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Décomposition-recomposition
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Décomposition-recomposition
Le gouvernement MSM regarde le bloc PTr-MMM-PMSD se décomposer avec délectation. Au Sun Trust, la campagne s’emballe, les récompenses et cadeaux se distribuent. L’opposition parlementaire se déchire alors qu’elle aurait dû se focaliser, ensemble, sur le prochain meeting du 1er-Mai, qui aura valeur de test préélectoral, en termes de mobilisation, même si l’on sait que ceux qui vont aux meetings ne déterminent pas forcément l’issue des résultats.
Au lieu donc d’une réunion entre les trois dirigeants de l’opposition parlementaire, pour aplanir les macadams, l’on a eu droit hier à une rencontre, qualifiée de «franche et cordiale», entre Navin Ramgoolam et Adrien Duval pour empêcher l’implosion du bloc.
Le leader de l’opposition, qui a préféré envoyer son fils à la rue Desforges, donne l’impression qu’il aurait déjà intériorisé la rupture avec Ramgoolam et Bérenger. En s’affichant tout sourire avec Patrick Belcourt, qui est la bête noire de Bérenger au numéro 19, il a voulu rendre la monnaie de sa pièce à Bérenger, avec qui il aurait croisé le fer la veille, à Riverwalk, par rapport aux détails de l’alliance.
Ramgoolam confie, lui, à ses pairs, qu’il préfère que les trois partis aillent ensemble au meeting du 1er-Mai afin de démontrer que la synergie a pris et que les tirs seront désormais concentrés sur le régime Jugnauth. Il est conscient qu’il est difficile de ménager à la fois Bérenger et Duval, mais en même temps il doit se refaire une image de rassembleur afin de retrouver le chemin de l’hôtel du gouvernement depuis sa terrible défaite de 2014. En attendant, les actualités risquent de s’enchaîner avant la reprise parlementaire. Est-ce que Xavier-Luc Duval sera encore leader de l’opposition ? À hier soir, personne ne pouvait s’aventurer à répondre à cette interrogation pourtant centrale…
Qui sont-ils ceux ou celles qui sont sûrs de rafler leur ticket ? Pourquoi sont-ils mis en avant, avant même le manifeste électoral de leur parti ? Comment en sont-ils arrivés là ? Certains sont liés biologiquement ou par les liens du mariage aux propriétaires des partis dont ils prolongeront les couleurs. Contrairement aux autres candidats, les proches des leaders, normalement, n’ont pas eu besoin d’acheter leur ticket ou de montrer qu’ils ont un réservoir de votants, de telle ou telle communauté, pouvant bénéficier au parti. Ils incarnent, dans l’imaginaire du parti, la relève et ont donc besoin d’un coup de pouce de l’état-major, qui se bouscule pour les aider, afin de plaire au chef suprême.
Bien évidemment, pour assurer la relève, la méritocratie n’est pas aussi importante que le patronyme ou le degré de confiance qu’un leader place en quelqu’un.
Les listes sont un sinistre mélange entre les castes hindoues, contrebalancées par un nombre précis d’autres groupes ethniques. Même la population générale, qui est un fourre-tout constitutionnel (rassemblant tous ceux qui ne se retrouvent pas dans les trois autres cases : hindoue, musulmane, sino-mauricienne) est sous-divisée, en fonction d’autres critères d’un autre âge.
Triste aussi de constater qu’à chaque fois, l’on nous dit qu’on a fait un effort pour «accommoder» un maximum de femmes, mais nous sommes encore loin de la parité. Pourtant, en termes de compétences, ce n’est pas le nombre de femmes qui fait défaut. Sauf que la plupart de celles-ci ne veulent pas monter sur une caisse de savon, ou être réduites, contrairement aux hommes, à des étiquettes communales : par exemple, mon ami musulman doit être uniquement aux numéros2, 3, 10, 13, 15, ou mon collègue tamoul devrait se contenter des circonscriptions 1, 8, 13, 18, 19 – soit cinq circonscriptions sur 21 ! Il en va ainsi pour les autres différentes catégories ou sous-catégories de la nation mauricienne, découpées en clans… Et dire que nous sommes en 2024 !
Il est temps de ressortir un livre qui restera d’actualité pour longtemps encore. Il s’agit du texte magistral, Le discours de la servitude volontaire, d’Étienne de La Boétie, écrivain du 16e siècle, qui pose la question : «Pourquoi un seul peut gouverner un million, alors qu’il suffirait à ce million de dire non pour que le gouvernement disparaisse ?»
La Boétie, dont le texte semble dépeindre nos leaders politiques, postule qu’il y a trois sortes de «mauvais princes» : 1) Ces princes ou tyrans qui arrachent le pouvoir par la force des armes et qui se comportent comme en pays conquis ; 2) ces autres qui montent sur le trône par succession de race – nés et nourris au sein de la tyrannie, ils sucent le lait naturel du tyran et usent du royaume comme de leur propre héritage ; et 3) ces princes qui possèdent le royaume par l’élection du peuple, qui normalement devraient être plus supportables, mais qui se révèlent souvent indétrônables.
L’un de ces mauvais princes est ainsi décrit par La Boétie : «Dès qu’il se voit élevé en si haut lieu, au-dessus de tous les autres, flatté par je ne sais quoi, qu’on appelle grandeur, il prenait la ferme résolution de n’en plus descendre (…) Il considère presque toujours la puissance qui lui a été confiée par le peuple comme devant être transmise à ses enfants.»
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