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Élections : arrêtons de recréer le passé
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Élections : arrêtons de recréer le passé
L’affiche Jugnauth versus Bérenger n’est pas originale dans notre série de scrutins électoraux. Mais la joute de demain est unique et cocasse à la fois. Outsider contre le PTr et le MMM il y a six mois, l’alliance Lepep des Jugnauth est devenue la favorite incontestée – mais contestable – de ces municipales. Élue, elle a utilisé pratiquement tous les leviers à sa disposition pour asseoir son pouvoir : calendrier électoral, ouverture tous azimuts des enquêtes sur le précédent régime, non-révision de l’ordre protocolaire tout en accordant un bureau au leader de l’opposition à l’hôtel du gouvernement, nominations opaques en porte-à-faux aux promesses législatives de transparence et de bonne gouvernance, gel des travaux parlementaires, léger autoritarisme dans le ton et la manière de faire qui, nous dit-on, serait nécessaire dans le présent contexte de nettoyage, etc.
Mais diriger un bloc politique et administrer un pays sont deux choses distinctes, que les Lepepistes découvrent, parfois avec effroi, au jour le jour. Plus d’une fois au cours de l’action gouvernementale, l’alliance Lepep nous a semblé avoir brûlé les étapes. Le rachat annoncé de la Bramer Bank par la State Bank en est la criarde illustration. Vouloir politique (théorique) et réalité économique sont parfois incompatibles. Ces faux pas, provoqués par la va-vite parfois et l’amateurisme souvent, font petit à petit fondre le formidable capital de sympathie dont bénéficie l’alliance Lepep. Plus d’une fois, dans ces colonnes, nous avions crié : «Gare à l’absolutisme.»
Le climat politique dans lequel se jouent ces municipales sort de l’ordinaire car le paysage est décomposé. Le PTr, entraîné dans une tragédie grecque version Ramgoolam-Boolell, ne participe pas aux élections mais demande à voter contre Lepep. Pour qui voter alors ? Ramgoolam, par pudeur sûrement, ne peut pas répondre «votez pour le MMM de Bérenger». En revanche, un ancien ministre de Ramgoolam écarté par la suite, Rama Valayden, appelle, lui, de toutes ses forces (lui en reste-t-il ?) à voter… pour le MMM. Ce changement de cap est aussi déroutant que l’appel de Kavi Ramano à Quatre-Bornes en faveur de l’alliance des Jugnauth.
Ce qui nous ramène au dilemme de l’électeur mauricien : on n’a pas le choix ! Quand on ne vote pas pour Jugnauth, on est obligé de voter pour Bérenger (quand ils ne sont pas en alliance entre eux ou avec Ramgoolam). Cela dure depuis trois décennies. Ceux qui les financent par millions en savent des choses…
Valayden, défenseur du petit peuple, a sans doute raison de dénoncer le règne de terreur qui semble s’instaurer, à en croire des avocats, ou l’arrêt des travaux parlementaires alors que la première année au pouvoir est essentielle pour effectuer le virage et passer des lois pour l’avancement du pays. Dans sa lettre aux électeurs, il a raison de souligner les promesses non tenues de Lepep (dont le salaire minimum, la fin de la manipulation continue de la MBCTV, les mesures contre la carte biométrique), mais nous ne sommes pas d’accord avec la politisation à outrance des municipales pour en faire un enjeu national. Encore moins avec l’invitation à voter pour le MMM faute de mieux. Ce serait voir Maurice coupée en permanence entre deux blocs politiques ; aujourd’hui l’équipe de Jugnauth contre celle de Bérenger. C’est précisément l’erreur à ne plus commettre, surtout si l’on entend renouveler le Jurassic Park mauricien.
Plus que jamais il faut «a new game with new players» pour reprendre un slogan du… Mouvement républicain.
Quant à nous, nous insistons sur la nécessité de revaloriser le rôle du conseiller. Pour mieux gérer les collectivités locales, on ne peut manifestement plus compter sur nos partis nationaux. Ils sont eux-mêmes englués dans des guerres de succession dont les pratiques ne font pas honneur à la démocratie. Il s’agit de se détourner de la politique politicienne et remettre le citadin – pas Bérenger ou Jugnauth – au centre des municipales. Seule cette «dépolitisation» pourrait faire germer une sève nouvelle de politiciens de proximité, et entraîner la promotion de l’administration citadine. Et si le pouvoir politique a besoin d’être rappelé à l’ordre, selon lequel l’électeur demeure l’employeur suprême, les citadins peuvent toujours identifier parmi les candidats indépendants des gens méritants, de proximité et de bonne volonté. C’est si facile de ne pas voter pour ces «pié banann» alignés par les deux principaux blocs qui ne veulent que recomposer le(ur) passé…
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