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Salil Roy : « La prime payée aux planteurs de la canne à sucre est dérisoire »
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Salil Roy : « La prime payée aux planteurs de la canne à sucre est dérisoire »
Le Président de la Planters’ Reform Association  commente la situation qui prévaut dans le secteur de l’Agro-industrie.
? Quels sont les dossiers prioritaires pour l’agro-industrie en 2012 ?
Pour 2012, je dirais que c’est la Mauritius Cane Industry Authority. Ce qu’on peut constater avec ce projet de loi, c’est qu’il a surtout pour but de pérenniser les Service Providing Institutions (SPI) et non pas de revoir leur mode d’opération. La finalité dépend beaucoup de la composition de son futur conseil d’administration. Nos attentes se placent surtout sur les deux représentants de planteurs qui y siègeront.
? Outre la question des représentants, trouvez-vous que le projet de loi soit adéquat ?
On a vu un peu de «copier-coller». On a pris du vieux pour faire du neuf, alors que la situation demande qu’on repense en profondeur la loi-cadre de l’industrie sucrière.
? Vous n’êtes pas convaincu qu’il s’agit effectivement d’une réforme ?
C’est une réforme mais, le plus important, c’est what will come out of it ? Et cela dépend beaucoup de l’administration. Dans le passé, nous avons eu beaucoup d’institutions où il y a eu des gens compétents, certes, mais qui ne connaissaient pas le domaine agricole.
? Le piège à éviter, ce sont les nominés politiques qui n’y connaissent rien ?
Oui ! Sinon, c’est back to square one.
? Le manque d’eau a posé de vraies difficultés en 2011. Y a-t-il des solutions ?
Il faudrait faire un recensement, parce que c’est écoeurant de voir nos rivières se déverser dans la mer. Il y a une tendance à paniquer, sans étudier en profondeur ce dossier. Ce qui nous amène à l’interdiction d’utiliser cette eau pour l’irrigation. Il faut en fait que les rivières soient canalisées afin d’éviter que toute cette eau soit perdue. Je fais surtout référence à l’Est, au Deep River. A Pont Lardier, l’eau est toujours abondante également.
? Qu’en est-il du dossier de l’énergie et de la bagasse ? Peut-on s’attendre à des développements majeurs en 2012 ?
La survie de toute la communauté des planteurs dépend de la conclusion de ce dossier. Durant la dernière décennie, 8 000 planteurs cultivant 5 000 hectares de terres ont abandonné. Aujourd’hui, même les usiniers sont d’accord sur le fait que la prime payée aux planteurs est dérisoire. Les planteurs ont déjà déposé devant la commission Williams and Hunton cela fait belle lurette ! Apparemment, ce dossier est au niveau du Bureau du Premier ministre (PMO). J’ai eu vent qu’il y aura des développements. On attend toujours.
? Vous y croyez vraiment ?
Ce n’est pas la première fois qu’on entend cela. Toutefois, des quelques Rs 1 300 que les planteurs reçoivent par tonne de canne pour la récolte 2011, Rs 1 200 proviennent du sucre seulement. Il est temps que cela change.
? C’est-à-dire ?
C’est-à-dire que nous devons augmenter nos revenus des autres produits de la canne, au niveau de la bagasse surtout. Actuellement, nous recevons Rs 7 par tonne de canne pour la bagasse. La canne contient 30 % de bagasse, donc en termes de tonne de bagasse, cela représente Rs 21. Comparez à nos confrères réunionnais qui reçoivent Rs 450.
? Voilà trois ans que vous avez déposé devant la commission «Williams and Hunton» sur cette question. Où est-ce que cela bloque ?
Il y a un litige concernant les Independent Power Producers (IPP). Ils objectent aux findings de ce rapport.
? Le rapport leur est donc défavorable ?
S’ils objectent, je pense bien…
? Vous avez pris connaissance du contenu du rapport ?
Non, mais je trouve cela bizarre, car tout le monde a déposé, même les IPP. Ils étaient d’accord avec leurs terms of reference. Maintenant, il y a litige entre les IPP et le gouvernement. Ce qu’il est important de faire ressortir, c’est que c’est most unfair que tous les stakeholders ont une copie du rapport, sauf les planteurs.
? Les autorités devraient-elles donc durcir la ligne face aux IPP ?
Je pense qu’il faut prendre des décisions, il ne faut pas faire de procrastination. En sortant du ministère de l’Agriculture, le rapport est allé au ministère des Finances, maintenant, c’est arrivé à bon port – au PMO. Alors, nous attendons le dénouement. Nous sommes optimistes. Je pense que nous aurons quelque chose de concret cette année.
? Etes-vous optimiste aussi en ce qui concerne le dossier de l’éthanol ?
Les discussions entre le promoteur et les planteurs se poursuivent. Même si nous aurions souhaité davantage de transparence, de communication et une implication plus méthodique et sérieuse des SPI dans le processus.
? Vous avez soumis un rapport aux autorités et «Omnicane» a beaucoup investi. Pourquoi cela n’a pas encore abouti ?
Je vois pas mal de publicité et de couverture médiatique, mais est-ce qu’Omnicane, à ce jour, a pu concrétiser un deal avec les planteurs pour fixer le prix de vente de la mélasse ? Je pense qu’ils mettent la charrue avant les boeufs. Étant donné que c’est la matière première, cela aurait dû être fait il y a longtemps. A moins qu’ils aient pensé pouvoir nous imposer leur volonté et leurs conditions. En plus, du côté de la législation, le gouvernement n’a encore rien fait…
? À quel prix proposez-vous de vendre la mélasse ?
Nous avons proposé Rs 3 500 la tonne. Ce sera de toute façon mieux que les Rs 2 800 ou Rs 3 000 que propose Mauritius Molasses.
? En attendant, y a-t-il des mesures sur lesquelles les planteurs peuvent compter ?
Oui, pour l’abandon des terres, avec le Planters Harvest Scheme, un fonds de l’Economic Restructuring Competitiveness Programme. FUEL, par exemple, a saisi cette chance. Mais, nous souhaitons aussi que les planteurs puissent, en aval, bénéficier du fait qu’en amont, les équipements peuvent être achetés à un taux d’intérêt de 5,5 % grâce à ce scheme. De grands contracteurs l’ont utilisé, FUEL a puisé dans ce fonds pour venir en aide aux planteurs. Étant donné que ce fonds est à un taux préférentiel, j’espère que les bénéfices iront aux planteurs. Et non que ces contracteurs utilisent ce fonds pour faire des affaires !
? Ce qui a été le cas jusqu’à présent ?
Disons que, valeur du jour, les bénéfices provenant de ce tarif préférentiel ne sont pas parvenus jusqu’aux planteurs. Parce que les tarifs proposés par les contracteurs, qui ont puisé de ce fonds pour les services de coupe, le chargement et le transport, sont toujours élevés. Il faudrait avoir un monitoring assez serré. Maintenant, c’est à nous de venir de l’avant et de dénoncer cette pratique.
? Pourquoi ne l’avez-vous pas encore fait ?
Nous allons étudier. Cela a été mis en pratique pour la dernière coupe, qui vient de se terminer. Nous allons comparer les tarifs du passé à ceux de la dernière coupe.
Propos recueillis par R. A.
 
 
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