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Réforme électorale : entre hypocrisie et «vested interests»
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Réforme électorale : entre hypocrisie et «vested interests»
La réforme électorale est bel et bien morte. Avec le système actuel, il y va des «vested interests» des partis politiques, le PMSD excepté. Pour les besoins de la rhétorique toutefois, l’enterrement n’est pas prévu de sitôt. Une fois l’échéance des obligations envers les Nations unies et les autres tribunaux passée, ce serait business as usual avec en perspective les futures élections générales.
Les trois principaux partis politiques ont toujours profité du système électoral actuel, avec le First Past The Post (FPTP), le découpage des circonscriptions et le Best Loser System (BLS). Le seul parti qui n’y trouve pas son compte, c’est le PMSD. Faute d’un système de représentation proportionnelle (PR) que l’ancien Parti mauricien avait réclamé et que Seewoosagur Ramgoolam et son équipe avaient réussi à repousser, le PMSD croit pouvoir gagner des sièges si on réduit la disparité numérique entre les circonscriptions et on leur donne un nombre d’électeurs plus ou moins égal.
Ainsi, si on procède à un tel exercice et on combine les électeurs des cinq premières circonscriptions du pays pour les diviser par la suite en nombre plus ou moins égal de votants, tout changerait. Les circonscriptions nos 2 et 3 perdraient leur physionomie sociologique de même que Pamplemousses–Triolet qui, depuis les années 80, regroupe déjà une forte composante non hindoue.
De même, si certaines agglomérations limitrophes de Quatre-Bornes sont détachées du no 14 et annexées au no 18 ou même au no 15, voilà un autre bouleversement qui viendra changer la donne. Le PMSD introduit ainsi un élément fort intéressant dans le débat politique. Si le BLS est sous pression compte tenu de la décision de la commission des Nations unies, il serait fort intéressant de suivre le cheminement de la contestation menée par les Bleus autour du découpage des circonscriptions.
Y a-t-il matière à porter l’affaire devant la Cour suprême ? Finira-t-on par inviter le Conseil privé de la Reine à statuer ? Scénario du pire : l’Electoral Boundaries Commission fait fi de la Cuisine et décide de construire de nouvelles circonscriptions, avec chacune une population d’électeurs plus ou moins égale ?
Le PMSD ne perd rien en tentant de brouiller les cartes. Par contre, le MMM, le Parti travailliste et le MSM, ayant chacun exploité à son avantage le système actuel à un moment ou un autre, pourraient bien donner l’impression d’être proactifs au niveau d’une future réforme. Dans la réalité, ces trois partis éviteront de bousculer radicalement le système, se contentant de quelques retouches symboliques. Un immense écran d’hypocrisie politique cache les vrais objectifs de ces partis.
D’ailleurs, quand Paul Bérenger dit souhaiter une prestation en solo de chaque parti aux élections, le MMM entend faire jouer le FPTP en sa faveur. En tablant sur les animosités existant entre le Parti travailliste et le MSM, le MMM aurait des raisons de croire que ses candidats pourraient devancer ceux de ces deux partis dans plusieurs circonscriptions.
Un tel scénario de lutte entre Parti travailliste, MMM, PMSD et Independent Forward Bloc (IFB) de Sookdeo Bissoondoyal, en 1976, avait permis au MMM d’enlever 30 sièges contre seulement 25 aux Rouges. Fait remarquable, pas moins de 13 de ces élus du MMM venaient des circonscriptions rurales.
Le PMSD enleva sept sièges en 1976, ce qui permit à Ramgoolam et Duval de conclure une coalition en catastrophe, ne disposant que d’une majorité de deux voix. Le FPTP a aussi permis au MMM d’être l’architecte du 60-0 de 1982, du 57-3 de 1991, du 60-0 de 1995 et du 54-6 de 2000.
Le système actuel a évidemment servi la cause du Parti travailliste depuis 1967. Le MSM, malgré sa faiblesse numérique, a toujours manœuvré pour profiter du système électoral et de son positionnement d’alliance avec d’autres partis. Ce parti s’est ainsi retrouvé à l’Hôtel du gouvernement pendant plusieurs années sinon à partager le pouvoir avec un allié plus fort. À moins de vouloir commettre un suicide politique, les trois principaux partis vont tout mettre en œuvre pour préserver le système.
Le présent gouvernement pourrait toujours plaider sa bonne foi en affirmant que son projet de réforme n’a pas été soutenu par la majorité législative nécessaire. Logiquement, on ne voit pas les Nations unies renverser un gouvernement parce que le recensement n’a pas été tenu d’après des critères ethniques. Ou que les prisonniers ne sont pas classés en termes de l’origine de leurs ancêtres.
Les Nations unies pourraient alors consacrer tous leurs efforts à introduire la démocratie et la bonne gouvernance dans les pays où les adversaires du régime finissent par se retrouver dans le ventre des crocodiles. Et où des citoyens sont bastonnés sur la place publique pour avoir commis de simples délits.
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