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Ron Kaufman : «La créativité n’attend pas les directives d’un chef

23 juin 2011, 08:15

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Comment définiriez-vous le terme «service» ?

Même si l’industrie des services est énorme, peu de gens ont une réponse claire à cette question. Au fil des années, j’ai appris que le service existe quand quelqu’un fait une action. Le but de cette action étant de créer de la valeur ajoutée pour quelqu’un d’autre. Ce qui défi nit le bon service, c’est de savoir ce que l’autre apprécie, en l’écoutant, en le comprenant, en sachant à quoi il attache de la valeur. Si on met de côté l’aspect commercial, le service, c’est prendre soin d’une autre personne. Dans le cadre commercial, c’est créer de la valeur ajoutée. Et pas que pour le client. Cela est valable également entre collègues, en tant que «partenaires de services».

Une notion que vous essayez de transmettre, c’est la culture de service. Pouvez- vous nous en parler ?

Un bon service se défi nit par la prise de bonnes actions, au bon moment, avec l’objectif que celles-ci soient appréciées par le bénéficiaire. La culture de service, c’est quand chacun dans une organisation cherche les moyens de faire ces bonnes actions, pour le client comme pour ses collègues. Cette culture se développe quand tout le monde se concentre sur l’amélioration de la performance de l’organisation. C’est autre chose que d’apprendre à des individus à suivre des procédures, une «check-list».

On dit souvent que nous nous trouvons actuellement dans l’ère des services. Qu’est-ce que cela implique ?

Cette ère a encore évolué. L’accent n’est plus seulement sur les services que nous offrons, mais sur l’expérience. L’expérience qu’a le client grâce aux services, aux produits, au site Web qui sont mis à sa disposition.

Où se situe Maurice dans cette «ère d’expérience» ?

Maurice a une réputation d’envergure internationale. Or, cette perception n’est pas statique. Elle va soit s’améliorer soit se dégrader. Les gens peuvent très bien aller ailleurs pour passer leurs vacances. Imaginez, par exemple, qu’un autre pays arrive à générer une envie d’ampleur nationale pour ce qui est de l’amélioration de l’expérience que vit un touriste. Maurice a une opportunité unique d’agir en ce sens dès maintenant. Le travail que je fais avec Naïade est particulièrement excitant. Je décrirai sa transformation comme celle de la chenille qui devient un papillon. De l’obscurité à la clarté, du vieux au neuf, du lourd au léger. Cette même idée peut s’appliquer à toute l’île. Il ne s’agit pas de dire : «Nous avons ceci, nous avons cela», mais plutôt de demander au client : «Que voulez-vous faire ? Que voulez-vous savoir ?» Naïade va prendre les devants et montrer à Maurice que cette transformation est possible.

Au vu de votre connaissance de Maurice, que nous faut-il changer, sur une base nationale, pour développer une telle culture de services ?

D’abord, encourager la créativité et le leadership personnel. C’est primordial pour Maurice. Si vous êtes dans l’hôtellerie et que vous ne faites que suivre une liste de procédures, vous ne verrez aucune amélioration. L’attitude opposée implique que tous les employés se demandent ce qu’ils peuvent faire différemment ou mieux au quotidien. La question de créativité sous-entend de ne pas attendre les directives d’un chef mais de prendre les devants et d’agir pour le bien du client ou de sa société, et pourquoi pas de Maurice ?

Vous avez travaillé avec des sociétés privées prestigieuses, mais aussi avec le gouvernement singapourien. Les critiques ne manquent pas à l’égard du service public local : lent, procédurier, froid... Que recommanderiez-vous pour faire bouger les choses à ce niveau ?

Le terme «service» est présent partout. Il faut tenir compte, cependant, du fait que le service public n’est pas régi par un cadre compétitif. Par opposition, si un restaurant ne vous satisfait pas, vous allez voir ailleurs. On ne peut pas faire de même pour une instance gouvernementale. La motivation ne viendra pas du souci de profitabilité ou d’attirer plus de clients. La solution viendra du «job satisfaction» du sentiment qui poussera l’employé au comptoir à vouloir aider le client. La plupart du temps, cela ne demande qu’un sourire. Et cela est valable aussi pour les citoyens. C’est une appréciation dans les deux directions.

Entretien réalisé par Ludovic AGATHE
(Source : l’express iD, jeudi 23 juin)

Ludovic AGATHE