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Sachooda Ragoonaden : « La pluviosité à Maurice continuera à baisser »

9 janvier 2011, 11:29

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Le météorologue à la retraite rappelle ce que démontrent les statistiques :  Le problème de l’eau à Maurice deviendra encore plus problématique si des mesures ne sont pas rapidement prises.

Inondations en Australie et sécheresse à Maurice. Le climat se détraque ou est-ce quelque chose de normal ?

Des conditions anormales se développent de temps en temps dans la région du Pacifique, avec des impacts socio-économiques et environnementaux significatifs.

Si la température moyenne à la surface de l’océan dans les zones tropicales est et centrale du Pacifique est plus chaud de 0,5 degrés par rapport à la normale, il est estimé que c’est une phase El Niño. Si cette moyenne est plus froide de 0,5 degrés, c’est La Niña.

Actuellement, nous sommes dans une phase La Niña, qui va se renforcer durant les mois à venir. Pendant une phase La Niña, la température de la surface de la mer est plus chaude dans la région de l’Indonésie et de l’Australie, avec des conditions plus fraîches dans l’ouest de l’océan Indien. Il y a donc davantage d’instabilité, avec plus de nuages, dans la région de l’Indonésie et de l’Australie et des conditions stables dans l’ouest de l’océan Indien. Les récentes inondations en Australie sont associées au phénomène La Niña.

Il est estimé les importantes chutes de neige en Europe et en Amérique du Nord seront de plus en plus communes, étant les conséquences du changement climatique. De la même façon, les phases El-Niño and La Niña deviendront plus fréquentes et plus intenses. La sécheresse actuelle dans notre région peut être associée avec La Niña.

En quoi El Niño et La Niña affectent notre climat ?

Actuellement, une phase La Niña se développe dans le Pacifique. Elle devrait persister dans les mois à venir et peut-être même durant toute l’année 2011.

Comme le Pacifique, l’océan Indien passe par des phases de fluctuations climatiques, connues comme le Dipôle Océan Indien (Indian Ocean Dipole — IOD). L’IOD a été identifié en 1999. Des phases positives du IOD ont tendance à coïncider avec El Niño et des phases négatives avec La Niña. Durant ces phases négatives, survient un refroidissement anormal de la température à la surface de la zone équatoriale de l’ouest de l’océan Indien, alors que dans la partie est, près de l’Australie, il y a un réchauffement anormal.

En 1980, on avait eu droit à des pluies diluviennes dès décembre. Il semble que ces grosses pluies d’été sont désormais plus tardives, comme en mars 2008. Les statistiques en attestent ou bien est-ce seulement une impression ?

Du point de vue de la climatologie, la pluviosité moyenne à long terme à Maurice est de 2 010 mm. Les mois les plus humides sont janvier, février et mars et le plus sec, octobre. La pluviosité moyenne en été – de décembre à mai) est de 1 344 mm, ce qui constitue 67% de la moyenne annuelle. La moyenne en hiver – de juin à novembre – est de 666 mm. Les statistiques démontrent bien qu’il pleut davantage en été, ce qui permet aux réservoirs de se remplir.

Au cas où il ne pleut pas, comme en 1999, une période connue comme la sécheresse du siècle à Maurice, la situation devient catastrophique. Et 1999-2000 coïncidait avec une phase très forte de La Niña.

Selon des études des services météorologiques nationaux, il a été noté que le début des pluies d’été intervenait début novembre. Cependant, cette période s’est effectivement déplacée graduellement vers décembre, puis, ces derniers quatre ans, vers janvier.

En outre, une étude des données de la pluviométrie sur une longue période, de 1905 à 2007, indique une tendance vers la baisse de la pluviosité annuelle. Une étude pour la dernière décennie démontre que la moyenne annuelle est de 8% de moins que pour les années 1950. Cette tendance à la baisse devrait persister.

Il a aussi été noté que le nombre de jours de pluie a diminué alors que la fréquence de grosses averses a augmenté alors que les inondations subites surviennent plus souvent dans la période estivale de janvier à mars.

Ce sont les cyclones qui habituellement permettent à nos réservoirs de se remplir. Cependant, durant les cinq dernières années, ce sont les averses sans aucun rapport avec les cyclones qui ont permis à nos réservoirs de se remplir.

La fourniture en eau devient de plus en plus problématique…

Avec une augmentation de la consommation d’eau – population en hausse, davantage de touristes et d’industries, extension des projets d’irrigation… – accompagnée d’une baisse de pluviosité à cause des changements climatiques, assurer une distribution d’eau adéquate et régulière pour répondre aux besoins domestiques, industriels et agricoles deviendra problématique.

Outre les efforts des autorités – notamment à travers une gestion judicieuse de la fourniture d’eau, l’exploitation de nouveaux forages, la réduction des fuites, la construction de nouveaux réservoirs – pour satisfaire la demande, deux mesures s’avèrent impératives : la récupération de l’eau pluviale, par le truchement de la collecte de l’eau tombant sur les toits pour être utilisée pour le jardinage, le nettoyage des véhicules ou encore pour les toilettes, ainsi que des campagnes de sensibilisation pour économiser l’eau, comme quand on se brosse les dents, quand on se savonne sous la douche etc.

Propos recueillis par Iqbal KALLA

 

Iqbal KALLA