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Trentième anniversaire
Collection Maurice: ala li «kas lasenn»
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Trentième anniversaire
Collection Maurice: ala li «kas lasenn»
Auteurs et bienfaiteurs de la Collection Maurice autour de Rama Poonoosamy, directeur de l’agence Immedia, éditeur du recueil.
Une libération, vécue sous une multitude de formes. C’est l’exutoire que propose le recueil de nouvelles trilingue de la Collection Maurice, pour son trentième anniversaire.
Dans la série des titres prémonitoires, le tout dernier de la Collection Maurice en dit bien plus qu’il n’y paraît. En anglais Freedom, en morisien Kas lasenn, en français La délivrance. Le tout paré d’une danseuse en plein mouvement, ce qui lui donne des allures de flamme.
Pas besoin de lire entre les lignes. Le ton est donné dès la préface de Rama Poonoosamy, directeur de l’agence Immedia, qui, depuis 30 ans, entretien cette flamme de la création littéraire. «À ce moment précis de l’histoire du monde et de notre cher pays, il serait peut-être plus approprié de dresser un état des lieux, de réfléchir et surtout d’agir afin d’améliorer ce qui peut encore l’être, en toute conscience. Et continuer, à travers l’écriture et la parole, à proclamer la liberté de penser, la liberté d’abattre les murs de la division abêtissante, la liberté de bâtir les passerelles de la compréhension et du progrès de l’humanité.» Voilà qui ressemble à un projet de société. D’autres diraient à un programme électoral.
Mais laissons la place à la littérature. À la prose de Rama Poonoosamy, qui termine ainsi sa préface : «Demain se prépare dès aujourd’hui. Avec un choix de valeurs à promouvoir et de contrevaleurs à combattre (…) Il n’est pas question de fuir peureusement devant cette responsabilité d’adulte à la fois immense et décisive. Pour l’amour du pays et pour l’avenir de l’humain.»
Dans la famille de la Collection Maurice, il y a des piliers. Des fidèles parmi les fidèles. Citons Lindsey Collen qui est l’auteure ayant contribué le plus de nouvelles à la Collection Maurice. Soumettant année après année une création en anglais et une en morisien. «J’apprécie l’humilité des grands auteurs de la collection qui accueillent les commentaires et suggestions du comité éditorial», note l’éditeur.
Fidèle au rendez-vous de la Collection Maurice, Lindsey Collen l’est aussi à ses convictions. Ses interrogations sur le sort des travailleurs. Et par extension, le sort des artistes, ces travailleurs mal aimés. Avec The Famous Writer and the Hotel Manager, l’auteure croque avec une ironie mordante les conditions – parfois absurdes – dans lesquelles les artistes exercent leur métier. Comme cette musicienne qui doit jouer du piano sur un ilot qui est en face de la plage où sont installés les clients d’un hôtel. Le «luxe» étant poussé au point d’installer un piano à queue sous la pluie. Sans aucune considération ni pour l’instrument, ni pour la musicienne, ni pour le technicien, ni pour le passeur qui assure la traversée en pirogue. Tout cela n’est qu’un prélude au marchandage entre le «famous writer» et le «hotel manager». À la fin, si l’écrivain repart avec un séjour prolongé dans un palace, qui a vraiment gagné ? L’écrivain ne s’est-il pas davantage enchaîné au système d’exploitation des talents ?
L’ambiance se refroidit davantage avec l’histoire de fantôme de Jean Lindsay Dhookit. Au détour de The haunted house, il reprend ce défi qui consiste à passer la nuit dans une maison hantée, qu’il situe rue Arsenal. Une nuit rythmée par des bruits inquiétants, des courants d’air qui soufflent sur une bougie. Une nuit qui laisse du temps pour penser à la rat race qu’est la course aux lauréats. Pour se souvenir des bagarres raciales pré-indépendance et du couvrefeu imposé. Une nuit, pour se libérer à jamais de la peur du noir.
Le néant, le personnage d’Ananda Devi l’a connu furtivement. Dans L’homme d’un jour, voici un homme sans passé, sans mémoire. Un homme sans présence. Invisible. Sauf pour un chien que l’on a voulu noyer, mais qu’il sauve d’une mort certaine. L’auteur ménage le suspense autour de cet homme jusqu’à la dernière ligne. Quand nous apprenons enfin qu’il s’appelle Lazare. Comme ce personnage biblique ramené d’entre les morts.
Le plus gros volume de son histoire Pour ses 30 ans, la «Collection Maurice» s’offre son numéro le plus volumineux jusqu’à l’heure, avec 408 pages. On y retrouve 37 auteurs, qui proposent 42 textes, comparé aux 25 plumes qui ont été inspirées par le thème de l’an dernier : «Intégrité assumée» en français, «Honesty challenged» en anglais et «Leker prop» en morisien.
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