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Castes et méritocratie

8 août 2024, 17:08

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Le Parti travailliste n’a pas manqué de rappeler, hier, le 57e anniversaire des élections du 7 août 1967 qui ont façonné l’histoire politique de notre pays, en ouvrant la voie à la décolonisation – ou l’Indépendance – du pays. «Malgré l’opposition farouche des réactionnaires qui avaient le pouvoir de l’argent et qui ont tout fait pour diviser la population, la volonté de changement a prévalu. Les Mauriciens ont su utiliser leur droit de vote pour tourner la page et inaugurer une nouvelle ère dans l’histoire de notre pays. Cette année, les Mauriciens ont une nouvelle fois l’opportunité de faire ce que leurs parents et grands-parents ont fait avant eux et tourner la page sur la politique de division et le népotisme, entre autres», écrit Navin Ramgoolam, dans le message circulé hier, pour continuer le travail «en faveur de la méritocratie».

Mais la division, plus de 56 ans après, se poursuit de plus belle, et ce n’est pas joli joli.

Depuis 1967, un indécent système de castes demeure central au jeu politique. Surtout quand l’on évoque les fameux tickets octroyés par les propriétaires de parti, où l’on remanie volontiers ceux d’en bas, alors qu’à la tête du système politique, c’est toujours les mêmes qui tournent et qui tirent les ficelles de la division de la nation dans quasiment toutes les circonscriptions.

Cette realpolitik mauricienne a été imaginée par les Britanniques pour contrôler telle ou telle frange de l’électorat dans un système de castes qui dépasse la seule communauté hindoue.

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Mais ce système de castes, qui rappelle, dans sa forme la plus horrible, à la fois l’holocauste en Allemagne et les intouchables en Inde, sans oublier la traite négrière, est bien plus ancien que l’histoire locale.

En 1994, Isabel Wilkerson devient la première descendante africaine à décrocher le prix Pulitzer en journalisme pour son chef-d’oeuvre : Caste: The Origins of Our Discontents. Elle y explique, en une thèse appuyée, comment le racisme aux États- Unis serait dû à un système de castes plus vaste… aux ramifications mondiales. La cinéaste Ava DuVernay a porté avec brio cette thèse au grand écran : «J’ai été fascinée par la thèse d’Isabel Wilkerson, qui soutient essentiellement qu’il y a quelque chose de sous-jacent à tous les “ismes” auxquels nous nous heurtons dans nos vies, à travers le monde et à travers le temps. Et cette chose est la caste. J’ai trouvé qu’il s’agissait d’un concept audacieux.»

L’histoire que relate Caste, nous la vivons toujours : ce n’est pas le passé.