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Taux de criminalité en baisse : un écran de fumée
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Taux de criminalité en baisse : un écran de fumée
Le PM affirme que la criminalité est en baisse. Toutefois, les cas tels que les cybercrimes et les personnes manquantes ne sont pas répertoriés par «Statistics Mauritius».
DES délits mineurs, des vols n’aboutissant pas à des arrestations, des personnes portées manquantes, voire des contraventions… Autant de «crimes» qui ne sont pas répertoriés en tant que tel par Statistics Mauritius (SM). Pas étonnant donc que, sur la base des données de cet organisme, le taux de criminalité est en baisse, comme l’a affirmé le Premier ministre, Navin Ramgoolam samedi. Mais sur le terrain, la réalité est autre.
«Le taux de criminalité a augmenté à Maurice. Mais les statistiques le démontrent autrement, parce qu’on a changé la définition des crimes et délits», fait ressortir Veda Baloomoody,avocat et membre du partide l’opposition, le Mouvementmilitant mauricien. Il estime, àcet effet, que seulement les casde crimes avec violence sontpris en compte.
Même son de cloche du côté de Rama Valayden, avocat et ancien Attorney General. «Je ne suis pas d’accord qu’on nous dise que le taux de criminalité est en baisse.» Selon lui, le problème vient du fait que «nos chiffres sont mal compilés en termes de crimes». D’expliquer que «lorsque nous parlons de crime, nous avons tendance à ne penser qu’aux crimes qui vont jusqu’aux Assises».
Or, fait-il valoir, tous les cas qui sont rapportés à la police ne vont pas systématiquement jusqu’à une cour de justice à des fins de poursuite. Parmi ces affaires qui ne sont pas référées au tribunal dans une majorité de cas, Rama Valayden cite les crimes en col blanc, les délits de blanchiment d’argent, les cybercrimes, les délits dans le secteur offshore…
Absence de preuves
Au bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP), on fait remarquer que là où il n’y a pas de preuve, il ne peut y avoir matière à poursuite. Généralement, le DPP donne son avis sur les points de droit à la police pour que celle-ci puisse mener son enquête. C’est au DPP qu’il incombe finalement d’instruire une affaire ou non. Pour cela, le cas est soumis à deux tests : «l’evidential test et le public interest test». Hormis les cas au civil, le DPP traite de tous les cas au pénal.
Le fait est que dans nombre de cas, les contrevenants n’ont pas été identifiés. Il y a aussi ces infractions qui sont rapportées à la police, mais dont les coupables n’ont pas été arrêtés. «Ce sont tous ces cas où les coupables n’ont pas été rapportés et qui ne figurent pas parmi les chiffres officiels», insiste RamaValayden.
Il est, cependant, d’autres cas de figure qui ne sont pas pris en compte dans les chiffres de SM. Notamment, ces corps brûlés qui finissent par être assimilés aux cas de personnes portées manquantes. «Or, aujourd’hui, il y a 55 personnes portées manquantes par an à Maurice», assure l’avocat.
Qu’en est-il des contraventions qui ne sont plus considérées comme des crimes ? «Les contraventions sont tellement en hausse qu’on a dit qu’il ne fallait pas les inclure pour ne pas apporter de l’eau au moulin de ceux qui avancent que les chiffres sont artificiellement gonflés. Aussi, il ne fallait pas démonter la manne que représente ce délit pour l’État aujourd’hui», s’insurge RamaValayden. «Si l’État avait enregistré une baisse du taux de criminalité, il n’aurait pas entamé la construction d’une prison de Rs 1,4 milliard. Toutes nos prisons ne seraient pas non plus remplies », ajoute-t-il.
Si les titres des journaux ne constituent pas un répertoire des faits, ils ne sont pas «médiocres» au point de déformer la réalité. Se basant uniquement sur les données de SM, on peut effectivement avancer que le taux de criminalité, en comparant les années 2010 et 2011, est en baisse. Excluant les contraventions, il passe de 36,5 à 34,8 pour 1 000 habitants. Les chiffres pour l’année 2012 seront rendus publics le12 août.
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