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«Épars pillés»

16 janvier 2022, 08:53

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«Épars pillés»

Oui, nous ne rêvions pas en début de semaine quand le ministre du Travail, M. Soodesh Callichurn, recevait une dizaine de représentants syndicaux dont la demande principale était apparemment d’ajouter du Covid leave au sick leave qui existe déjà ! 

Cette demande ne couvrirait pas ceux, symptomatiques, qui sont admis à l’hôpital ou qui finissent à l’ICU, mais aussi et surtout ceux qui sont placés en quarantaine ou qui se mettent en auto-isolement. 

Raisonnons : pourquoi est-ce qu’un employé, au motif d’être seulement infecté par le Covid, aurait droit à des congés additionnels ? Quelle raison valable permettrait de valider ce Covid leave là qui ne serait pas d’ailleurs autre chose qu’un précédent douloureux à toutes les autres maladies infectieuses, à commencer par la grippe ! On peut d’ailleurs même s’auto-isoler (ne pas aller au travail) parce que l’on a été en contact avec quelqu’un dont la maman est testée positive, n’est-ce pas ? Vous imaginez les dégâts possibles ? 

D’autant qu’un employé qui a actuellement épuisé son quota de sick leave, mais qui est encore à l’hôpital ou à la clinique (y compris parce que sévèrement secoué par le Covid) est déjà bénéficiaire de l’extended leave qui est prescrit par la loi ! 

Pour faire bonne mesure, ces syndicalistes auraient aussi réclamé un jour de congé pour faire la booster dose – ce qui paraît nettement plus raisonnable, si ces vaccins demandent un déplacement –mais aussi que les fonds de la Mauritius Investment Corporation Ltd. (MIC) soient «mis à la disposition des entreprises par le gouvernement pour protéger les travailleurs», ce qui serait en clair une invitation à confirmer la non indépendance de la MIC et à interdire, désormais, la fermeture d’entreprises moribondes, qui seraient dès lors alimentées par la tétine de l’État «pour protéger les travailleurs» ? 

Oulala… 

***** 

Dans une section à peine commentée du rapport annuel de la Banque centrale intitulée, comme il se doit : External Vulnerabilities Indicators, et après avoir bien pris soin de montrer d’abord le nombre de mois d’importations couvertes par les réserves de devises du pays, soit 18, un chiffre en constante amélioration est-il indiqué ; il est, heureusement, aussi rappelé pourquoi il en est ainsi !

C’est parce que nous empruntons à nouveau, fortement, en devises depuis juin 2020, évidemment ! 

Ainsi, les emprunts en devises, maintenus à 15 % du PIB jusqu’à la pandémie, représentaient 33 % du PIB en juin 2021. De plus, alors qu’ils émargeaient pour 40 % de nos recettes annuelles d’exportations en biens et services jusqu’à mars 2020, ils explosaient, à juin 2021, à environ 130 % démontrant la fragilisation sévère de notre situation financière, d’autant que ces dettes coûtent, bien sûr, plus cher à rembourser au fur et à mesure que la roupie s’affaiblit… 

Les emprunts en devises aident, certes, à augmenter les réserves de celles-ci, mais si leur remboursement coûtera plus cher avec la dépréciation de la roupie, cette dépréciation, aide, en passant, à cristalliser des «profits papier» sur le bilan de la Banque centrale. La logique de cette approche ? Le «profit papier», c’est pour tout de suite et permet ainsi d’aider le Budget du gouvernement (Rs 103 milliards jusqu’ici, soit 18 + 60 + 25), alors que le remboursement des emprunts étrangers, c’est pour… plus tard et un souci pour… les autres. 

L’Anglais, dans une belle image dont il a le secret, parlerait de kicking the can down the road… 

Malgré la mobilisation de plus de Rs 23 milliards par la MIC pour soutenir les compagnies sévèrement secouées par la fermeture de l’aéroport pendant 18 mois, il est aussi intéressant de noter, au tableau 3.4, que les banques du pays plus que doublaient, néanmoins, leurs provisions pour mauvaises créances à Rs 14.7 milliards, dans leur bilan consolidé pour l’année financière 2020-21. 

L’objectif souhaité pour le pays est évidemment que l’activité économique reprenne ‘comme il faut’, avec des entrées de devises améliorées qui soutiennent la roupie et freinent l’inflation, que ces provisions bancaires puissent donc être renversées, ce qui impliquerait un bilan MIC plus solide, un bilan BoM donc raffermi et une dette nationale qui baisse solidement sous la poussée d’un budget bien mieux maîtrisé parce que plus efficace. 

Pour cela il faut d’abord produire, vendre et être productif bien sûr ! 

Éviter pour cela les congés publics inopinés, les Covid leaves, les fermetures intempestives de classe III ou de fortes pluies fizet, les écoles fermées qui bloquent la maind’oeuvre féminine, les gaspillages qui se tolèrent même quand dénoncés, l’opacité, l’affairisme aux dépens de l’État qui plombe la productivité nationale et décourage un entrepreneuriat plus vigoureux… 

Pour commencer ! 

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Si l’on se réfère aux communiqués publiés par Be Safe Moris, il y a eu 24 425 cas identifiés de Covid admis dans une facilité médicale locale entre mars 2021 et le 12 janvier 2022. De ce nombre, 22 488 patients seraient rentrés chez eux, soit 92 %. La différence (1 937) représente donc soit les patients encore à l’hôpital soit ceux qui sont morts. 

Le communiqué quotidien de Be Safe Moris serait assurément plus transparent s’il voulait bien nous indiquer le nombre de patients encore à l’hôpital… 

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Dans le sillage du débat houleux qui concerne la réouverture des écoles au plus vite, l’argument souvent martelé est qu’il y va de la santé mentale des enfants en manque de socialisation et qu’il est impossible de remplacer les bienfaits de l’interaction physique à l’école par des heures de cours en distanciation physique. D’autant que les cours ‘interactifs’ ne sont souvent pas des modèles de réussite; que les cours unidirectionnels faits à la télévision sont évidemment pire et que c’est encore bien pire pour le pourcentage d’élèves plus pauvres qui ne peuvent accéder ni à l’Internet ni à un laptop ou à une 2e télé quand il y a plus d’un gosse à la maison… 

Le psychologue David White y ajoute une autre perspective vitale cette semaine (l’express, lundi 10 janvier) en refusant de se focaliser seulement sur l’enfant, mais en élargissant la perspective à la famille dans laquelle cet enfant est supposé grandir. Harmonieusement s’entend. En effet, David White souligne combien le télétravail doublé d’écoles fermées ajoutent une terrible surcharge sur la structure familiale, qui déborde inévitablement en stress, en dysfonctionnements et en violences divers. En temps normaux, explique-t-il, le travail et l’école remplissent le rôle de disjoncteurs pour le bouillonnement de relations qui caractérisent les familles. En situation de pandémie, quand on ne va plus ni au travail, ni à l’école, tout reste dans la marmite à pression que peut être une famille et il est, en plus, alors évident que plus le foyer est modeste, sans les chambres individualisées des enfants, un jardin pour respirer et des lieux de repli reconnus pour retrouver sa paix intérieure ; plus les risques de dysfonctionnements majeurs augmentent ! 

Madame la ministre est-elle consciente qu’elle rajoute aux difficultés des familles en gardant l’école fermée ou est-ce que cela fait trop longtemps depuis qu’elle a gardé des enfants, confinés entre quatre murs, à la maison ? Avec ou sans laptop…