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La peur du risque et le risque de la peur

13 février 2022, 13:09

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Ramjeet Gosto est mort sur sa motocyclette, en allant au travail, au petit matin, après la levée de l’alerte no 4 du cyclone Batsirai. De ce que j’ai lu, M. Gosto était de toute évidence un monsieur apprécié tant par sa famille qu’à son travail et sa mort, comme toute mortalité accidentelle, est fort regrettable. Il est quelque peu prévisible que l’on ait voulu trouver une explication à son accident. Ou même un responsable. Mais raisonnons si vous le voulez bien.

Ce matin-là, après la levée de l’alerte no 4, il a dû y avoir un certain nombre d’employés qui ont commencé à rallier leur lieu de travail, qui sur une motocyclette, qui dans une quatre-roues. Nombre d’entre eux ont dû rencontrer une obstruction quelconque sur leur chemin ? Un arbre en travers de la route, comme M. Gosto, un débordement de rivière ou de drain rendant la route dangereuse ou même impraticable, des feuilles de tôle peut-être, des feuilles tout court, qui peuvent certainement faire déraper un véhicule imprudent ou des poubelles déplacées par le vent ? Le point ici est qu’il y a eu une seule personne qui n’a pas vu ce qu’il y avait sur sa route et qui en est morte. Qu’est-ce qui s’est passé dans son cas particulier ?

Et plutôt que de comprendre, comment peut-on alors rendre responsable pour cela l’employeur qui aurait pu, très naturellement, avoir voulu rallier ses chauffeurs pour conduire ses autobus, ou la météo qui, à 4 heures le 3 février, constatait que le cyclone était, depuis quelques heures déjà, passé à son point le plus rapproché de Maurice et/ ou même le gouvernement, comme l’ont fait des centaines d’internautes, sans retenue aucune ? Cela vous semble t-il logique ?

Nombreux sont ceux qui ont suggéré qu’un bulletin de vents forts aurait dû avoir été émis après 4 heures, parce que la «queue» du cyclone était encore forte. Peut-être bien. Mais du point de vue cyclonique, il n’y avait plus aucune raison de maintenir la classe 4 qui, pour rappel, avait été en vigueur pendant 16 heures déjà et qui n’avait plus sa raison d’être selon le protocole établi, qui dit clairement que s’il n’y a plus de risque de vent de 120 kph, la classe 4 doit être enlevée ! Ce risque n’existait plus alors, le cyclone, qui à son point le plus rapproché, avait été à 160 kilomètres de Grand-Baie, étant à 220 kilomètres au nord-ouest du pays, à 4 heures, s’éloignant presque vers l’Ouest…

On a intempestivement dit que la classe 4 n’aurait pas dû être enlevée tant que les routes n’étaient pas toutes 100 % praticables. Cela relèverait, selon moi, de la démence pure !

D’abord, la météo ne devrait s’occuper que de cyclone et du temps et de rien d’autre. Les routes nettoyées ou pas, cela ne peut pas relever de la météo, ni impacter la fin de l’alerte cyclonique qui, pour rappel, marche correctement depuis des décades. Vous imaginez si le travail ne pouvait pas reprendre tant que les routes n’étaient pas toutes dégagées ? Mais, monsieur, dans certains endroits on s’organiserait peut-être même pour ne pas dégager les routes ou même de les tenir encombrées pour encore un jour ou deux !

Il y a quelques années, une écolière était emportée par une rivière en crue en essayant de la traverser. Dans un acte de contrition, on élaborait des règlements pour réduire (annuler ?) les risques de pluies fortes et le résultat en a été quelques centaines d’heures de travail annulées pour le pays entier. On a fermé ce pays pendant 18 mois pour éviter la contagion du coronavirus avec les conséquences que l’on connaît sur le plan économique et sur le plan scolaire. Nous avons quand même connu presque 800 mortalités officielles dues au Covid ! La mort de M. Gosto va-t-elle vraiment mener à un nouveau protocole qui va retarder la levée des restrictions de libre circulation jusqu’à ce que les routes soient toutes libres ? Ce ne serait pas un hommage à l’éthique du travail démontrée par M. Gosto en tout cas !

