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Présentation officielle de l’étude War@Home : des résultats qui ébranlent
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Présentation officielle de l’étude War@Home : des résultats qui ébranlent
24 % des femmes ont déjà été victimes de violence alors que 23 % des hommes reconnaissent en avoir usée. «Gender Links» présente les «Gender-Based Violence Indicators», une étude réalisée en collaboration avec le «Mauritius Research Council».
Qu’est-ce qui fait que Maurice soit une société où près d’un quart de sa population féminine ait subie une forme de violence dans sa vie et où un pourcentage quasi-similaire d’hommes admet l’avoir été au cours de leur existence ? Si toutes les personnalités présentes hier, jeudi 29 novembre, à l’occasion de la présentation officielle de l’étude War@Home – Gender-Based Violence Indicators Study menée entre 2010 et 2011 par Gender Links (GL), de concert avec le Mauritius Research Council, n’ont pas été en mesure d’en dire les causes avec certitude, elles ont exprimé leur indignation et ont affirmé qu’elles feraient tout ce qui est en leur pouvoir et à leur niveau respectif pour contribuer à réduire cette violence basée sur le genre (VBG).
Les qualificatifs et les images pour décrire les résultats de cette étude n’ont pas manqué hier au Hennessy Hôtel d’Ebène où a eu lieu cette présentation officielle. Les conclusions de cette étude ont été rendues publiques en octobre dernier à l’issue d’un atelier de validation par toutes les parties prenantes. Résultats qui avaient d’ailleurs fait la Une de l’express et repris par lexpress.mu.
Pour Loga Virahsawmy, directrice de GL à Maurice, qui a été très émotionnée en faisant état des témoignages qui font partie de l’étude et qui ont été recueillis dans l’optique de donner un visage humain aux statistiques, «il n’y a pas de médicaments pour la violence. Celle qui le subit est comme un cristal qui tombe et se brise en mille morceaux. Il vaut mieux que cela n’arrive jamais».
Elle a rappelé la disparité entre les statistiques de l’étude et celles ayant trait aux plaintes officielles et a exprimé sa surprise par rapport au pourcentage du harcèlement sexuel au travail, soit 6,3 %, qu’elle croyait supérieur dans les rues. 
Le fait que les Mauriciens aient été négligés durant l’enfance et même abusés sexuellement lorsqu’ils étaient enfants, explique mieux selon elle pourquoi les hommes se transforment en bourreaux par la suite.
Ce rapport et surtout les questionnaires d’attitudes ont aussi démontré que la société mauricienne est encore très patriarcale. «Par rapport aux attitudes du genre, nous sommes encore très arriérés », a-t-elle dit, en précisant que les statistiques ne mentent pas. «C’est un rapport extrêmement important et il faudrait beaucoup de campagnes de sensibilisation pour changer ces attitudes du genre.»
Cette étude vient aussi mettre en lumière le fait que les politiciens ne parlent pas suffisamment de la VBG et les médias également car la couverture médiatique sur le sujet durant la période de l’étude n’était que de 2 %. Elle a également souligné qu’il y a «un manque criant d’abris alors qu’il est possible de survivre si les victimes sont bien soutenues.»
Pour Lormus Bundhoo, ministre de la Santé, «il est inacceptable que 51 % de la population subisse la violence.» En tant que père, il a dit qu’il ne voudrait pas que sa femme ou ses enfants lui fassent un jour le reproche d’avoir été un époux et un père violent. Abordant l’aspect religieux, il a rappelé qu’aucun livre sacré ne fait l’apologie de l’inégalité entre hommes et femmes et que c’est la société qui créé ces différences. «C’est à la société de corriger son comportement et ses attitudes».
Il a laissé entendre que le Premier ministre a donné des instructions à ses ministres lors de leur réunion hebdomadaire du Cabinet pour qu’ils soutiennent toute solution durable contre la violence. Il a rappelé les mesures prises par son ministère pour venir en aide aux survivantes de violence et en tant que secrétaire général du Parti Travailliste, il a spécifié que dans l’histoire du pays, il est clair que c’est son parti qui a fait davantage pour les femmes, avec notamment le droit de vote pour elles à 18 ans, l’éducation gratuite, la promulgation de lois contre la violence domestique et la discrimination sexuelle et la législation sur les collectivités locales où chaque parti est tenu d’aligner au minimum 30 % de femmes. «Mais au final, ce ne sont pas les lois qui vont changer les mentalités et les attitudes. Vous pouvez compter sur le Premier ministre et tous les ministres pour donner un coup de main dans cette lutte contre la VBG».
Denis Ithier, directeur général de La Sentinelle Ltée, a convenu avec la directrice de GL, que 2 % de couverture médiatique sur la VBG est «choquant». Tout en reconnaissant que les médias à Maurice sont forts et farouchement indépendants, comme l’a souligné l’étude, il estime que les gens de la presse doivent être combatifs et intrépides, sensibles au genre et plus engagés dans la lutte contre la VBG. «Les médias ont besoin de plus de formation et de coaching par rapport aux questions du genre d’abord et ensuite par rapport à la VBG. Les médias concernent les personnes et pour être à même de parler et d’écrire à leurs propos, ils doivent être prêts à se débarrasser de leurs clichés et de leurs tabous pour comprendre les notions et utiliser les termes exacts, comme par exemple le mot survivante qui préserve davantage la dignité de l’être humain et qui véhicule une connotation de victoire.»
