Publicité

Le Covid, pretexte à tout

20 février 2022, 09:24

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Le coronavirus a fait son apparition à Wuhan, en Chine, à la fin de 2019, s’est répandu partout sur la planète depuis et a mené à presque 6 millions de morts selon les chiffres officiels enregistrés par l’OMS. Il est cependant probable que ce chiffre de mortalité, comme celui du nombre de cas qui est évoqué à un peu plus de 415 millions, soit une sous-estimation ; certains pays souhaitant minimiser l’envergure de leur problème, d’autres n’ayant tout simplement pas l’infrastructure nécessaire pour compiler les chiffres qu’il faut…

Cependant, ce qu’il faut aussi retenir, c’est que 26 mois après le début de la pandémie, nous avons, sous les coups de boutoir des radios, de la presse, des chaînes de télévision, des réseaux sociaux, des politiciens en mal de «scorer», créé une atmosphère plutôt déraisonnable autour d’un virus qui tue, assurément, mais qui justifie, tout de même, de moins en moins l’attention, les sacrifices et les moyens colossaux que nous lui dédions ?

Une mise en perspective aide toujours.

Les 6 millions de morts du Covid sur un peu plus de deux années, c’est, en moyenne, 3 millions de morts par an. On s’en émeut évidemment. Ici, au pays, presque chaque mort de Covid est une occasion de traumatisme aigu et de douleur partagée qui conditionne ainsi nos anxiétés et nos frayeurs. Dans une large mesure, cet état de fait a d’ailleurs été le moteur principal conditionnant notre discipline grandissante vis-à-vis des gestes barrières et notre prédisposition à nous faire vacciner, ce qui est, en finalité, positif. En effet, quand on voit le barrage de notifications répandues sur les ‘risques’ des vaccins chinois, indiens, anglais ou américains, qu’est ce qui a bien pu inciter 950 000 Mauriciens à être fully vaccinated, du moins pour un temps, et plus de 412 000 à récidiver avec une booster dose, si ce n’est, avec raison, la peur de la mort ?

Bien sûr, la mort fait partie de la vie de notre espèce, comme pour toutes les espèces d’ailleurs ! Nous sommes mortels, que diantre ! 55 millions d’humains meurent d’ailleurs chaque année. Ce qui nous fait peur, c’est sans doute que le Covid est une maladie transmissible, contrairement à une crise cardiaque, par exemple, mais parmi les maladies infectieuses ou transmissibles, celles que l’OMS décrit nébuleusement comme les lower respiratory infections et qui regroupent les bronchites, la tuberculose ou la pneumonie, tuent déjà environ 3 millions d’humains par an. Qui a cependant déjà vu un gros titre sur un jeune de 16 ans qui fait un anévrisme alors qu’il souffre, subsidiairement, de… bronchite ?

Prenons un autre angle.

Des 416 millions de cas de Covid notifiés à l’OMS, 339 millions (81.5 %) ont été guéris et des 71 millions des individus couramment estimés infectés, 99.9 % sont des cas décrits comme bénins (mild) (selon WorldoMeter). On n’en parle jamais ou presque de ces 410 millions-là (98.6 % du total), sauf pour évoquer l’hospitalisation ou le long covid peut-être… On épilogue, par contre, à satiété, sur les mortalités individuelles qui représentent donc, selon l’OMS, 1.4 % des personnes infectées (*). Si l’on veut faire la preuve que les 10,3 milliards de doses de vaccin administrées jusqu’à l’heure sont efficaces, on s’attarde sur le fait qu’un non-vacciné a environ 8 à 9 fois plus de chances de mourir que quelqu’un de vacciné. Si au contraire, on croit que le vaccin c’est l’œuvre du diable, on parle alors plutôt des quelques rares cas de caillots de sang ou du syndrome encore plus rare de Guillain Barré. Le large consensus, c’est qu’aucune initiative n’est sans risque ! Monter à bicyclette est un risque. Faire un vaccin est un risque. Se marier est un risque. Être contaminé au Covid, variété Omicron ou pas, est un risque aussi ; moins si vacciné, plus si pas… On prend ses précautions pour ne pas être infecté, mais on écoute aussi la science qui a tant fait pour la protection de l’humanité (même si elle dérape parfois sérieusement, comme avec la pollution de la planète…), en se faisant vacciner pour se protéger résolument contre le risque de cas graves et éventuellement mortels.

