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Tunisie : L''agitation sociale se poursuit
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Tunisie : L''agitation sociale se poursuit
Plusieurs milliers d''''avocats tunisiens se sont mis en grève le jeudi 6 janvier, pour protester contre des agressions de la police, tandis que les manifestations se poursuivent dans le pays.
De violentes manifestations de rue ont repris tard le soir du mercredi 5 janvier, dans la ville de Thala, au sud-ouest de Tunis, à l''occasion de l''inhumation d''un jeune diplômé réduit à vendre des légumes. Il  avait succombé la veille à sa tentative d''immolation par le feu à la mi-décembre devant la préfecture de Sidi Bouzid, dans le centre du pays.
Son geste de désespoir, à la suite de la confiscation par la police de son chariot de primeurs, a déclenché dans le centre et le nord du pays une vague de manifestations de rue violentes, sans précédent depuis que le président Zine el Abidine ben Ali a déposé il y a 23 ans Habib Bourguiba, le père de l''indépendance.
La tentative de suicide du défunt, Mohamed Bouazizi, 26 ans, est aussitôt devenue emblématique de la révolte de jeunes chômeurs diplômés, de militants syndicalistes et d''activistes des droits de l''homme à travers le pays, où l''agitation s''est propagée jusqu''à Tunis.
A la suite de ses obsèques, une femme et ses trois enfants ont escaladé un pylône électrique mercredi à Sidi Bouzid pour tenter de se suicider en signe de protestation contre leurs conditions de vie, avant d''en être dissuadés par des officiels, rapportent trois différents témoins.
Le même jour, à Thala, les policiers ont fait usage de canons à eau pour disperser une foule de protestataires, dont de nombreux étudiants, qui leur jetaient des engins incendiaires, rapportent des habitants de la ville.
Un représentant local du syndicat des enseignants a précisé que les autorités ont, par la suite, fermé les écoles et les collèges de Thala jusqu''à nouvel ordre. Aucun responsable du gouvernement n''était immédiatement contactable pour confirmer ces informations.
Quatre victimes
Ce type d''agitation sociale était, jusqu''à présent, plutôt rare en Tunisie, le plus petit pays du Maghreb, que l''Occident présente comme un modèle régional de stabilité et de prospérité mais où, selon les organisations des droits de l''homme, les libertés publiques sont sévèrement restreintes.
Me Abderrazek Kilani, le bâtonnier de l''ordre des avocats tunisiens, a déclaré à Reuters que 95% de ses 8 000 confrères avaient pris part, le jeudi janvier, au mouvement de grève, chiffre que les responsables gouvernementaux n''ont pas commenté dans l''immédiat.
"La grève porte le message clair que nous n''acceptons pas les attaques injustifiées contre les avocats. Nous voulons protester fermement contre le passage à tabac d''avocats au cours des derniers jours", a-t-il martelé.
Selon Kilani, ces avocats ont été battus par des policiers lors de sit-in organisés la semaine dernière à Tunis et dans les villes de Monastir et Grombalia en signe de solidarité avec les manifestants de Sidi Bouzid.
La mort de Mohamed Bouazizi porte à quatre le nombre de victimes de la vague de manifestations qui secoue le pays, après celles de deux civils tués par des policiers qui ont tiré à balles réelles "en état de légitime défense" pour écraser une émeute à Bouziane, dans le centre-sud du pays.
Selon des informations d''origine française, la dernière victime, un diplômé sans emploi, s''est suicidée en s''accrochant à une ligne électrique à haute tension pour protester contre "la misère et le chômage".
La Tunisie a joué un rôle de précurseur dans le monde arabe en matière d''émancipation de la femme et de généralisation de l''éducation, mais ses détracteurs notent que ses réalisations économiques ont essentiellement bénéficié les régions côtières, où se concentre le tourisme, au détriment de l''arrière-pays.
Les autorités ont accusé l''opposition d''avoir manipulé la révolte de Sidi Bouzid pour discréditer le régime actuel et le président Ben Ali a jugé inacceptable ces violences, nuisibles, selon lui, aux intérêts nationaux.
L''agitation sociale s''est un peu calmée la semaine dernière à la suite d''un léger remaniement gouvernemental touchant notamment le ministère de la Jeunesse, du remplacement du gouverneur de Sidi Bouzid et de l''annonce par Ben Ali du déblocage d''une enveloppe de 4,5 milliards de dollars pour réduire le chômage qui touche actuellement 25% des jeunes diplômés.
Reuters
 
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