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Questions à…

Ashok Subron: «Il faut apporter des changements avec le monde qui évolue»

1 mai 2024, 11:07

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Ashok Subron: «Il faut apporter des changements avec le monde qui évolue»

Le 1er-Mai incarne bien plus qu'une simple journée de congé, c'est un moment où la voix des travailleurs résonne, où leurs luttes et leurs aspirations prennent le devant de la scène, fait ressortir Ashok Subron, syndicaliste et porte-parole de Rezistans ek Alternativ. Cette année, les défis majeurs incluent le changement climatique, la discrimination salariale envers les travailleurs étrangers ou encore le coût de la vie. Les demandes comprennent des congés pour catastrophe, des congés parentaux et menstruels, ainsi que la réintroduction d'une allocation de coût de la vie et du National Pension Scheme. Quelle signification revêt le 1er-Mai à vos yeux ?

Le 1er-Mai est une journée où les travailleurs mettent en avant leurs revendications, qu’ils évoluent dans le domaine intellectuel ou manuel, d’autant plus que la frontière entre ces deux mondes s’estompe progressivement. Bien que le mouvement du 1er-Mai ait débuté aux États-Unis, à Maurice, ce sont les travailleurs eux-mêmes, en particulier les ouvriers de l’industrie sucrière, qui ont insisté pour célébrer cette journée. Le grand rassemblement syndical a réellement pris son essor en 1938, avec des figures telles que Dr Maurice Curé, Emmanuel Anquetil et Pandit Sahadeo, dans le kiosque du Champ-de-Mars, où ils ont réclamé les droits des travailleurs, notamment le salaire minimum et le droit syndical. Dans les années 70, la General Workers’ Federation à laquelle j’appartiens célébrait le 1er-Mai aux côtés du MMM. Cette tradition perdure, car elle permet de mettre en lumière les revendications de la classe ouvrière en ce jour symbolique.

Quels défis majeurs considérez-vous comme prioritaires dans le domaine professionnel aujourd’hui ?

Il y a plusieurs points à aborder, notamment en cette fin de cycle. Tout d’abord, parlons du changement climatique. Il est essentiel d’éliminer la discrimination instaurée depuis 2016. En période de fortes pluies, le secteur public cesse souvent ses activités, contrairement au secteur privé. Cela expose la vie des travailleurs à la merci des employeurs. Nous demandons l’abolition de cette règle en cas de désastre, car chaque vie compte. Nous plaidons également en faveur du congé pour catastrophe. Le travailleur est le mieux placé pour juger si sa vie est en danger ou non. Nous ne voulons pas voir d’autres vies perdues, comme lors du passage des cyclones Batsirai ou Belal. Il est crucial que chaque travailleur puisse décider s’il peut emprunter un chemin accessible dans ces situations. De même, nous devons tenir compte des épisodes de chaleur et d’humidité élevées qui touchent l’île. Certains travailleurs, notamment ceux dans le freeport, peuvent avoir du mal à faire face à des conditions météorologiques extrêmes.

En cas de fortes pluies ou d’alerte cyclonique de niveau trois ou quatre, il est impératif que les employés puissent bénéficier d’une assurance force majeure. Le gouvernement doit renforcer la législation pour garantir qu’une personne se rendant au travail dans de telles circonstances soit assurée contre tout incident éventuel. Un autre aspect à considérer est celui de la reproduction sociale. Les parents se retrouvent souvent contraints de travailler davantage, ce qui limite le temps qu’ils peuvent accorder à leurs enfants. Nous proposons d’introduire cinq jours de congé parental par an, jusqu’à ce que l’enfant atteigne l’âge de 14 ans. De plus, nous demandons l’instauration d’un jour de congé menstruel par mois pour les femmes. Nous constatons que les femmes rencontrent de nombreux problèmes liés à cela ces derniers temps. Il est également suggéré que les femmes enceintes de trois mois puissent bénéficier d’un aménagement de leur travail, surtout si elles peuvent le justifier par un certificat médical.

Un autre défi majeur est le coût de la vie, qui est devenu un problème chronique. Nous proposons la mise en place d’un COLA 2.0, c’est-à-dire une allocation de coût de la vie. Dans les années 70, lors des hausses de prix, une allocation était ajoutée aux salaires à la fin du mois. Dans les années 80, cela est devenu la compensation salariale. Nous demandons la réintroduction de ce système. Une autre bataille importante concerne les pensions. En abolissant le National Pension Scheme, le MSM a commis une injustice envers la classe ouvrière. Ce sujet n’a pas été abordé en 2019, mais nous demandons son rétablissement pour les générations futures.

Le réajustement des salaires n’a pas encore été officialisé. Le rapport du National Wages Council aurait dû être rendu avant mars, mais à ce jour, rien n’a été fait. Nous constatons que la situation est encore plus préoccupante car il y a eu des mensonges. Tout d’abord, le National Wages Council n’a jamais discuté de cette question. Ce sujet a été traité par une tierce partie et il reste entouré de secret. De plus, la date limite n’a pas été respectée, ce qui constitue un deuxième mensonge.

Il est également essentiel de ne pas violer les droits des travailleurs. Il manque des mécanismes pour garantir le respect des changements apportés à la législation du travail. Actuellement, les employeurs peuvent contester ces lois, ce qui prolonge les délais avant qu’une décision ne soit rendue par le tribunal du travail. Nous assistons à un exode massif de travailleurs mauriciens, comme cela s’est produit lors de l’Indépendance. Des familles entières quittent le pays, ce qui entraîne un dépeuplement de l’île au profit de riches étrangers et de l’arrivée de travailleurs étrangers.

Le concept de travail décent est souvent évoqué, pourtant, de nombreux travailleurs étrangers à Maurice semblent être exclus de ce droit, comme en témoignent les cas souvent rapportés dans la presse. Quelles mesures pensez-vous qu’il faudrait prendre pour éliminer cette forme de discrimination ?

Il existe une discrimination structurelle à l’égard des travailleurs étrangers, notamment en ce qui concerne le salaire minimum. Les employeurs sont autorisés à déduire jusqu’à Rs 3 000 pour le logement et la nourriture, ce qui signifie que ces travailleurs ne touchent pas le salaire minimum de Rs 16 500. Il est nécessaire de légiférer pour que les mêmes lois s’appliquent aux travailleurs mauriciens et étrangers. Sinon, cela crée une incitation à exploiter davantage les travailleurs étrangers et à en attirer davantage.