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Tassarajen Pillay Chedumbrum : «Mauritius Telecom ne pourra plus imposer ses conditions»

1 septembre 2011, 07:42

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Troisième contributeur, soit 6,4 % en termes de recettes au Produit intérieur brut (PIB) en 2010. A quoi doit-on cette performance du secteur des Technologies de l’information et de la communication (TIC) ?

Une vision. Celle de faire de ces TIC le cinquième pilier de notre économie, alors que celles-ci n’étaient qu’une industrie. De là, plusieurs initiatives ont été prises, comme la création du ministère l’année dernière, et le dévouement des acteurs de ce domaine. Mon objectif est de terminer mon mandat en faisant des TIC le principal pilier de l’économie, avec une contribution à deux chiffres au PIB.

Vous avez voulu vous démarquer en revoyant les objectifs proposés dans le «National Information and Communication Technologies Strategic Plan» (NICTSP) 2007-2011. Pourquoi cette révision ?

Ce plan stratégique contenait de nombreux projets. Cependant, certains d’entre eux comprenaient des faiblesses qui faisaient qu’ils n’étaient pas réalistes ou réalisables. On n’avait probablement pas les outils pour les mettre en application. Le NICTSP 2011-2014 a donc été pensé pour donner plus de place à des projets invitant davantage la participation des secteurs public et privé. L’Open Access Policy, le Wifi dans les bureaux de poste, Internet dans les écoles sont autant de mesures dans ce sens.

Un tel discours alors que les tarifs Internet sont jugés trop élevés, le monopole de «Mauritius Telecom» (MT) étant pointé du doigt. La dernière panne majeure a ravivé ce sentiment…

MT ne pourra plus imposer ses conditions. Ce, à travers l’Open Access Policy et le principe de l’Indefeasible Rights of Use. Celui-ci met MT dans l’obligation de donner aux autres fournisseurs l’accès à la bande passante qu’il n’utilise pas sur les câbles sous-marins. De plus, nous retravaillons la législation, afin de donner plus de pouvoir à l’Information and Communication Technologies Authority, cela en vue de protéger les consommateurs, sociétés comme particuliers.

Il n’est pas logique que cette instance ne puisse pas demander une baisse des tarifs sans passer par les opérateurs. Nous faisons tout pour qu’Internet devienne un droit fondamental du citoyen. Pour ce faire, nous avons mis en place plusieurs petites mesures et nous insisterons encore pour que les opérateurs baissent leurs prix.

D’accord. Mais qu’est-ce qui vous fait penser que le secteur se portera toujours aussi bien et que les investisseurs continueront à se tourner vers Maurice ?

Une des choses qui a longtemps joué contre les TIC à Maurice, c’est son image de destination touristique. Cela n’a pas attiré les investisseurs de ce domaine. Nous voulons maintenant rectifier le tir, en assurant à ces derniers que nous sommes une destination politiquement stable, où les profits suivent une certaine constance, avec un droit fiscal léger. Sans compter les mesures incitatives pour lui donner cette image d’ICT Destination. Pour atteindre ce but, nous n’avons d’autre choix que de faire une campagne agressive. D’ailleurs, nous commençons à obtenir une reconnaissance internationale. Nous sommes cités par les sommités du domaine, dont A.T. Kearney Global Services, qui positionne Maurice à la 36e place comme destination offrant des services offshore au monde. Ou encore Everest Research Institute, pour qui en fait Maurice est le pays le plus compétitif sur le marché francophone en matière de BPO []NdlR : Business Process Outsourcing].


Pour combien de temps encore? Ce même marché francophone attire déjà de nombreux concurrents dans la région, en Afrique du Nord par exemple…

Alors, pourquoi les Français viennent nous voir, nous ? Le bilinguisme de Maurice et sa stabilité politique nous donnent un avantage.

Mais jusqu’ici le BPO s’est cantonné à un BPO «bas de gamme» pour arriver à ces résultats. Qu’arrivera-t-il quand cette offre ne séduira plus ?

Je prendrai l’analogie du secteur touristique. Au départ, on invitait tout le monde. Ensuite, nous sommes passés au haut de gamme. Pour soutenir cette offre, l’Ecole hôtelière a vu le jour. Suivant cette logique, nous proposons l’idée d’une ICT Academy. Cela visera à donner une formation pratique à la main-d’oeuvre et à la professionnaliser.

N’est-ce pas reconnaître qu’on a mis la charrue avant les boeufs ?

Le monde est un village global. On a la compétence, il nous faut encore de la formation. Le secteur des TIC est vaste. De surcroît, il est régi par les besoins de l’industrie.

Auparavant, les sociétés formaient leurs employés à leur façon, sans garantie de pouvoir les retenir. L’ICT Academy veut standardiser cette formation. Mais même sans l’Académie, nous nous démarquons parmi les pays africains.

Et pourquoi ne pas se comparer aux géants, la Corée du Sud par exemple ?

Malgré toutes ces bonnes intentions, nous avons quand même une industrie assez jeune, âgée d’une quinzaine d’années seulement. La Corée s’est lancée dans les TIC depuis beaucoup plus longtemps et possède une autre culture par rapport à celles-ci. Dans cette optique, le temps joue contre nous.

Nous avons surtout du retard. On le voit dans la faible gamme de services basés sur les TIC et une certaine «technophobie» de la fonction publique, notamment…

Il est vrai qu’il y a des fonctionnaires qui font preuve d’une certaine réticence à mettre en pratique les e-services. Mais, pour bousculer cette culture et ces réticences, nous établissons une liste plus étoffée des services en question et celle-ci devrait voir le jour avant la fi n de l’année.

Propos recueillis par Ludovic AGATHE
(Source : l’express iD) 

Ludovic AGATHE