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David contre Goliath !

5 octobre 2024, 07:51

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Cette légende planétaire d’un petit berger (David) qui se bat contre un puissant guerrier armé jusqu’aux dents (Goliath) s’applique aisément au conflit entre le duo US-UK et notre petit pays. Sauf que l’Occident a cru utile d’inclure l’Inde dans la toute dernière phrase du texte qualifié d’accord historique entre les gouvernements britannique et mauricien : «In reaching today’s political agreement, we have enjoyed the full support and assistance of our close partners, the United States of America and the Republic of India.» Pourquoi avoir inclus l’Inde, qui contrôle déjà Agaléga...

Souvenez-vous de l’autre communiqué CONJOINT, celui de juillet 2016 entre les Américains et les Britanniques, destiné aux Mauriciens. Le ton était donné, mais dans ce combat mythique entre forces inégales, c’est pratiquement toujours le plus faible qui gagne alors que le(s) plus fort(s) finit/ssent, le plus souvent, par mordre la poussière. Cela a-t-il été le cas pour nous ? Oui, selon le gouvernement et non, selon l’opposition, qui préfère focaliser sur Diego Garcia et la souveraineté au lieu des Chagos et de la souveraineté sur tout l’archipel.

Le communiqué conjoint de 2016 était – et on le concède tous ici à Maurice – insultant, intimidant et menaçant à plus d’un titre. Nous avions voulu savoir à l’époque qui en était à l’origine : était-ce un drafting à l’américaine ou à l’anglaise, où chacune des deux parties aurait rédigé un paragraphe ? Nous avions donc appelé les deux numéros de téléphone au bas du communiqué pour en savoir plus. Bien évidemment, on n’en a rien su sur le «writing process» et/ou les «writers», car la complicité US-UK est hermétique, avant même la Seconde Guerre mondiale.

On nous avait expliqué, de manière tantôt laborieuse, tantôt gênée, que c’était un travail d’équipe, fait à «haut niveau», entre Londres et Washington, DC. Au niveau de Port-Louis, nous avait-on assuré, on avait surtout fait de la «coordination» et de la «diffusion».

Selon nos renseignements, Washington, DC, ne s’est pas mêlé de la question de souveraineté par principe et par tradition. «C’est un litige entre Londres et Port-Louis et on ne se mêle pas normalement de cette question», nous a expliqué, au téléphone, plus d’une fois, une source bien placée à l’US State Department, qui connaît le dossier chagossien. Selon cette source de Washington, DC, eu égard seulement à la phrase (un petit détail mais qui a une importance capitale ici) «...which have been British since 1814», le drafting ne pouvait PAS être d’origine américaine, mais certainement britannique. Au niveau des Britanniques, personne ne pouvait/voulait dire à quel niveau le communiqué avait été rédigé, en raison, entre autres, du remue-ménage provoqué par le Brexit.

Au-delà du blabla officiel du communiqué de 2016, qui évoquait tour à tour les relations entre ces deux grandes nations et Maurice, un peu d’histoire pour ancrer la souveraineté britannique sur les Chagos, l’importance militaire de cet archipel pour la paix dans le monde, donc, bénéfique aussi pour Maurice et la possibilité de le céder... à Maurice quand sa militarisation ne sera plus de mise, il y avait une grosse contradiction. Pourquoi céder à Maurice les Chagos alors que notre pays n’en était pas souverain (paragraphe 2, paragraphe 3) selon les Britanniques à l’époque : «Whilst neither the UK nor the USA recognises the Republic of Mauritius’ claim to sovereignty of that Territory...», «referral of this matter to the International Court of Justice would cause lasting damage to Mauritius’ bilateral relations with both the UK and the USA». La menace était directe mais Mauricie n’a pas fléchi !

S’ils refusaient de reconnaître notre souveraineté et nous déconseillaient en même temps de faire appel à la justice internationale, alors que nos minces cartouches sont épuisées, pourquoi tant de bonté de leur part aujourd’hui ? Bien entendu, parce que c’était un leurre qu’on brandissait : ne nous poursuivez pas au tribunal, et si vous le faites, nous vous cèderons peut-être un jour les Chagos. Peut-être, un jour, nous disaient-ils.

