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Conscientisation patriotique

30 août 2024, 18:10

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Notre prise de position dans le journal d’hier, sous le titre «Évitons la balkanisation», provoque des commentaires qui permettent de prolonger la réflexion sur le financement des associations socioculturelles par l’État (donc, par extension, par nos sous de contribuables).

D’abord, un courriel d’un élu et ancien ministre : «Your editorial is more of a myth than reality, but you are right to aspire to a utopian society. You stand for righteousness, but the main culprit remains the regime (...) who are the ultimate beneficiaries if the land is retrieved from the Trust. No to balkanization, but Nation Building has no price. Resources are not to be wasted. The purpose of unity in diversity and diversity in unity is virtually enshrined in our Constitution. It is not spelled out but taken as a RIGHT. There is no one-size-fits-all society. UN CENTRE POUR LA CULTURE MAURICIENNE can be a tower in the building block. But the pillars remain our identity as a NATION de PEUPLEMENT.»

Un autre commentaire qui mérite qu’on s’y attarde est celui d’une ancienne lauréate qui jette un regard critique sur la façon dont on gère le pays : «Je suis parfaitement alignée au principe selon lequel le mauricianisme doit enfin prendre le dessus sur les considérations communales – “country before party”, dit Kamala Harris ; j’irais un peu plus loin en disant “country before community”. Ce qui ne signifie pas qu’il faut minimiser ou mettre de côté l’attachement et la fierté que chacun peut avoir envers ses origines et sa culture ancestrale. Ni cela ne veut dire qu’une communauté ne peut se sentir lésée si une action des autorités la touche profondément dans sa dignité et son identité. Il s’agit simplement de dire que dans un pays tel que le nôtre, notre force réside dans notre capacité à être unis, dans notre pluralité. Mettons un instant de côté le rôle à double tranchant que les organisations socioculturelles jouent dans cette vision (...). Cependant, je pense que le sujet de division dont tu parles n’est pas le terrain en question. Sur ce point, chacun a son opinion, et tu as peut-être raison de dire que la communauté tamoule est elle-même divisée. Cependant, chacun a aussi, constitutionnellement, la liberté d’expression. Le sujet qui a divisé, qui divise encore, et qui divisera longtemps, c’est qu’on ait enlevé ce droit à un groupe de personnes qui s’exprimait légalement. Je me permets de te partager cela parce que je respecte ton opinion et je pense que tu respectes aussi la mienne – et qu’on peut au moins se mettre d’accord sur le fait que l’expression d’une opinion ne devrait jamais, dans le pays de Maurice, nous conduire en cellule.»

Bien évidemment, il y a des centaines d’autres perspectives, mais celles-là méritaient d’être partagées, à mon avis, à nos lecteurs.

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Il est important de mettre en perspective les discours divisionnistes des individus qui, sans aucun mandat populaire, s’autoproclament porte-parole de telle ou telle communauté – en défendant leurs tribus, au détriment de l’intérêt général.

«Si les mots sont malades, c’est à nous de les guérir», disait Jean-Paul Sartre. Il ne pouvait pas si bien dire dans le cas de ces associations qui pensent pouvoir utiliser les leviers de la religion, de la culture et de la politique pour tenter de devenir acteurs de la vie sociale de Maurice. Dans leur cas, leur rôle au sein du pays n’a rien de «social», encore moins de «culturel». Et tant qu’on persiste à les appeler «socioculturels», ces individus, qui confondent communication et information, vont se proliférer grâce à cette maladie des mots.

Il s’avère encore plus regrettable que nos politiciens se révèlent des marionnettes entre leurs mains. Les Premiers ministres, de sir Anerood Jugnauth à son fils, Pravind Jugnauth, en passant par Navin Ramgoolam et Paul Bérenger, se montrent particulièrement vulnérables à leurs pressions sectaires.

Notre île est plurielle. Notre République est laïque. Notre métier de journaliste nous permet d’explorer le pays de fond en comble. Nous rencontrons, interrogeons, souvent relativisons pour comprendre autrui. Chaque jour qui passe, nos journalistes pénètrent des vies humaines, visitent des quartiers retirés, et nous comprenons ce besoin parfois de s’ériger en groupes de pression pour attirer l’attention des autorités, pour essayer d’avoir accès aux ressources insuffisantes de l’État. Ce que nous ne pouvons pas comprendre, en revanche, ce sont les lobbies sectaires qui veulent des sous de tous les contribuables afin de continuer leur action dissolvante. Et ce, alors qu’un centre culturel mauricien, ou une maison de la culture, mauricienne d’abord, universelle ensuite, pourrait jouer un rôle autrement plus important, un rôle déterminant dans la conscientisation patriotique.