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Fausser la démocratie
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Fausser la démocratie
Deux religieux ont franchi coup sur coup cette semaine les frontières qui séparent la religion de la politique dans une république laïque. Ils ont lancé des consignes de vote en vue des législatives. Ce glissement des religieux n’augure pas des jours meilleurs pour la démocratie mauricienne.
Dimanche, le prêtre Jocelyn Grégoire a adressé à ses partisans un message à peine codé en soutenant que «c’est l’éducation la clé nous l’avenir pou nous conner sa soleil bonair la kot lever». Clé et Soleil ? Ce n’est pas un hasard si les emblèmes de deux formations politiques majeures sont réunis dans cette phrase. Le prêtre s’est permis une remarque plus explicite en affirmant qu’il «n’y aurait que 17 créoles au Parlement même en cas de 60-0 d’une alliance ou de l’autre».
Quant à Somduth Dulthumun, président de la fédération des temples hindous, il a appelé ses «camarades» à ne pas voter pour les candidats du MMM. Il les exhorte à voter pour deux candidats travaillistes et un candidat MSM. Il a affiché sa méfiance envers le MMM et sa conviction qu’une alliance PTr/MMM n’est pas durable.
Dans les deux cas, un dignitaire religieux a abusé de l’autorité que lui confère sa fonction pour tenter d’influencer un vote populaire. Cela fausse le jeu démocratique.
Grégoire et Dulthumun ne sont pas des citoyens motivés par l’intérêt général. L’un comme l’autre a choisi d’oeuvrer pour le bien d’une communauté religieuse spécifique. C’est leur droit absolu. Mais ils devraient se garder d’intervenir dans le champ politique.
Quand des religieux tiennent des discours politiques, ils n’induisent pas un comportement électoral sain. Ils ne nous poussent pas à unir nos efforts contre des fléaux tels que la pauvreté et les inégalités sociales. Au contraire, ils nous imposent une grille communale et donnent une perspective sectaire aux problèmes nationaux. Loin de rassembler, ils divisent, ils fragmentent.
Leurs postures sont difficilement conciliables avec un Etat moderne. Car, quand la politique est influencée par des intérêts religieux et socioculturels, la démocratie finit toujours par se transformer en lobbycratie.
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