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Confiance !
Dans la tourmente qui occupe Boris Johnson aux îles britanniques, la vraie question en jeu est la question de confiance.
Voilà un homme qui au début, l’an dernier, disait qu’il n’y avait jamais eu de fêtes arrosées à Downing Street alors qu’il y avait de sévères restrictions pour le reste du pays. Puis, il fut tardivement admis que ces réunions festives avaient bien eu lieu mais qu’aucune règlementation n’avait été enfreinte. La semaine dernière, il fut concédé que des règlementations auraient pu avoir été transgressées, mais que Boris Johnson personnellement croyait qu’il s’agissait de «réunions de travail». Le 18 janvier, le Premier ministre britannique avançait que personne ne lui avait communiqué ce qu’étaient effectivement les réglementations émises par son gouvernement ! Après l’épisode Dominic Cummings, ce n’est tout simplement pas croyable…
Un tel mélimélo d’explications, les unes plus intenables que les autres, ne peut être accepté dans un pays qui se respecte, que si l’on peut postuler que la population est totalement idiote. Ce n’est pas le cas en Grande-Bretagne, comme dans tous les pays du monde d’ailleurs, et là-bas, comme ici, une enquête a été ordonnée pour «établir les faits».
Et c’est à ce moment-là que l’on peut différencier notre situation de celle de la Grande-Bretagne sur des plans fondamentaux. Les Britanniques ont évidemment eu un comportement franchement odieux sur le dossier Diego, mais là-bas, au moins, le jeune député conservateur de Bury South, dégoûté par les mensonges de son parti et guidé par sa conscience, déclare Johnson inapte à diriger le pays et rejoint les Travaillistes. Pas pour un avantage quelconque, pas parce qu’il est frustré de son traitement là où il est, mais sur un point de principe ! David Davis, un conservateur de la vieille garde, se met, quant à lui, lui debout au Parlement pour rappeler les mots de Leo Amery à Neville Chamberlain, alors Premier ministre en 1940 : «You have sat too long here for any good you have been doing… In the name of God, go !» rappelait-il. D’autres conservateurs ont déjà soumis des lettres déclarant qu’ils n’ont plus confiance en Johnson, même si les 54 lettres du genre dûment requises pour déclencher un vote de contestation officiel au sein du parti ne sont pas encore rassemblées. Autrement dit, là-bas, les députés n’appartiennent pas à Boris Johnson et ne sont pas ses caniches quand il dépasse les bornes.
Ici, la conscience libre des membres de partis est un véritable exotisme ! Surtout quand celui-ci est au pouvoir.
Ici encore, une enquête ordonnée ou consentie pour une affaire concernant le gouvernement finit soit à l’ICAC, soit à la police que nos dirigeants ont systématiquement noyauté au point où celles-ci ont largement perdu leur crédibilité. Les enquêtes trainent ou bavent dans de l’eau de boudin, d’Angus Road à Kistnen, en passant par Pack & Blister et d’autres, au point où personne n’y croit plus.
Là-bas, cette affaire de fêtes arrosées alors que le pays est sous le coup de restrictions Covid, est confiée à Sue Gray, qui au cabinet office s’assure que les affaires du gouvernement sont conduites de manière morale et éthique. Son pédigrée d’indépendante est inattaquable. Elle ne jouxte d’aucune manière avec les politiciens. Elle ne juge pas. Elle établit les faits de manière précise et rapide, without fear or favor. Elle établissait ainsi en 2017 que Damian Green avait truandé la vérité à propos de pornographie sur son laptop ministériel. Ayant établi ce fait, ce ministre de Theresa May dut démissionner pour avoir mislead the house – péché parlementaire capital !
Bien sûr que là-bas la télévision d’État, la BBC, suit toute l’affaire et donne le rayonnement nécessaire à une démocratie qui se respecte. Mieux, elle enquête et questionne. Notre télévision nationale est dans ses petits souliers, en pareille circonstance, jusqu’à qu’on lui commande un plateau de complaisance appropriée… voire un dais de propagande ! Parfois elle pousse même le bouchon trop loin, fait du zèle en croyant faire plaisir et doit faire machine arrière, comme pour le message de Noël du cardinal Piat, censuré pour des mots jugées… «un peu trop forts». On cherche depuis, quelqu’un pour porter le chapeau !
Ce qui nous mène à l’intégrité de nos élections et à certains appels à la démission du commissaire électoral actuel. Il n’y a aucun doute maintenant qu’il y a eu plusieurs irrégularités dans les élections de 2019 et que le retard à le reconnaître n’aide pas... Mènent-elles à des conséquences ? Nous le saurons après le recount du no. 19 , entre autres. Il n’y aucune controverse non plus quant à a la stratégie absolument toxique du parti au pouvoir de vouloir contrôler toutes les institutions «indépendantes» du pays, y compris l’Electoral Supervisory Commission (ESC). Il n’y a aucun doute non plus dans mon esprit que le commissaire électoral est un homme intègre. Finalement, les paroles de Stalin : «Ceux qui votent ne décident de rien. Ceux qui comptent les votes décident de tout !» ne devraient plus jamais nous quitter l’esprit désormais.
C’est sur cette toile de fond qu’il faut analyser la situation présente et choisir à qui faire confiance.
Il est pour le moins plausible qu’un gouvernement mené au pouvoir par seulement 37 % des votes, malgré le pot-de-vin électoral colossal que représentait l’augmentation de la pension de vieillesse de 41,6 % (à Rs 9 000) puis par un peu plus de 100 % à l’échéance de leur mandat (à Rs 13 500), soit plus qu’inquiet de ses chances de rester au pouvoir aux prochaines élections. Surtout après les scandales divers qui s’accumulent, y compris ceux découlant de la pandémie. Le fait qu’il nomme, sans hésiter, non pas des citoyens indépendants dont l’intégrité est connue, mais des partisans plutôt évidents à l’ESC, ne peut rassurer personne quant à son intention !
Si Irfan Rahman démissionne, il ne sera d’évidence pas suivi par son board et celui qui sera nommé à sa place pourrait être bien pire. C’est un risque qu’il ne faut pas prendre dans les circonstances faisandées actuelles ! Irfan Rahman peut faire bien mieux que de démissionner pour sauver son honneur. Il peut, et doit, rétablir la confiance qui a existé pendant longtemps dans l’organisation de nos élections, devenir plus exigeant, monter sur ses ergots, refuser les ingérences, resserrer les boulons, se défaire et refuser des initiatives telles que le vote électronique ou les computer rooms, tant théoriquement inutiles que géniteurs de soupçon, s’assurer personnellement de l’intégrité de ses returning officers et de leur capacité à diviser par trois, limoger qui il faut, s’il le faut, dynamiser et valider les listes électorales et s’entourer d’une garde prétorienne active, visible et intransigeante, et tout surveiller pour nous organiser des élections sincères qui reflètent, à coup sûr, la volonté des électeurs freely and fairly.
Il doit bien cela. À son pays et à sa propre crédibilité.
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