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Castes et religions: toujours des armes électorales ?
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Castes et religions: toujours des armes électorales ?
Les élections générales approchent à grands pas. Certains affirment même que l’on pourrait y avoir droit en décembre de cette année au lieu de 2024… Et alors qu’ils sont nombreux à critiquer l’utilisation subtile – ou pas – d’arguments ‘communaux’ par certains politiciens, d’autres se demandent jusqu’à quand de telles considérations d’une époque révolue persisteront. Y a-t-il un espoir de changement de mentalité en 2023 ?
Le sujet est sensible et délicat : les prochaines législatives seront-elles marquées par la prédominance du castéisme et de la religion ? De l’appartenance ethnique ? Les Américains et plus récemment les Britanniques ont donné au monde une leçon de méritocratie. En janvier 2009, une majorité de Blancs aux États-Unis a élu un président afro-américain en la personne de Barack Obama, qui a même été réélu pour un second mandat. En octobre 2022, Rishi Sunak a été nommé Premier ministre du Royaume-Uni. Certes, il n’a pas été élu directement par les électeurs, mais son parti l’a choisi pour diriger le Labour et, par conséquent, devenir Premier ministre. Le fait qu’il ne fasse pas partie de la majorité ethnique, religieuse ou communautaire du Royaume-Uni n’a pas suscité de réactions négatives de la part de la population. En France, Lionel Jospin a été nommé Premier ministre de 1997 à 2002, bien qu’il soit de confession protestante, une minorité représentant seulement 3 à 4 % de la population française, majoritairement catholique. Et Maurice dans tout ça ?
«Cela a pour conséquence que les politiciens sont jugés non pas par leur honnêteté et leur compétence, mais par leur appartenance ethnique.»
Sur les cinq Premiers ministres ayant dirigé le pays depuis 1968, quatre appartiennent à la même communauté et pis encore à la même caste, considérées comme majoritaires dans le pays. Seul Paul Bérenger a été Premier ministre de 2003 à 2005, grâce à un arrangement entre le MMM et le MSM qui a été accepté par la population à l’avance. Les prochaines législatives ne semblent pas promettre de changement à cet égard, car la lutte sera une nouvelle fois entre Pravind Jugnauth et Navin Ramgoolam, selon les observateurs, pour le poste de Premier ministre pour les cinq prochaines années...
La population évolue-telle vers plus de libéralisme ou de conservatisme ? Navin Ramgoolam lui-même a récemment déclaré lors d’une conférence de presse que si l’alliance de l’opposition PTR-MMM-PMSD remportait les prochaines élections, un membre du PTr serait Premier ministre pendant les cinq prochaines années. «D’ailleurs, l’un des principaux arguments utilisés contre cette alliance est de ne pas voter pour elle de peur de voir Paul Bérenger ou Xavier-Luc Duval devenir le prochain Premier ministre», explique un membre de l’opposition, pour montrer que les vieilles habitudes ont la vie dure.
Selon Faizal Jeerooburkhan, observateur politique, les jeunes, peu à peu, montrent un peu moins d’attachement au système de castes. «Le sentiment d’appartenance à une caste est cependant plus marqué dans les régions rurales et parmi les personnes âgées», dit-il. Pour lui, ce sont surtout les anciens politiciens qui empêchent l’évolution des mentalités en attisant le sentiment d’appartenance ethnique de la population pour en tirer profit. «Il est plus facile de jouer la carte de l’appartenance à une communauté ou à une caste que de prouver la performance d’un gouvernement, par exemple», souligne notre interlocuteur, également membre de l’opposition. «Cela a pour conséquence que les politiciens sont jugés non pas par leur honnêteté et leur compétence, mais par leur appartenance ethnique.»
Faizal Jeerooburkhan garde cependant espoir en raison de l’émergence de nouveaux partis tels que Linion Moris sans oublier le combat de longue date mené par Rezistans ek Alternativ. «Cependant, même Linion Moris met en avant des candidats qui sont susceptibles d’être plus facilement acceptés pour la religion et la caste», note-t-il. Il est d’avis également que si Arvin Boolell a été exclu de la course pour le poste de Premier ministre, c’est précisément en raison de la logique des castes. En ce qui concerne les mentalités, d’autres ne sont pas convaincus que cellesci aient véritablement évolué...
Mais comment les politiciens parviennent-ils à titiller la fibre castéiste ? «En choisissant soigneusement des candidats dont le profil correspond à la majorité des électeurs d’une circonscription pour commencer», explique l’historien et observateur politique, Jocelyn Chan Low. Pour Faizal Jeerroburkhan, la campagne communalocastéiste ne se déroule pas ouvertement, mais au sein de groupes fermés. Est-ce que seuls les partis traditionnels ont recours à ces méthodes ? Selon Jocelyn Chan Low, il faudrait connaître les profils ethniques des candidats des nouveaux partis pour déterminer s’ils suivent le même schéma ou s’ils rompent avec cette tradition.
«Tout comme la délimitation des circonscriptions, qui joue un rôle central dans la représentation des communautés.»
Jocelyn Chan Low rappelle également que le dernier remaniement ministériel a été marqué par des considérations communales et castéistes. Il souligne que le système de Best Loser a été introduit précisément pour assurer une meilleure représentativité de l’ensemble de la population. «Tout comme la délimitation des circonscriptions, qui joue un rôle central dans la représentation des communautés.» Pour l’historien, l’élection d’un Premier ministre d’une autre religion et caste dépendra du comportement des électeurs mauriciens à l’avenir.
Un autre observateur politique, également professionnel des médias et membre fondateur du MMM, n’y va pas par quatre chemins : les facteurs de caste et de religion joueront un rôle très important lors des prochaines législatives et ont déjà commencé à créer des remous au sein du gouvernement. «Un ministre de circonscription a été critiqué pour avoir nommé des personnes de la même caste que lui à son ministère, ce qui a suscité une véritable réaction négative récemment», explique notre interlocuteur. Selon lui, la campagne ‘souterraine’ qui fait appel à la religion et à la caste, du moins au sein du MSM, a déjà commencé... Mais n’est-ce pas le cas des autres partis également ?
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