Et pourquoi une telle frayeur morbide face à la mort, de toute façon, puisque nous allons tous y passer, à la fin ? Et notre responsabilité personnelle ne doit surtout pas être oblitérée et le bon sens doit quand même régner, me semble t-il : conduire prudemment en toute circonstance, appliquer les gestes barrières avec assiduité, se faire vacciner, y compris du booster, ne pas s’exposer à des risques inutiles en temps de fortes pluies, ne pas se retrouver sur un pic montagneux à la tombée de la nuit, ne pas mettre sa tête dans un nid de mouches jaunes, etc…

Tout doit-il vraiment être prescrit et légiféré par l’État ? Ou sommes- nous, après tout, assez adultes pour assumer nos responsabilités ?

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La revendication mauricienne sur les Chagos est aujourd’hui confirmée par un jugement de la Cour internationale de La Haye et est maintenant confirmée par l’Assemblée générale des Nations unies mais sera semble-t-il défiée jusqu’au bout par les Britanniques et les Américains qui pensent sans doute que les lois internationales sont utiles pour mettre à l’index et contraindre ‘les autres’, mais qu’elles ne s’appliquent pas à eux quand elles sont trop gênantes ?

C’est ce que l’on appelle la loi du plus fort !

Au paragraphe 385 du dernier discours du Budget, le ministre Padayachy inscrivait une provision de Rs 50 millions «for a trip to the Chagos… which will be led by the Honorable Prime Minister». On ne sait pas ce qu’il avait alors en tête pour la seule presse qui compte pour lui, c.-à-d. la presse internationale et la MBC : planter un quadricolore mauricien au beau milieu de la piste d’atterrissage des B52 peut-être ? Il arrive, comme on le voit, que des David défient des Goliath parfois. Ça ne se solde positivement que très rarement malheureusement et souvent, David ayant regardé Goliath dans les yeux et au risque de la peur, tourne des talons et… envoie une mission scientifique a la place.

Cependant, nous avons un allié de taille. C’est l’oxyde de carbone qui réchauffe la planète !

En effet, Diego Garcia n’a une élévation moyenne que d’environ un mètre au-dessus du niveau de la mer. Or, le réchauffement de la planète fait que les niveaux de la mer augmentent déjà d’environ 3,3 mm par an causant des érosions majeures aux îles sablonneuses et les projections de la NASA américaine (*) et de l’IPCC suggèrent que le niveau de la mer, qui de toute manière enfle un peu au fur et à mesure qu’elle se réchauffe, va augmenter d’entre 0,6 et 1,1 mètre jusqu’en 2100, si nous n’arrivons pas à restreindre les émissions de gaz !

Autrement dit, nous serons éventuellement décolonisés par le réchauffement de la planète !

Il ne nous restera alors, il est vrai, plus d’îles éloignées à proprement parler, ni St.- Brandon, ni Agaléga, ni les Chagos, mais nous serons ‘propriétaires’ d’une des plus importantes zones maritimes du monde ! Du moins si, à l’image des Chinois, nous pouvons alors installer des îles artificielles en béton armée sur les têtes de récif non blanchis qui resteront, pour ainsi ancrer nos revendications… (**)

Mais je soupçonne qu’il ne restera alors plus grandchose à protéger de toute manière et que nous n’aurons toujours pas les moyens de surveiller et de défendre même ce qui reste…

Heureusement que je ne serais pas là pour voir ça !


(*)https://earthobservatory.nasa.gov/images/148494/ anticipating-future-sea-levels

(**) Nous occupons actuellement, avec une zone économique exclusive de 1,284,997 km2, la 26e place mondiale, juste après les Seychelles. Avec nos revendications effectives sur les Chagos et Tromelin nous passerions à un peu plus de 2.3 millions de Km2 soit à la 18e place, juste avant l’Inde. Tartarin de Tarascon, vous connaissez ? https://vividmaps.com/exclusive-economiczones-maps/