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Le temps de la transition
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Le temps de la transition
«Les mots sont des pistolets chargés». Cette citation sied parfaitement à la situation particulièrement délicate que vivent actuellement les opérateurs du global business. Pris en tenaille entre les commentaires du ministre des Finances et les attaques répétées de la presse internationale, notamment indienne, et de certaines organisations non gouvernementales étrangères, l’industrie ne sait plus à quel saint se vouer.
Pourtant, la scène était dressée pour redonner un nouveau souffle à l’offshore. C’est du moins ce que l’on pouvait déduire lorsqu’à l’issue de ses travaux, le 3 juillet dernier, le Conseil des ministres indiquait : «(…) the Minister of Financial Services, Good Governance and Institutional Reforms has successfully finalised the pending issues on the Double Taxation Avoi-dance Convention, as well as a protocol amending the Convention between India and Mauritius (…).» Il était même question que le Cabinet donne son aval à la signature du protocole.
Entre-temps, trois mois se sont écoulés mais rien n’a changé. Le flou persiste. Les incertitudes ont augmenté et l’industrie est contrainte de naviguer à vue. Les propos du Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, selon lesquels «l’avenir nous dira si nous avions raison ou tort» alors que le débat faisait rage sur les changements envisagés au traité fiscal entre l’Inde et Maurice, ne sont pas, non plus, très rassurants.
La nervosité s’est accentuée après que le candidat battu et ancien ministre des Finances, Rama Sithanen, est monté au créneau pour dénoncer les concessions faites à la Grande péninsule lors des discussions à New Delhi. Pour cal-mer les esprits, le ministre des Services financiers, Roshi Bhadain, avait réuni les opérateurs regroupés au sein de Global Finance Mauritius et de l’Association of Trust and Management Companies.
Toutefois, l’apaisement aura été de courte durée car nombreux sont les opérateurs qui ne cachent plus leurs appréhensions quant à l’avenir du global business. Certains, et non des moindres, allant même jusqu’à se demander s’il ne faut pas «faire l’éducation de ceux qui ont été récemment propulsés aux affaires» afin de les familiariser davantage avec le fonctionnement de ce secteur, et ainsi évi-ter les incohérences frappantes dont nous avons été témoin depuis le début de l’année.
Il est malheureux de constater que tout ce ramdam autour de la convention fiscale avec l’Inde nous pousse à nous concentrer sur la forme en nous détournant du fond. N’oublions pas qu’il s’agit de l’avenir d’une industrie qui, selon Dev Manraj, secrétaire financier et président de la Financial Services Commission, a contribué à hauteur de 3,6 % du produit intérieur brut en 2014.
Divers points de vue ont été exprimés sur l’orientation future du global business sous la nouvelle administration, mais une chose est sûre : le pays n’est pas en mesure de jouer à la roulette russe avec un secteur qui fournit de l’emploi à des milliers de nos compatriotes.
Déjà, nous avons manqué le train vers plus de substance à plusieurs reprises. Par exemple, nous n’avons pu jusqu’ici doter le pays d’un marché secondaire de la dette. Ne parlons pas des réformes qui sont attendues depuis 2006 dans le secteur financier et dont les conséquences nous pendent au nez avec la faillite des institutions dans l’affaire BAI.
Cela dit, il ne faut pas rêver non plus ! Ce n’est pas parce que nous pensons que Maurice peut devenir une plateforme financière similaire à Singapour que cela va se faire du jour au lendemain. Nous avons besoin de temps ! C’est ce qu’il faut réclamer à Mother India. Une période de transition pour nous permettre de consolider l’ossature de la juridiction mauricienne afin de lui donner les moyens de ses ambitions. Seule une feuille de route définissant clairement la vision et la stratégie du secteur financier nous donnera la crédibilité nécessaire pour engager des discussions franches et sérieuses avec New Delhi.
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