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Un ticket pour mon fils

27 septembre 2014, 07:30

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C’est la saison des courbettes. Il s’agit pour ceux qui sucent les mamelles du pouvoir de se faire remarquer. Il leur faut sortir du lot et prouver leur utilité au prochain régime. Entre-temps, il faut ranger toute faculté de raisonner et tout miser sur l’émotion.

 

Faites le test : essayez de discuter avec des politiciens du PTr ou du MMM sur leur sort immédiat, et vous verrez qu’ils ne savent pas grand-chose eux-mêmes sur leur avenir. Ils sont, en fait, suspendus aux lèvres de Navin Ramgoolam et de Paul Bérenger. Les deux propriétaires de parti distribuent les tickets selon une logique propre à eux deux, que le citoyen lambda ne pourra comprendre, car les calculs pour arriver à cette fameuse liste de 60 candidats sont multiples et complexes. En attendant, il y a des coups bas au sein des partis et des circonscriptions. Il n’y a pas de démocratie dans l’attribution des tickets. Rien n’est fait dans la transparence.

 

De l’autre côté, l’alliance dite du peuple ne fait pas mieux ; elle reproduit  systématiquement le même schéma que le bloc rouge-mauve. C’est la même stratégie électorale. La question qui se pose alors : comment des partis dont le fonctionnement est loin d’être démocratique pourraient-ils approfondir notre démocratie ?

 

Face aux dinosaures, il y a une foultitude de petits partis et de candidats indépendants qui tentent de changer la donne, en proposant un semblant d’alternative à un système politique qui a la peau dure. Si Maurice était une vraie démocratie, dans le sens où elle offrait des chances égales à tout le monde, indépendamment du patronyme, n’aurait-on pas dû voir, dans la sphère politique, cette vibrante génération de Ramgoolam, Jugnauth, Duval, etc., ouvrir les portes du pouvoir politique au peuple ?

 

Cette omniprésence des sempiternels fils à papa (voire petits-fils) commence à lasser. L’omerta d’hier se dissipe avec Internet et le réseautage social qu’il a engendré. La nouvelle génération ne se reconnaît plus dans ces «brand names». Si les jeunes ne représentent pas plus de 15 % des votants, en revanche ils peuvent s’avérer de puissants agents et vecteurs du changement. Qui peuvent faire capoter les aspirations des uns et des autres.

 

Dans «Le Discours de la servitude volontaire», Étienne de La Boétie, écrivain du 16e siècle, évoque la question clé : «Pourquoi un seul peut gouverner un million, alors qu’il suffirait à ce million de dire non pour que le gouvernement disparaisse ?» Il y a trois sortes de tyrans, «de mauvais princes». Les uns arrachent le pouvoir par l’élection du peuple, les autres par la force des armes, et les autres encore par succession de race. «Quant à celui qui tient son pouvoir du peuple, il semble qu’il devrait être plus supportable, et il le serait, je crois, si dès qu’il se voit élevé en si haut lieu, au-dessus de tous les autres, flatté par je ne sais quoi, qu’on appelle grandeur, il ne prenait la ferme résolution de n’en plus descendre (...) Il considère presque toujours la puissance qui lui a été confiée par le peuple comme devant être transmise à ses enfants», nous dit La Boétie.

 

Avec une presse souvent sujette à des attaques pouvoiristes visant à la décrédibiliser et la museler, et une société civile encore trop divisée, l’espoir d’un sursaut ne peut venir que des citoyens engagés. Ceux-là doivent mener un combat sans relâche contre ceux qui veulent leur «boute» de ticket ou de faveurs au détriment du grand nombre. Ils ne doivent pas perdre leur capacité d’indignation devant les passe-droits inacceptables, qui poussent sur le terrain fertile de la campagne électorale...