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Un an depuis sa disparition
Dev Virahsawmy ti fini dir: «Refiz tas deryer midi»
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Un an depuis sa disparition
Dev Virahsawmy ti fini dir: «Refiz tas deryer midi»
Relire Dev Virahsawmy, le «die-hard» du «Kreol Morisien». Une cause qu’il a défendue dès août 1967 dans quatre articles fondateurs parus dans «l’express». Le jeudi 7 novembre sera le premier anniversaire de sa disparition. L’occasion de se souvenir que 57 ans de cela, il s’est engagé en faveur de «langaz later Moris» comme un vecteur d’unité. Plus de cinq décennies plus tard, la lutte pour la place institutionnelle du «Kreol» continue, que ce soit dans le système éducatif ou au Parlement.
Motion au parlement
«Dev Virahsawmy li pa zis reflexion, li ousi aksion.» Un volet souligné par Alain Ah Vee de Ledikasyon Pu Travayer, qui est lui aussi intervenu lors de la table ronde du 28 octobre. «L’une des premières motions de Dev Virahsawmy le député, dans les années 1970, concerne la langue kreol. Ki manier fode pa ena bann baryer dans lasanble, bann depite bizin kapav exprim zot dan zot lang maternel.»
Alain Ah-Vee souligne que Dev Virahsawmy n’a pas uniquement «fait pression pour que l’on développe une politique linguistique, il a aussi travaillé au développement de la langue elle-même, que ce soit en termes de literacy ou de littérature».
Selon le représentant de LPT, pour aborder la question de politique linguistique, «bizin koz lor kisannla vremem detenir pouvwar». Malgré toutes les avancées, et les 56 ans d’indépendance, Maurice a toujours une politique linguistique marquée par la colonisation, souligne-t-il. «Nou get Courts Act 1947, bann regleman parlman, konstitision Moris, nou trouve ena bann antrav ki exklir langaz kreol de bann institision. Lang kreol inn rantre parfwa par linpos ou swa inn amenaz enn ti plas pou li, inn monitor so evolision, parski li lie ek pouvwar».
Revenant à l’actualité de la campagne électorale, Alain Ah Vee s’est interrogé sur le nombre de candidats aux élections du 10 novembre qui sont issus la classe des travailleurs. «Nou kapav konte lor ledwa, an 1976 ti ena. La Constitution stipule que pour être au Parlement il faut maîtriser l’anglais et pouvoir s’adresser au président de la Chambre en français. L’encadrement légal a été fait expressément pour que l’anglais et le français gardent leur suprématie.»
Les articles fondateurs
Le premier article de Dev Virahsawmy sur le Kreol paraît dans l’express du samedi 12 août 1967. En surtitre : «Pour un parler national. Le ‘créole’ doit devenir mauricien.» Le texte de Dev Virahsawmy, en anglais, est titré Language problems in Mauritius.
Il y aura quatre articles. Dont celui du jeudi 31 août 1967 intitulé Why English and not French? Dev Virahsawmy prend position contre le français comme langue officielle. Expliquant que l’anglais, «as it is foreign to almost all Mauritians, no sector of the population will feel favoured or handicapped». Cinquante-sept ans plus tard, voilà les quatre articles fondateurs agrandis et imprimés sur des panneaux, exposés à l’Institut Cardinal Jean Margéot (ICJM). Le 28 octobre, qui marque la journée internationale de la langue et de la culture créole, l’ICJM, à qui Dev Virahsawmy a légué ses droits d’auteur – lui a rendu hommage lors d’une table ronde dans le cadre du premier anniversaire de sa disparition.
Dans le premier de ces articles fondateurs, paru le 12 août 1967, la présentation de l’auteur par le journal démarre ainsi : «Nous devons être fiers de notre parler créole, aspect le plus valable de la culture mauricienne (…) Dev Virahsawmy appartient au groupe d’âge qui a plus que tout autre intérêt à façonner une île Maurice solidaire et heureuse. Il a 25 ans.»
