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On ne peut pas laisser dire n’importe quoi !
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On ne peut pas laisser dire n’importe quoi !
Dans un État de droit qui se respecte, on ne devrait pas laisser dire n’importe quoi. Bien évidemment, la liberté d’expression est un droit constitutionnel et constitue l’un des fondements d’une démocratie, soit l’une des conditions primordiales de son progrès et, partant, de notre progrès à tous.
Mais cette liberté de dire n’est heureusement pas absolue. Les textes de loi, l’éthique personnelle et le bon sens commun prévoient des limitations pour assurer le respect de l’ordre public et des institutions. Car s’il n’y avait pas de limites aux «kozé ninport» et à leurs producteurs, au final, aucune des libertés ne pourrait réellement s’exercer. Et ce serait le chaos à tous les niveaux.
Prenons le cas de l’avocat de Rakesh Gooljaury, Me Sanjeev Teeluckdharry. Ce membre du MSM dit ouvertement qu’il y avait une décision de la police et du gouvernement pour que l’ancien ami de Ramgoolam (devenu depuis son meilleur ennemi) devienne un «Star Witness» ! Mais depuis quand la police et le gouvernement peuvent-ils décider de l’immunité d’un individu à la place du Directeur des poursuites publiques ?
L’avocat de Gooljaury va plus loin : il impute un agenda politique et une posture revancharde au DPP. Il jette ainsi l’opprobre sur un poste constitutionnel en pleine rue, comme s’il tenait un meeting politique. Puis, il rentre chez lui, tranquillement. Il sait qu’il n’y a personne au sein du MSM ou du gouvernement Lepep susceptible de lui faire la leçon sur la séparation des pouvoirs... Les principes se sont envolés, même si le leader du MSM tente, de temps en temps, de rappeler ses troupes à l’ordre.
La suffisance de Me Teeluckdharry illustre à quel point c’est devenu normal qu’un membre de la majorité gouvernementale crache sur notre DPP. Mes Collendavelloo, Bhadain et Gayan sont parmi ceux qui ont commencé cette campagne de dénigrement contre le DPP. Et depuis, qu’est-ce qu’on n’entend pas sur ce «monstre» constitutionnel ? Par la suite, cette même stratégie de «zet labou» a été utilisée contre l’ancien président de l’Equal Opportunities Commission (EOC) pour des raisons qui leur sont (mal) propres.
Aujourd’hui, le DPP et l’ancien président de l’EOC ont raison de se révolter contre la dérive de ces avocats-politiciens. Ces derniers ne se rendent pas compte qu’ils sont en train de mettre à mal l’image du pays, d’autant plus à la veille du congrès international sur l’arbitrage.
Notre compatriote Salim Moollan, un brillant juriste qui est au-dessus de la mêlée politicienne, a raison de nous rappeler que le Rule of Law (l’État de droit) demeure le thème central du congrès international sur l’arbitrage commercial. «Mauritius leading role in this field further establishes our credentials as a safe and neutral place in the region, subject to the rule of law and promoting the rule of law.»
Mais pour que nous soyons vraiment crédibles aux yeux de la communauté internationale, il faut que les dérapages de nos avocats-politiciens comme Teeluckdharry (qui fait déjà l’objet d’une enquête, tout comme Me Ravi Rutnah, dans le cadre de l’affaire Michaella Harte), soient dûment sanctionnés à la fois sur le plan juridique (Cour suprême) que sur celui de l’éthique (Bar Council).
On ne reconnaît plus un État de droit quand certains individus, en raison de leur appartenance politique, se croient au-dessus des lois et des institutions. Un État de droit existe pour s’opposer à un État où règnent l’arbitraire et le laisser-faire. Les textes de référence insistent que la notion d’État de droit est vide en soi, s’il n’y a pas de sanction. Or, quand la majorité du Conseil des ministres quitte l’hôtel du gouvernement pour aller soutenir le leader du MSM en cour intermédiaire, alors que celui-ci attend son jugement dans un cas de corruption, qui va rappeler à l’ordre l’exécutif ? Quand un ministre promet l’immunité à un businessman, quand le Permanent Secretary de la Bonne gouvernance se permet de narguer l’EOC, quand Collendavelloo insulte quand bon lui chante le DPP, et quand Gayan menace Brian Glover et la presse, ne sommes-nous pas en train de favoriser le règne de l’autorité tyrannique, au lieu de promouvoir la primauté du droit ? Le droit n’est certes pas parfait, mais c’est un socle que l’on ne peut pas déstabiliser sans de très graves conséquences nationales !
Dans son ouvrage-référence «The Rule of Law», Lord ‘Tom’ Bingham rappelle que «belief in the rule of law does not import unqualified admiration of the law, or the legal profession, or the courts, or the judges. We can hang on to most of our prejudices. It does, however, call on us to accept that we would very much rather live in a country which complies, or at least seeks to comply, with the principle I have stated than in one which does not. The hallmarks of a regime which flouts the rule of law are, alas, all too familiar: the midnight knock on the door, the sudden disappearance, the show trial, the subjection of prisoners to genetic experiment, the confession extracted by torture, the gulag and the concentration camp, the gas chamber, the practice of genocide or ethnic cleansing, the waging of aggressive war. The list is endless...»
***
L’Afrique n’est pas un Dumping Ground ! Alors que nous pouvons être fiers d’avoir des Mauriciens de la trempe d’un Salim Moollan dans le domaine du droit commercial international ou d’un Jean Claude de l’Estrac dans celui de la coopération régionale et de l’intégration économique, qui mettent Maurice sur la mappemonde, nous avons aussi des Anil Gayan qui tentent de s’exporter en Afrique. Si quelques rares voix irresponsables et le principal concerné lui-même pensent que la présence de Gayan à l’Union africaine serait une bonne chose, il nous faut, comme un État de droit qui respecte ses pays amis, d’abord dénoncer les travers de Me Gayan (et partant, de son leader Ivan Collendavelloo) comme ministre de la République.
Que ce soit par rapport à ses propos haineux contre Brian Glover et l’EOC (dans le but de protéger Vijaya Sumputh, parachutée dans un département qui tombe directement sous lui), que ce soit par rapport à ses propos discriminatoires contre la presse libre et indépendante ou contre ceux qui sont sous traitement de méthadone, Gayan s’est auto-disqualifié. Si, in fine, l’on peut, cyniquement, estimer que ce serait une bonne chose que le pays se débarrasse des politiciens comme Gayan, ce serait, par ailleurs, afficher tout son mépris pour l’Afrique et les Africains que d’appeler «de toutes ses forces» à une mobilisation pour soutenir Gayan. Non, sérieusement, vous l’imaginez sévir à l’échelle de tout un continent ?
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