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Yousouf Dauhoo: “Pour faire face à la pauvreté, il faut une nation unie»

14 octobre 2009, 19:13

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Le président de SOS Pauvreté évoque le problème de la pauvreté alors que nous allons célébrer la Journée internationale contre la pauvreté le 17 octobre.

De quoi avons-nous besoin pour faire face à la pauvreté?

Pour faire face à la pauvreté, il faut une nation unie. Une nation qui ne soit pas habitée par des préjugés et des idées reçues sur les gens qui ne seraient pauvres que parce qu’ils ne font pas l’effort nécessaire et parce qu’ils se seraient habitués à l’assistanat. Or, à

Maurice, nous avons une nation divisée. La société mauricienne a plusieurs cancers. Et l’un de ses cancers le plus dangereux, c’est l’ethnicité à laquelle il faut rattacher le favoritisme, la corruption et la division. Tout cela a des effets néfastes sur les pauvres.

Qu’entendez-vous par une nation unie pour combattre la pauvreté?

Lorsqu’on a des groupes plus favorisés que d’autres, cela implique qu’on tue tout sens de solidarité. C’est le handicap premier et aussi l’expression flagrante d’une société qui ne pratique pas l’égalité des chances.

Que peut-on faire dans un tel contexte?

Je pense qu’il faut de la discrimination positive. Il y a des régions, des groupes et des sous-groupes qui nécessitent une attention particulière.

Un pays comme Maurice devrait avoir suffisamment de ressources pour nourrir toute sa population…

C’est la question que je me pose aussi. Malheureusement, nous constatons qu’il y a toujours une poignée de gens qui domine la majorité de gens, en termes de possession de biens. Le système de partage des richesses ne fonctionne pas au profit des plus pauvres. Ceux qui sont riches s’enrichissent. Inversement, ceux qui sont pauvres s’appauvrissent.

L’éducation est à la base de toute civilisation et du développement. Or, à Maurice, notre système éducatif est dépassé. Et cela depuis très longtemps.

J’ai toujours dénoncé les leçons particulières qui excluent les pauvres du circuit de l’acquisition du savoir. Même les plus riches sont écrasés par ce système déshumanisant. A l’université aussi, je constate qu’il y a de l’injustice. Par exemple, pour les cours à temps partiels qui se terminent tard, je me demande comment font ceux qui habitent dans des régions rurales éloignées pour rentrer chez eux?

Le gouvernement avait annoncé, depuis son installation, que la lutte contre la pauvreté est l’une de ses priorités. Comment s’en sort-il?

Il y a eu de beaux discours. Mais le combat a été faussé car beaucoup de décisions ont des connotations partisanes. Je dois aussi faire ressortir que le système de la fonction publique ne permet pas une lutte efficace contre la pauvreté. C’est la raison pour laquelle, je ne cesse de militer pour un ministère de la Pauvreté. Un tel ministère sera au-delà des changements de gouvernement. Il ne tiendrait en compte que les intérêts nationaux et non les intérêts partisans et particuliers des gens au pouvoir et de leurs proches.

Nous n’arrêtons pas, à Maurice, de voter des budgets faramineux pour cette lutte contre la pauvreté. Ces budgets sont canalisés vers différents ministères, vers différents services publics, et on finit par perdre leur trace dans les méandres de la bureaucratie.

Quelle est votre appréciation des programmes de Corporate Social Responsibility des entreprises privées?

Je pense d’abord que les entreprises doivent avoir une culture volontaire et citoyenne de partage. Il faut aussi plus d’équité et de transparence dans l’action sociale des entreprises.

Quelle devrait être la priorité dans cette lutte contre la pauvreté?

L’éducation. Car, l’éducation émancipe les gens. Il faut aussi continuer à réaliser l’empowerment des femmes. Mais, en même temps, il faut savoir que les pauvres ont besoin d’un minimum de moyens, ne serait-ce que pour se nourrir et se déplacer, afin qu’ils puissent venir jusqu’à l’éducation et la formation…