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Stuart Diamond : «10 % de diversité dans l’entreprise peut apporter 15 % de profit en plus»

18 août 2011, 08:28

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En analysant vos interventions, on pourrait penser que ce qui, pour certains, est l’art du consensus est, pour vous, celui d’obtenir ce qu’on veut. Qu’en pensez-vous ?

Je ne suis pas d’accord avec les deux définitions. Pour la plupart des gens, la négociation est l’art même du conflit. Que ce soit entre les nations, aux sports ou dans bien des domaines de l’activité humaine, tout gravite autour du modèle conflictuel. Ce que je propose est basé sur la collaboration, en s’assurant que l’autre partie obtient ce dont elle a besoin. Je m’applique à démontrer qu’on peut obtenir beaucoup plus en travaillant ensemble. Tout cela, en tenant compte de ce que l’autre ressent et sans faire usage ni de la force ni du pouvoir.

Vous mettez l’accent sur les sentiments des autres parties, mais cette voie ne s’approche-t-elle pas de la manipulation ?

La manipulation implique d’obtenir ce qu’on veut en blessant l’autre. Il y a nuance. Ce que je propose, dans mon livre ou dans mes interventions, c’est de savoir ce que ressent cette autre partie pour l’aider à atteindre ses buts, afin qu’elle m’aide à atteindre les miens. Les outils de négociation peuvent cependant être un couteau à double tranchant.

Avec les modèles de compétition et de persuasion largement diffusés, votre approche fait-elle des émules ?

Les quelque 30 000 employés de Google qui m’ont écouté, le fait que le Wall Street Journal la recommande, entre autres, me laissent penser que certaines personnes ont compris que le monde avait besoin de cette approche de la négociation.

Comment en êtes-vous arrivé à ce modèle justement ?

J’ai commencé à utiliser la négociation, sans m’en rendre compte, quand j’étais journaliste. Je devais gagner la confiance de mes interlocuteurs en cinq secondes. Ensuite, j’ai enseigné à la Harvard Law School, où j’ai étudié le sujet. Ce que j’ai alors observé, c’est que les approches existantes n’accordent pas suffisamment d’attention aux différences culturelles entre les parties négociatrices. J’ai cherché une meilleure formule.

Vous avez participé à des négociations dans plus de 40 pays pour des chefs d’entreprise ou d’Etat. Avez-vous pu dégager un «modus operandi» ?

Chaque négociation est différente. Toutefois, je suis arrivé à dégager une approche qui se décline en quatre quadrants, soit 20 questions que j’invite les négociateurs à se poser. C’est un procédé à étapes.

Qu’est-ce que la négociation interculturelle a de subtil ?

Le fait que les parties concernées ont différentes perceptions, différentes expériences. Le plus important est de comprendre ces différentes perceptions. La culture, c’est ce quivous confère votre identité. Mais il y a des micro-cultures, y compris au sein d’une même société. Il est donc essentiel d’avoir une idée claire de la personne. La psychologie aide ainsi à trouver les bons boutons pour toucher le coeur des gens.

Comme vous le savez, l’île Maurice est elle-même un pays multiculturel. On y prône la satisfaction des différentes franges de la population à divers niveaux. Cette logique de représentativité est-elle viable à long terme dans ce contexte ?

L’île Maurice peut tirer profit de cette diversité. Les études ont montré que 10 % de diversité au sein d’une entreprise peut apporter 15 % de profit en plus. La Silicon Valley a crû en suivant ce principe. Le désaccord, les débats d’idées ne sont malheureusement pas utilisés pour créer de nouveaux procédés dans bien des cas. De plus, la représentativité des groupes ethniques ne garantit pas l’homogénéité au sein de ceux-ci. Même dans les transactions, il est important de ne pas ignorer la relation qui se crée entre les partenaires. J’entends souvent, malheureusement, parler de relations à court terme.

A ce jour, quelle est la négociation la plus ardue que vous ayez connue et comment vous en êtes-vous sorti ?

La plus dure, c’est celle que j’ai avec mon fils de neuf ans. Les adultes ont tendance à oublier les outils de la négociation. Ils devraient prendre exemple sur les enfants ! De mon côté, j’essaie de découvrir ce qu’il recherche, je fais preuve de respect, j’écoute et nous faisons des transactions. Par exemple, une heure de télévision contre une heure de piano. (rires.)

Entretien realisé par Ludovic AGATHE
(Source : l’express iD)

Ludovic AGATHE