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L’effet pétrole
«Le prix du pétrole restera bas pendant dix ans eu égard au ralentissement de la croissance de l’économie chinoise et l’industrie de schiste américaine qui agit comme un bouchon empêchant toute reprise du cours de l’or noir». Cette déclaration faite lundi par le patron du groupe Vitol, l’une des principales multinationales de négoce de la planète, offre une nouvelle perspective sur un marché caractérisé par l’incertitude.
Selon Ian Taylor, CEO de Vitol, le prix du baril devrait se situer dans la fourchette de $ 40 à $ 60 sur la prochaine décade. Voilà qui devrait refroidir les ardeurs de hedging de certains! De la visibilité, Maurice en a bien besoin. D’autant plus que la facture pétrolière du pays pèse très lourd.
La baisse de prix des carburants à la pompe, réclamée à cor et à cri par la société civile, les opposants au pouvoir et les observateurs indépendants, est finalement intervenue la semaine dernière. Il était temps de se mettre au diapason de l’évolution des prix sur le marché mondial. Car jusqu’ici, les seuls à profiter de cette aubaine étaient le gouvernement, le Central Electricity Board et la State Trading Corporation au détriment de l’économie en général.
Or, pour un pays qui peine depuis des années à se relancer, la dégringolade des cours du pétrole pourrait constituer un levier majeur. Reste à voir si nous saurons en faire bon usage. Déjà, avec l’inflation qui a chuté à 1,3 % en décembre 2015 comparé à 3,2 % un an auparavant, nous avons une idée de l’impact réel de la contraction du prix du pétrole.
L’allègement de la facture pétrolière a également bénéficié à la balance des paiements. Que ce soit en termes absolus ou en pourcentage du produit intérieur brut, le déficit du compte courant s’est réduit au troisième trimestre de 2015. Il était estimé à Rs 5,3 milliards contre Rs 8,3 milliards lors de la période correspondante en 2014. La balance des paiements affichait pour sa part un surplus de Rs 5,9 milliards comparé à Rs 3,4 milliards précédemment.
L’explication de la Banque de Maurice est sans équivoque : «The decline in the value of imports of goods reflected essentially lower value of imports of ‘mineral fuels, lubricants & related products’ as a result of lower oil prices…»
Ayant pris la mesure du poids du pétrole, il est vital, dans la conjoncture actuelle, de veiller à ce que l’effet du fléchissement des cours soit efficacement transféré sur les coûts de production, au lieu de se gargariser d’une baisse de prix à la pompe. Par la même occasion, il est important de savoir ce qui se passe chez nos compétiteurs directs. Avons-nous les moyens de rendre la production locale plus compétitive en agissant davantage sur la facture carburant, notamment dans les secteurs industriels gourmands en énergie ? Car toute intervention en ce sens permettra de rendre nos produits moins chers et plus attractifs.
Pourquoi pas, après tout ? Le Japon et l’Europe ne se sont-ils pas engagés dans une guerre non déclarée de monnaie dans le seul but de rendre leurs exportations plus compétitives ?
Contrairement au stimulus package vampirisant les deniers publics, le pétrole nous offre aujourd’hui une autre forme de stimulus. L’avantage, c’est que le consommateur qui s’est laissé peu à peu gagner par une certaine morosité en profite également. Ce qui devrait relancer la demande. Le taux de consommation est demeuré relativement bas depuis l’éclatement de la crise.
Une meilleure transmission de la baisse du prix de l’or noir au coût de production permettra aussi aux entreprises locales de libérer des ressources pour investir et créer des emplois. N’est-ce pas ce que nous réclamons tous ?
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