Les statistiques sont à prendre avec des pincettes évidemment car elles ne sont pas toutes générées ou compilées de manière homogène. Prenez un exemple. La Réunion, qui a une population qui représente 66 % de la nôtre, affiche pourtant 278 000 cas de Covid sur Worldometer, alors que nous en déclarions 70 862 à l’OMS… Nous faisons clairement moins de tests ! Alors que nous affichons 786 morts, nos voisins n’en sont pas à 66 % de ce chiffre, mais à 603, soit 10 points de pourcentage de plus. Quoi conclure ? Que Maurice a été plus efficace face à la pandémie ou que l’on est moins disposé à reconnaître nos morts du Covid ? Quoiqu’il en soit, l’ironie de la situation, c’est que c’est La Réunion qui nous blacklistait comme destination de voyage !

Ce qui nous mène à ce que j’ai déjà qualifié du syndrome de la «poule mouillée» dont notre pays semble souffrir de plus en plus. Cet «excès de prudence» inquiétant nous a conduits à fermer le pays pendant 18 mois, ce qui a coûté des dizaines de milliards, fait perdre des emplois, laminé l’industrie du tourisme, contrairement aux secteurs hôteliers seychellois ou maldivien. Cet excès de prudence fait que nos écoliers ont perdu une année entière de cours normaux, que nous sommes à l’affût d’une grosse pluie qui pourrait nous garder à la maison, que nous envisageons de changer le protocole cyclonique pour n’enlever la classe IV qu’une fois les routes totalement libérées de leurs débris ! Cet excès de prudence menait encore jusqu’il y a peu – avant que les consignes ne changent – à la vague d’auto-isolement au moindre prétexte de «contact», une pratique qui a décimé les usines ou les bureaux où l’on ne peut work from home. Cet excès de prudence fait que le gouvernement ratifie maintenant même l’idée d’utiliser les congés maladie par anticipation si son allocation annuelle est dépassée ! (**) Par un excès de prudence, les recteurs de ce pays veulent fermer l’école pour encore deux semaines et, si j’ai bien lu, les professeurs et leurs syndicats «veulent souffler un peu» psychologiquement car ils n’ont pas pu «profiter des grandes vacances» ! Allons bon !

Le reste du monde, quant à lui, du Canada à l’Autriche, de la Suisse à la Suède, de l’Inde aux îles britanniques, faisant le bilan de leurs expériences et des recherches scientifiques récentes, enlève déjà les restrictions Covid ou entrevoit de le faire. Typiquement, une étude consolidée de The Lancet du 19 janvier 2022 (***) rappelle lucidement que si le nombre de cas identifiés a explosé avec Omicron, affichant dix fois plus de cas en janvier 2022 qu’à la période de pointe du Delta en avril 2021 ; il y a aujourd’hui beaucoup plus de cas asymptomatiques ou bénins. Il est ainsi estimé que s’il y avait environ 40 % de cas asymptomatiques jusqu’au Delta, ce pourcentage en est maintenant à 80-90 % ! Résultat ? Le pourcentage d’hospitalisation a baissé drastiquement et l’intubation ou les mortalités ont été réduites de 80- 90 %, comme démontré au Canada et en Afrique du Sud. L’article souligne comment plus de tests peuvent alors être dysfonctionnels, gardant employés ou écoliers, largement asymptomatiques, à la maison, alors même que cela ne ralentira pas matériellement la transmission d’un Omicron extrêmement contagieux, au point ou 50 % de la planète aura été infectée jusqu’en mars 2022 ! Il prédit aussi que le Covid-19 sera bientôt une autre maladie transmissible dont il faudra périodiquement s’occuper, comme la grippe, mutations comprises. L’immunité naturelle des personnes infectées, les vaccins, les antiviraux et les gestes barrières, quand nécessaires, devraient résulter en la fin de la pandémie actuelle, même si le Covid rôdera encore…

Les «poules mouillées» sont à contre-courant !

Madame la ministre a raison de garder les écoles ouvertes !

*) Mais il faut aussi être conscient de la différence entre CFR, CMR et IFR ! Voir : https://ourworldindata.org/ mortality-risk-covid (**) Et que fait-on a 60 ans ? (***) https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/ PIIS0140-6736(22)00100-3/fulltext