Le directeur général de La Sentinelle Ltée considère que l’étude doit être lue avec attention et que des actions doivent être prises aussi bien par le gouvernement que la société civile et les médias. Le rôle des médias est multiple. Ils doivent informer avec l’objectif de prévenir, tâche difficile car elle relève davantage de la dispensation de conseils plutôt que de compte-rendu des évènements. «Il faut se garder de faire du sensationnalisme mais adopter des approches originales pour retenir l’intérêt ».
Dans cette mission, Denis Ithier est persuadé qu’une coordination étroite entre les différentes plateformes médiatiques est essentielle. «Cela va au-delà des lignes éditoriales différentes et divergentes. Une campagne a plus de chance d’atteindre sa cible quand, pendant une période définie, toutes les plateformes médiatiques véhiculent le même message».
La façon de communiquer est importante. Les journalistes doivent s’en tenir aux faits, protéger l’intimité de la survivante et rapporter les détails avec prudence, tout en dénonçant sans réserve la violence. Il estime qu’il appartient aussi aux médias de veiller à ce que les engagements pris soient tenus et de dénoncer les coupables agissant avec la complicité de leur environnement. «Les médias doivent s’impliquer. Leur engagement doit d’abord être d’ordre éditorial et il est essentiel que les femmes journalistes soient bien représentées dans les salles de rédaction. Cela aide et constitue un groupe de pression important. Ensuite, les médias doivent soutenir pleinement toutes les campagnes contre la VBG. Leur rôle ne peut pas se cantonner à une aide car ce serait courir le risque de ne recueillir qu’une attention marginale. Il ne peut s’agir que d’un simple devoir car le risque est qu’il serait simplement rempli. Ce rôle doit être motivé par la conviction. A ce moment-là, cela engendra engagement et détermination», a-t-il dit.
En examinant ces statistiques, Shakeel Mohamed, ministre du Travail, a fait part de sa conviction que «Maurice a une société pourrie» où les Mauriciens se croient experts en tout et passent leur temps à palabrer au lieu de s’entraider. «J’ai honte car ce rapport est un doigt pointé sur mon pays». Il n’est pas surpris par le pourcentage ayant trait au harcèlement sexuel au travail car les Mauriciennes ne connaissent pas leurs droits suffisamment. Selon lui, chaque Mauricien doit faire son introspection. Il dit avoir côtoyé le sexisme et avoir giflé un homme qui avait battu sa compagne parce qu’elle avait laissé échapper un sac de courses. «Mais je ne peux régler le problème de la violence en frappant les gens à tour de bras. Je serai honnête envers vous. J’ignore quoi faire. Il faudrait miser sur l’éducation mais comment changer la mentalité des parents? Peut être devrions-nous prendre, nous aussi, la responsabilité de ce que font les citoyens. C’est alors que les choses changeront. Peut-être que les solutions doivent être données par la société civile aux politiciens et pas l’inverse. Je le redis : face à de tels résultats, j’ai honte de mon pays.»
Brian Glover, président de l’Equal Opportunities Commission et avocat, trouve les résultats de l’étude «alarmants» et a reconnu que la violence émotionnelle n’est pas considérée par les autorités. «Dès qu’un Protection Order a été violé et que la femme essaie de porter plainte, les policiers refusent d’enregistrer sa plainte car ils disent que ce délit relève d’une affaire civile. Les policiers ne sont pas les seuls à blâmer. Il y a beaucoup de personnes, en situation d’autorité, qui se lavent les mains».
Il explique la situation de VBG par des «réflexes patriarcaux et de plus en plus individualistes qui tuent les droits humains.» La Commission préfère faire un travail de conscientisation auprès des jeunes car il considère qu’il est difficile de changer la mentalité des adultes. Tout comme le ministre du Travail, il pense que les solutions durables contre la VBG devraient venir de la société civile et être suivis par les politiciens.
Mireille Martin, ministre de l’Egalité du Genre, a affirmé que son ministère fait beaucoup pour freiner la VBG en soutenant financièrement Men Against Violence, émanation de Women In Politics et SOS Femmes, en mettant en place une structure de soutien pour les agresseurs, en lançant prochainement un clip dénonçant la violence envers les femmes et les enfants.
Mais, estime-t-elle, la responsabilité première des survivantes est de dénoncer leurs bourreaux. «Mon ministère n’y pourra rien si les survivantes ne donnent pas de dépositions à la police», a-t-elle dit, en précisant que les campagnes de conscientisation doivent cibler tout le monde, adultes comme jeunes. Et pour qu’il y ait un changement de mentalités et d’attitudes, les efforts doivent être collectifs.
Le Botswana, pays où la violence a droit de cité
Cette étude réalisée par GL dans trois pays de la Communauté de Développement de l’Afrique australe jusqu’ici, quatre provinces de l’Afrique du Sud, le Botswana et Maurice, révèle que la violence est extrêmement élevée au Botswana où 67 % de femmes disent avoir été victimes de violence durant leur vie. Par contre, un pourcentage plus important d’hommes dans les provinces de Gauteng et du Kwazulu Natal en Afrique du Sud (76 % et 41 % respectivement) admettent s’être montrés violents envers leur partenaire au cours de leur existence. 
Dans les trois pays, la forme de violence la plus courante est la violence entre partenaires intimes, suivie du viol par un étranger. La violence entre partenaires intimes est plus élevée encore une fois au Botswana où 60 % de femmes en ont fait état contre 51 %, 44 % et 29 % de femmes dans les provinces respectives de Gauteng, Westen Cape, Kwazulu Natal.
 
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