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Résidence artistique

Collectif escale à Rodrigues: sous le soleil de vénus

11 mars 2024, 19:35

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Collectif escale à Rodrigues: sous le soleil de vénus

Manou Soobhany est un artiste mauricien installé en Allemagne.

Manou Soobhany, artiste mauricien installé en Allemagne, veut faire briller la créativité à Rodrigues. Avec le collectif Escale, pendant tout le mois d’avril 2024, il place la rencontre des talents locaux et étrangers sous le signe d’un phénomène astronomique extrêmement rare : le transit de la planète Vénus devant le soleil. Un passage observé par l’abbé Pingré à Rodrigues en 1761, au nom de l’Académie royale des sciences.

Chercher dans l’Histoire un événement où Rodrigues a été mis en lumière. Pour Manou Soobhany, artiste mauricien installé en Allemagne, le transit de Vénus est une évidence. Il y a 263 ans, l’abbé AlexandreGui Pingré est envoyé à Rodrigues par l’Académie royale des sciences pour observer le passage de cette planète devant le soleil. Une aventure avec les étoiles qui se heurtera, pour l’abbé Pingré, à des considérations terre à terre : il restera bloqué à Rodrigues à cause de la guerre entre les Français et les Anglais.

«Rodrigues paraît parfois insignifiante aux yeux de certains. Si, au 18e siècle, on a choisi Rodrigues pour observer le transit de Vénus, c’est la preuve du contraire. Rodrigues a sa valeur. Nous voulons la respecter», souligne Manou Soobhany, responsable du collectif Escale.

Du 1er au 30 avril, Escale sera en résidence artistique à Rodrigues. Une île «ki pli bizin sa ki Moris». Une île qui a soif de contacts, d’ouverture, de nouveaux visages et d’idées nouvelles. La douzaine de participants étrangers, dont certains étaient là l’an dernier pour la résidence Islands- Myth and Reality, à Mahébourg, rencontrera une quinzaine de talents locaux.

Comment les participants rodriguais ont-ils été identifiés ? Le responsable du collectif Escale a donné carte blanche à Dianola Prudence Agathe, chorégraphe et directrice de la Grace Dance School. *«Elle connaît mieux les artistes rodriguais. Elle est dynamique et très professionnelle.»

*Où se déroulera la résidence artistique ? «La commission Arts et culture et celle du Tourisme de l’Assemblée régionale m’avaient promis l’accès au centre de jeunesse et de formation de Baladirou. Mais cela fait un an que je demande une confirmation officielle de cette promesse.» Manou Soobhany, qui n’est pas artiste à accepter un non, a décidé de louer à ses frais un hébergement à Port-Mathurin. «Heureusement que le bâtiment m’est loué à un prix d’ami par un camarade d’enfance. Ankor ena bon dimounn ki pa rod zis kas», s’exclame Manou Soobhany. Moyens limités oblige, les artistes vont vivre à deux dans une chambre pendant le mois de résidence. «En retour, j’ai promis au propriétaire de réaliser six grandes fresques. En Suisse, j’ai fait des fresques de 2m x 2m dans un hôtel, qui racontaient l’histoire de la ville. À Port-Mathurin, je vais raconter l’histoire de Rodrigues sur les murs de ces chambres.»

Sur cette route semée d’embûches pour organiser des résidences artistiques à Rodrigues comme à Maurice , qu’est-ce qui motive la persévérance de Manou Soobhany ? «Je suis découragé», confie-t-il. Assurant qu’après Mahébourg en 2023, Rodrigues en 2024, et bien avant cela, une résidence artistique à l’ancienne prison de Port-Louis en 2007, on ne l’y reprendra pas en 2025. «J’ai refusé des projets, où j’allais être payé, pour venir à Maurice. Et là-bas, je n’aurais pas eu besoin d’être à la fois le commissaire d’exposition et le cuisinier des participants. J’envisage de faire une pause de cinq ans.»


Difficultés. Pénurie chronique de soutiens financiers

«Si je ne peux pas prouver que Maurice s’intéresse à ce que je fais, je n’ai aucune chance d’obtenir des subventions en Europe», explique Manou Soobhany, responsable du collectif Escale. Il lui aurait fallu par exemple un courrier officiel du ministère des Arts et du patrimoine culturel certifiant qu’il contribue à hauteur de 40 % à la résidence artistique. «Ce n’est que là que des institutions étrangères auraient pu contribuer les 60 % restants. Pourquoi est-ce que des Allemands vont donner plus de lamoitié du budget si Maurice ne nous soutient pas ?»

Une demande de subvention au National Arts Fund a reçu une réponse négative, affirme Manou Soobhany. Il se contente de Rs 30 000 du ministère des Arts et du patrimoine culturel pour l’achat de matériel. L’an dernier, les artistes étrangers ont financé eux-mêmes leur voyage à Maurice. «Il faut au moins leur donner le manzé-bwar et du matériel pour qu’ils créent. Si Escales ne fournit pas ce minimum, c’est gênant pour nous d’inviter ces artistes étrangers.»

Cette année, s’il arrive à se «débrouiller», c’est grâce au soutien de la directrice de l’Institut français de Maurice. Et d’un crowdfunding. Manou Soobhany a réduit de moitié le groupe d’artistes invités. Le collectif est passé de 25 à 12 créateurs étrangers qui payent leurs billets d’avion. Une artiste mauricienne, Valérie Médard-Ramchurn, rejoindra le collectif à Rodrigues.