Là, c’est la carotte, que l’on retrouve également au paragraphe 4, première phrase («from which Mauritius will gain the benefit of friendly bilateral relations»). Mais ces deux ambassades maniaient aussi le bâton, et c’était la partie la plus intéressante, car c’était le cœur du communiqué et son objectif premier : la menace, l’intimidation.

Alors pourquoi cette menace, pourquoi cette intimidation en 2016 ? Parce que le non-dit était que le couple US/UK avait peur que Maurice saisisse la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye. Était-ce une peur feinte ou était-elle réelle ? Si elle était réelle, il fallait, plaidait l’express, qu’on se penche TOUS (gouvernement, opposition, société civile et journalistes, étudiants en droit et en relations internationales, citoyens d’ici et de la diaspora éparpillée sur la mappemonde) sur les voies et moyens pour saisir la CIJ afin d’avoir son «Advisory Opinion» – qui aura été un atout de taille pour les négociations futures.

Avec les résolutions 1514 et 2066, déjà en poche mais mal exploitées jusqu’alors, un nouveau soutien onusien nous avait ouvert les portes de La Haye.

Plus d’un demi-siècle après notre indépendance, il nous fallait nous rendre à l’évidence : dans l’affaire des Chagos, les Britanniques et les Américains n’ont pas joué cartes sur table. Il fallait dès lors multiplier les stratégies contre les deux superpuissances et les attaquer sur d’autres plans. Après l’attaque simultanée des Américains et des Britanniques, il était opportun que les trois anciens PM (Jugnauth, Bérenger et Ramgoolam) s’assoient autour d’une même table pour accorder leurs violons, mais cela ne s’est pas fait. À cause des ego de l’un ou de l’autre, c’était trop leur demander que de mettre leur ego de côté afin de discuter d’une stratégie nationale, qui devrait être au-dessus des guéguerres politiques internes ? Aujourd’hui encore, surtout à cause de l’imminence des prochaines législatives, les échanges paraissent impossibles entre le PM actuel et les leaders du PTr et du MMM.

On savait que la compétence de la Cour internationale était essentiellement facultative, que le recours nécessitait l’accord des États en litige, que le Royaume-Uni ne donnerait (?) jamais son accord. Mais il était toujours possible de demander à un organe des Nations unies de saisir la CIJ, mais à quoi bon puisque cet avis n’a aucune force contraignante.

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Revenons à l’histoire biblique de David contre Goliath. Pour comprendre pourquoi les faibles et petits sont plus à même de gagner, il faut lire le journaliste Malcolm Gladwell (qui travaille au New Yorker). Dans son récent livre, David et Goliath, l’art de contourner les règles du jeu, il déconstruit les idées reçues et soutient une thèse enthousiasmante (pour nous, mais peut-être pas pour les Chagossiens britanniques) : ceux qui se trouvent en principe désavantagés ont autant de chances de réussir, sinon plus, que les favoris. «De Martin Luther King à Lawrence d’Arabie, d’un avocat dyslexique devenu un orateur hors pair à un entraîneur de basket-ball qui fait gagner la pire équipe de sa ligue»... Comme les exemples de Malcolm Gladwell, la nation mauricienne peut se muer en de véritables battants, qui peuvent faire évoluer une situation difficile à notre avantage. Sans les Chagos, notre indépendance ne sera pas complète ! Et si, en 1967, nous étions divisés sur la voie à emprunter, aujourd’hui, sur LA QUESTION de souveraineté, nous étions tous derrière sir Anerood Jugnauth lorsqu’il avait enfilé sa toge d’avocat pour son dernier combat.

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Aux dernières nouvelles : la députée conservatrice et ancienne ministre de l’Intérieur, Suella Braverman, d’origine mauricienne, s’est rendue sur X (anciennement Twitter) pour critiquer brutalement le Premier ministre Keir Starmer et le secrétaire d’État aux Affaires étrangères, du Commonwealth et du développement, David Lammy. Son attaque virulente est survenue juste après l’annonce selon laquelle le Royaume-Uni céderait la souveraineté des îles Chagos à Maurice. Elle a qualifié cette décision de «honteuse» et a traité David Lammy «d’idiot utile de la Chine»...