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Pour un miracle sociétal

22 mars 2015, 15:56

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La bonne gouvernance à tous les niveaux et dans tous les secteurs est primordiale
pour lutter contre les fléaux qui plombent le développement.

 

Alors que l’économie internationale n’est toujours pas sortie de la crise, la bataille pour le nouveau gouvernement mauricien est de taille. L’emploi, la lutte contre la pauvreté et les craintes d’inégalités, autant de problèmes auxquels les têtes pensantes du pays devront faire face pour redresser le pays.

 

Lundi 23 Mars, le ministre des Finances Vishnu Lutchmeenaraidoo va présenter le Budget sur fond d’opération de nettoyage. Nettoyer c’est bien mais pas suffisant. Le temps de construire est arrivé. Le budget de lundi comporte un triple enjeu.

 

Sociétal d’abord, car il s’agit de confirmer de manière concrète le projet de société contenu dans le discours- programme axé sur le concept «innovative socialism». Économique ensuite car il ambitionne de jeter les bases d’un second miracle économique avec un objectif de croissance de 5,7 % en 2016. Politique enfin, un budget bien accepté par la population sera bénéfique au MSM qui est en train de s’affirmer comme le nouveau grand parti avec la déchéance en cours du PTr et du MMM.

 

Sir Anerood Jugnauth et Vishnu Lutchmeenaraidoo n’ont cessé de parler de second miracle économique. Le pays a besoin d’une vision- mission, d’une stratégie animée d’une volonté sans faille. Il faudra mettre le coeur à l’ouvrage. On avance que depuis l’arrivée de l’alliance Lepep à la tête du pays, le sourire est revenu chez les Mauriciens et qu’il existe un feel good factor. La confiance serait aussi de mise dans le milieu des affaires.

 

Le défi sociopolitique pour le Grand argentier va être de capitaliser sur le mood qui prévaut pour insuffler une dynamique afi n d’inciter les investissements et lancer de nouveaux projets. Il y a en jeu la bataille de l’emploi, la lutte contre la pauvreté et les criantes inégalités. Est-ce que les conditions objectives et subjectives sont réunies pour cela ? Voyons ce qu’il en est de l’environnement économique international et national.

 

L’économie internationale n’est toujours pas sortie de la crise de septembre 2008 même si l’économie américaine se porte mieux. En Europe, la situation sera difficile pour encore 6 ou 7 ans. Maurice, avance-t-on avec raison, est trop eurocentré et il faudrait s’engager résolument et rapidement dans une stratégie pour sortir de cette dépendance.

 

L’économie nationale connaît, elle aussi, de sérieux problèmes : faible croissance, endettement massif – de l’État, des entreprises et des ménages –, taux de chômage inquiétant, pauvreté galopante, croissance des criantes inégalités. Ceux qui se penchent sur l’état de notre économie évoquent aussi la cherté de notre ressource humaine, le déficit de compétence et de savoir- faire pour répondre aux exigences de la compétition mondiale, une formation inadaptée aux besoins des industries actuelles et futures, un système d’éducation en inadéquation avec les exigences du monde actuel et à venir.

 

Il faudrait aussi ajouter le trop de concentration des ressources entre les mains d’une poignée de personnes, l’appât du gain facile, l’égocentrisme qui a gangréné la société mauricienne, l’absence de méritocratie et le règne du népotisme et du clanisme dans le recrutement et les promotions dans nos institutions.

 

Le monde en 2015 est plus difficile et plus complexe que durant les années du premier miracle. Aujourd’hui, la donne première pour construire l’avenir est l’ouverture pour une intégration réussie dans le nouvel ordre mondial.

 

Ayons donc une lecture attentive et intelligente de ce qui se passe dans le monde pour réagir et s’adapter afin de saisir les opportunités. L’ouverture se décline par une meilleure connectivité tous azimuts : la libéralisation de l’accès aérien, la relance du port franc, l’accueil des travailleurs étrangers et des expatriés et le retour au pays des cerveaux de la diaspora.

 

Il y a des opportunités qui n’ont pas été exploitées pleinement, à l’exemple du Knowledge hub tout comme on n’a pas exploité le potentiel de l’Afrique, continent d’avenir. Il y a donc de la marge tout comme il y a des créneaux porteurs – agroindustrie, biotechnologies, light engineering, bijouterie, industrie cinématographique et des arts créatifs. Les nouveaux piliers prennent du temps avant de donner des résultats. Entretemps, il y a besoin de consolider ceux existants dans un plan de développement revisited. Cela va de pair avec un plan d’aménagement du territoire intégré avec ses cités modernes qui seront aussi des lieux d’innovation.

 

V. Lutchmeenaraidoo a déjà annoncé quelques axes importants du budget de même que la philosophie qui va l’animer. Il est convaincu que la population est prête à accepter le message appelant au travail, à la discipline et à la productivité. Lundi, il nous expliquera comment il compte financer tous les projets.

 

Le ministre des Finances se veut rassurant : ce sera un Budget qui rassemble. Il y aura certainement des quick wins pour prolonger le feel good factor et d’autres mesures devant donner des résultats tangibles dans le moyen et le long termes. À ce moment- tournant de l’histoire du développement du pays le budget devrait contenir des propositions pour un paradigm shift touchant les institutions. C’est vital. Vivement aussi la concrétisation du comité Vision 2030.

 

Au-delà du Budget, ce dont le pays a besoin, c’est d’une révolution culturelle qui sera portée tant par les élites que par la population. En clair, cela signifie qu’il faut voir plus loin que le bout de son nez, ouvrir nos esprits, s’ouvrir aux autres, promouvoir activement les valeurs humaines, assainir les mentalités et moderniser les pratiques.

 

La bonne gouvernance à tous les niveaux et dans tous les secteurs est primordiale pour lutter contre ces fléaux qui plombent le développement ; elle est l’épine dorsale de cette révolution. Sir Anerood Jugnauth, V. Lutchmeenaraidoo et l’alliance Lepep ont un rendez-vous avec l’histoire. Il y a un immense chantier complexe et difficile en devenir avec le ministre des Finances comme maître d’ouvrage et le Premier ministre comme maitre d’oeuvre. Il s’agit de distiller une dynamique de confiance au sein de la population et de la jeunesse en particulier en vue d’une mobilisation nationale. Pours’engager dans la voie d’un miracle… sociétal.