Arnaud Carpooran, président de la Creole Speaking Union, intervenant lors de la table ronde, situe le contexte des quatre articles fondateurs de Dev Virahsawmy. «Les élections législatives qui vont déboucher sur l’indépendance de Maurice ont eu lieu le 7 août 1967.» Maurice se prépare alors pour son indépendance politique, économique, culturelle. «C’est cinq jours après ces élections que Dev Virahsawmy, qui a 25 ans à l’époque, débloque une série de définitions sur ce que c’est que le langage. Est-ce que ce que parlaient les gran dimounn c’est un langage ?» A ce moment-là, Dev Virahsawmy est un jeune diplômé d’Edinbourgh. Pour Arnaud Carporan, «boukou dimounn kapav konsidere ki se pa enn zafer fer kan ou sorti Lerop, vinn pretann ki kapav met Kreol dan lekol».
Il distingue les diverses facettes de Dev Virahsawmy. Il y a le littéraire «avec un patrimoine énorme». Il y a l’homme politique, le polémiste. «Nous ne le considérons pas suffisamment comme un penseur de la politique linguistique.»
Le président de la Creole Speaking Union le reconnaît : «Nous revenons rarement à la base. Celui qui a écrit sur le Kreol en premier.» Il inscrit dans cette filiation le BA Creole Studies à l’université de Maurice (NdlR : un diplôme qui n’a pu démarrer à la rentrée 2024/2025), le département de Kreol Repiblik Moris au Mauritius Institute of Education, l’enseignement du Kreol à l’école depuis 2012. «Rat selman letap HSC. Li pou bizin vini sinon travay-la pa pou finn termine.» Pour Arnaud Carpooran, ce que Dev Virahsawmy a surtout réussi c’est de faire du Kreol «enn zouti lansegnman dan nation-building».
«Language loyalty»
«Tou seki nou ankor pe dir zordi, Dev Virahsawmy deza pe koz sa an 1967», souligne Arnaud Carpooran. Notamment l’aspect de l’échec scolaire et l’utilisation de langues étrangères au lieu de la langue maternelle dans l’enseignement. Le président de la Creole Speaking Union place la pertinence de ces articles dans un contexte où «boukou dimounn kondane pou tom lor pave parski politik langaz pa finn definir». En 1967, Dev Virahsawmy écrit : «Language loyalty by itself is not a despicable aspect of human nature. It is quite understandable that people want to cling to traditions handed to them when for some reason or other they are forced to change environment (…) In Mauritius it looks as if people cannot find a norm to conform to (…) So under the banner of different languages, feelings have been rallied and the slow evolutionary motion towards unity, towards the building of a nation, has been temporarily stopped and the population arbitrarily divided into different groups. It is believed by many – and this belief cannot be objectively supported- that the different communities are so different that nothing can ever unite them. That we, Mauritians, have nothing of which we can be proud and which can have a magnetic unifying power. People holding these views are wearing blinkers. We, Mauritians, have something in common. It is a very powerful tool for the creation of a nation (...) It is the Creole which we speak.»
Plaidoyer récent
The «language issue» que Dev Virahsawmy a abordé en 1967, il en parlait encore dans un texte daté du 26 novembre 2022. Extrait : «Our refusal to address this issue out of an absurd form of loyalty to some supposed ancestral language has dramatic, not to say catastrophic, consequences. Less than 30% of the overall population are fully literate and numerate although primary, secondary and tertiary education are free and accessible. Why? The mother tongue (Mauritian) of 90% of the population and the second language of the remaining 10% is not used as medium for basic literacy and numeracy. Moreover, political leaders and educators don’t seem to know that because English is also a creole language with great syntactic similarities with Mauritian, the passage from Mauritian to English, if properly tackled, can lead to quick and smooth mastery of the republic’s official language and the world’s lingua franca. When the national language (Mauritian) and the official language (English) are well mastered, a third or fourth language can more easily be mastered.»
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