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Des faits et défaites
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Des faits et défaites
Ça couvait sous les cendres depuis longtemps déjà. Les rumeurs, quelques chiffres et certains comportements ont, épisodiquement, alimenté la théorie que le groupe BAI avait des pratiques pas très orthodoxes qui allaient, un jour ou l’autre, leur – et nous – exploser à la figure. Pensez notamment aux Rs 22 milliards des «One time Endowment Policies», agrémentés de taux d’intérêts extrêmement favorables qui ne sont ni tout à fait un produit d’assurance, ni tout à fait un produit bancaire ! Et puis, le temps passait et il ne se passait rien ! Le bon public, surtout celui qui est le moins bien avisé, se disait que les rumeurs n’étaient, après tout, que des rumeurs et que certaines offres financières faites par la BAI étaient bien trop attrayantes pour y résister. De toute façon, le silence des régulateurs devait, quelque part, agir comme une caution que tout était «korek». Or, pour que l’«industrie de la crédulité» puisse opérer, il faut bien que ceux qui sont censés protéger les crédules contre eux-mêmes soient vigilants et qu’ils assument leurs responsabilités au moment voulu. Il n’en a rien été ! Pourquoi donc ? Ils avaient pourtant été vigoureusement vaccinés par White Dot, Sunkai et compagnie… Et s’il y a eu le «work out» de ces deux dernières années, qu’a-t-on fait avant cela ?
Et puis est survenue la décision de la Banque centrale d’enlever la licence de la Bramer Bank, rapidement suivie par la nomination de «conservateurs» pour la BAI. Dès lors, chacun y a été de son avis. Certains parlent de «chasse aux sorcières» et citent notamment le retrait d’un dépôt de Rs 1,5 milliard du NPF comme un déclencheur du problème de liquidités menant au retrait de la licence bancaire au petit matin du 3 avril. Nous ne connaissons pas tous les faits, mais tous les banquiers connaissent, cependant, les périls d’une trop grande dépendance sur un ou plusieurs clients, fussent-ils déposants ou emprunteurs. Or quand le retrait des dépôts d’un seul client peut mener à l’asphyxie, il faut quand même se poser la question : ce client est-il condamné à ne jamais retirer son argent et est-il donc «prisonnier» ? Ce ne serait vraiment pas normal… On peut, par ailleurs, se demander si ce déposant particulier était bien avisé de faire son dépôt au départ ! Avisé… par qui et pourquoi ? D’autre part, le triplement des «other assets» de la Bramer Bank entre décembre 2012 et 2014 à Rs 4,5 milliards sur des fonds propres de seulement… Rs 1,3 milliard intrigue en milieu bancaire. Surtout quand on y ajoute le fait que le bilan total progresse, lui, de plus de 70 % sur cette période (soit par presque Rs 8 milliards) alors que les fonds propres augmentent de seulement… Rs 112 millions (+9 %).
Le communiqué de la Banque centrale, qui est généralement assez chiche avec les mots, précise, au paragraphe 4 (2 avril 2015), au-delà du problème de liquidités, que «the capital of BBCL is seriously impaired» et ça, c’est du sérieux aussi ! En l’absence de faits précis, on peut suggérer le scénario que l’inspection de la Banque centrale de janvier-février 2015, s’étant focalisée sur le portefeuille d’actifs et notamment sur les prêts où les remboursements étaient en retard de plus de 90 jours, a trouvé nécessaire d’exiger des provisions supplémentaires, affaiblissant du coup le capital de la banque «seriously». On a parlé de Rs 350 millions de capital frais requis. Ce chiffre ne fait cependant pas partie du communiqué du 2 avril 2015 de la Banque centrale. Le drame de l’absence de faits et de chiffres officiels, c’est que l’on est, alors, mené à spéculer, parfois de la manière la plus folle. Ainsi les insinuations qui pointent du nez de «muslim bashing», ce qui est tout simplement irresponsable, sauf si l’on parlait aussi de «hindu bashing» en parlant de Soornack, de Betamax, de Ramgoolam, de Nundlall, de Sungkur, de…. Or, quand on extirpe le mal, on ne peut évidemment pas s’arrêter au profil ethnique ou religieux de circonstance. Être frileux à ce niveau voudrait dire qu’on ne déracinera tout simplement jamais les abus, les arnaques, les gabegies…
Encore faut-il prendre bien soin d’expliquer ce qui est reproché, d’aligner les faits, d’éviter les formules «attrape-tout» et imprécises, style «Ponzi» et d’aligner des preuves, simples, digestes, frappantes.
Quant à l’image nationale, on se serait bien passé, il est vrai, de l’affaire BAI. Mais un pays qui peut, enfin, trouver le courage et les moyens de mettre le bistouri là où il faut pour empêcher la gangrène de se répandre s’en sort généralement bien mieux qu’un pays glandeur et indécis qui, au lieu d’assumer ses responsabilités, aussi gênantes soient-elles, laisse pourrir jusqu’à ce que le château de cartes s’écroule de lui-même.
Comme la Grèce !
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