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Sophie de Robillard : « Le regard de la société est souvent plus sévère que celui du juge »
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Sophie de Robillard : « Le regard de la société est souvent plus sévère que celui du juge »
En France, a été lancée une consultation publique sur le « droit à l’oubli numérique »…
Nous ne sommes encore qu’aux balbutiements du numérique. Le stockage d’informations et la protection de la vie privée est au coeur du débat. En l’absence de cadre légal, il n’y a plus de frontières entre le privé et le public. L’intrusion dans la vie privée peut donner lieu à des abus et à des excès et mettre en danger l’honneur, la stabilité, la dignité de la personne à son insu.
Ne peut-on pas étendre cette notion à la vie réelle ?
L’enjeu est un peu différent. Que doit-on oublier ? Une personne n’oublie jamais son passé. Les événements survenus, les actes, les rencontres font partie de son histoire et de sa vie.
C’est en fonction du passé que chacun de nous est ancré dans le présent. S’il y a « oubli », c’est que l’individu ou la famille a décidé de taire, d’enfouir, d’occulter ou de nier quelque chose de trop douloureux.
Ce non-dit fera alors partie du secret et reviendra sous une forme ou une autre « travailler » ces personnes afin d’être élaboré.
On peut donc difficilement parler d’oubli. Quand un événement difficile a été verbalisé et élaboré, je pense qu’il peut prendre sa juste place dans le vécu de cette personne. Je crois que tout individu est pris dans un processus de changement.
Il n’est plus aujourd’hui ce qu’il était hier, nous sommes inscrits dans une dynamique de l’évolution.
D’où le danger de fouiller dans le passé pour extraire certains faits isolés. Enfermer une personne dans son passé constitue un vrai danger.
Comment remettre les compteurs à zéro pour celles et ceux qui veulent commencer une nouvelle vie ?
Enfermer un criminel le plus longtemps possible en prison n’est pas la meilleure solution pour assurer la sécurité des citoyens. Cela ne gommera jamais son passé. Au contraire : aux ressentis de culpabilité et de honte vont s’ajouter la colère, la frustration. Le détenu doit avoir accès à un programme sérieux de réhabilitation.
Ce temps d’exclusion doit vraiment être le temps privilégié pour poser un regard sur le passé, le temps de la parole, de l’analyse. Sans travail thérapeutique, les risques de rechute sont énormes .
Une autre condition tout aussi capitale dans une petite société comme la nôtre, c’est de questionner le regard que nous posons sur un ex-détenu.
Le regard de la société est souvent plus sévère que celui du juge : il condamne à l’exclusion permanente. Il enferme la personne dans son passé, un enfermement souvent plus douloureux que la détention.
L’association Kinouété
Créée en 2001, Kinouété a pour objectif de soutenir les personnes emprisonnées afin de faciliter leur réinsertion. Parmi les services, figurent la thérapie individuelle, l’aide psychosociale, l’aide médicale, l’aide psychologique, la thérapie de famille, l’assistance judiciaire et des conseils à l’emploi, notamment. L’ONG intervient également dans les institutions pénitentiaires pour des thérapies, la formation professionnelle et les visites de famille.
Pour Kinouété, avant d’être libéré(e)s, les détenus(e)s doivent pouvoir compter sur le soutien familial, une stabilité financière, un emploi, un logement et un programme de désintoxication.
Dans les établissements pénitentiaires, le programme comprend des groupes de parole, basés sur la communication, les émotions et les sentiments de même que l’histoire individuelle (dont le délit), la famille, la toxicomanie et le VIH/SIDA, entre autres. Kinouété : route Nicolay, Port-Louis.
Tel. : 217 34 84
(Source: Lexpress Dimanche)
 
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