, 20:03

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Olivier Bancoult: «Notre combat n’est pas contre les Anglais, mais pour les Chagossiens»

Le leader du Groupe Refugiés Chagossiens revient sur la récente visite de 18 Chagossiens sur la terre de leurs ancêtres.

Privés de leur pays et de leurs attaches, les Chagossiens connaissent un calvaire qui date des années 1968. Jusqu’en 1973, les États-Unis et la Grande Bretagne ont mené des opérations dans le but d’éloigner le peuple Chagossien de ses archipels. Les 1 500 à 2 000 îlois étaient soit interdits de retourner chez eux après être partis pour des visites médicales soit étaient en vacances à Maurice. Autre ruse, les approvisionnements en nourritures et médicaments étaient boycottés afin de les pousser à abandonner leurs îles.

Les résistants, quant à eux, étaient entassés de force dans des cargos surchargés pour les destinations de Maurice et des Seychelles.

Rappelez-nous les grands moments du combat des Chagossiens…

Malgré des protestations dans les années 1978 et 1982 qui ne nous vaudrons qu’une mince compensation, le vrai combat des Chagossiens commencera en 1997 avec des charges portées par le Groupe Refugiés Chagossiens, soutenues par des avocats anglais et mauriciens, contre le gouvernement britannique. La dernière victoire du mouvement est la permission qui nous fut accordée de nous recueillir sur la tombe de nos ancêtres.

Comment a vécu le petit groupe de 18 Chagossiens pour son retour aux Chagos?

Cela nous a fait mal de voir des étrangers vivre et travailler sur Diégo Garcia alors que nous, les fils du sol, en sommes interdit. C’est l’un des premiers sentiments que nous avons ressenti. Cette impression d’être locataires chez soi.

Qu’avez-vous ressenti sur place?

C’est dans un esprit de pèlerinage que nous sommes partis nous recueillir et nettoyer le lieu où sont enterrés nos grands-parents. Peu importe votre communauté, on a tous du respect pour nos défunts. Pourquoi donc pas nous? Même si tous les Chagossiens n’ont pas pu y participer pour le moment, les 18 personnes qui y sont allés ont représenté toute notre communauté.

Sur place, nous avons fait un état des lieux, les réparations nécessaires au niveau des pierres tombales et autres. Désormais, nous envisageons de déposer une demande auprès de l’Etat britannique dans les jours à venir afin que des réparations soient faites. Le groupe a foi en la justice. Malgré notre défaite, quelques années auparavant, face à la Chambre de l’Ordre, nous sommes fiers de notre victoire devant trois autres grandes instances britanniques. Les Chagossiens ne sont pas fatigués de leur combat car ils luttent pour une cause juste qui est leurs droits fondamentaux. Mais je tiens à rappeler que notre combat n’est pas contre les Anglais, mais pour les Chagossiens.

Comment se situe aujourd’hui la communauté chagosienne à Maurice?

Aujourd’hui il ne reste plus que 714 natifs des Chagos et environ 5 000 descendants. La lutte est loin d’être terminée car des jeunes comptent prendre la relève. Nous voyons des descendants des travailleurs engagés partir à la recherche de leurs familles et leur racine en Inde. C’est légitime que nous fassions de même. La beauté des Chagos suffirait pour convaincre les jeunes d’y aller. Il serait bête que ce soit aux étrangers de profiter et d’exploiter nos lagons alors qu’on pourrait créer de l’emploi là-bas.

Quelles sont les futures actions de votre groupe?

Le Groupe Refugiés Chagos se prépare pour les jours à venir une conférence, durant laquelle il compte dévoiler la beauté et la richesse de l’Archipel des Chagos. Nous avons ramené de notre voyage des photos qui seront partagées avec le public afin qu’il prenne conscience de les pertes qu’ont subies les Chagossiens. Je montrerai au monde entier dans quel état les lieux de cultes, qui sont notre patrimoine, sont laissés à l’abandon. A partir de là, on espère trouver le soutien qui nous permettra de mettre la pression sur le gouvernement britannique afin qu’il entretienne l’archipel.

Retrouvez  l’interview d’ Olivier Bancoult en vidéo.

 

Issaie MOURADE