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Interrogations

6 juillet 2016, 13:01

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L’institut des statistiques maintient le cap. Maurice réalisera une croissance de 3,9 % en 2016. Certes, se rapprocher de la barre psychologique de 4 % fait rêver, mais la projection ne manque pas d’interpeller dans le présent contexte économique.

Ce qui est tout à fait compréhensible dans la mesure où, à diverses reprises dans le passé, des prévisions initiales se sont révélées trop optimistes, voire surréalistes. D’où l’incrédulité eu égard aux estimations pour cette année, alors que le second semestre qui démarre voit l’apparition de vulnérabilités nouvelles avec le vote des Britanniques en faveur de la sortie de leur pays de l’Union européenne.

Pourquoi s’acharner à placer constamment la barre très haut, sachant qu’on sera amené à revoir nos ambitions à la baisse ? Tel a été le cas en maintes occasions. Un simple exemple : en mars 2015, l’institut des statistiques annonce une croissance de 4,1 % pour l’année, bien que l’expansion du PIB ait tourné autour de 3,5 % en 2014 et malgré le fait qu’il n’y ait pas eu de retournement de conjoncture. Trois mois plus tard, ses analystes revoient leur estimation à la baisse à 3,8 %, pour l’abaisser davantage à 3,6 % en septembre avant de descendre à 3,4 % en décembre. Ils reviendront à la charge en mars 2016 pour dire qu’au final, l’économie mauricienne n’a crû que de 3,1 % en 2015.

Il est évident que le changement de l’année de base, comme cela a été le cas récemment pour la comptabilité nationale, permet de cerner certaines évolutions et de refléter au mieux la réalité économique. Ainsi, le passage à la base de 2013, comme l’explique Statistics Mauritius, a eu pour effet de relever le niveau de croissance sur la période 2013-2016. L’expansion de la valeur ajoutée brute (VAB) calculée par le bureau des statistiques passe donc respectivement de 3,2 %, 3,4 % et 3,1 % sur la base de 2007 – de 2013 à 2015 – et à 3,4 %, 3,6 % et 3,0 % avec le changement de l’année de référence. Est-ce suffisant pour postuler pour un rebond aussi significatif à 3,9 % en 2016 ? D’autant plus que la VAB a crû de 3,0 % en 2015 ? Des questions qui ne manqueront pas d’intéresser les économétriciens.

Placés dans la perspective globale, certains indicateurs pourraient également susciter des interrogations. À l’instar des exportations de biens et services qui se sont contractées de 5,9 % au premier trimestre mais qui, sur l’année, devraient croître de 4,8 %. Or, la dépréciation de la livre sterling après le référendum en faveur du Brexit ne manquera pas d’impacter les recettes, le Royaume-Uni étant le premier acheteur de produits mauriciens. Idem pour le tourisme. La destination mauricienne coûtera plus cher. Faut-il le rappeler, Maurice accueille plus de 300 000 touristes britanniques chaque année.

Il sera également nécessaire d’être très attentif aux objectifs fixés sur le plan de la consommation surtout face à la morosité ambiante que révèlent les données du Top 100 Companies. À titre d’exemple, le chiffre d’affaires consolidé des sociétés dans le secteur de la grande distribution a plongé sous la barre des Rs 20 milliards pour se fixer presque au même niveau qu’en 2013.

Autre problématique à résoudre : la relance de l’investissement. Jusqu’ici, nous avons assisté à un déclin systématique de la formation brute de capital. De 2013 à 2015, la contraction a été respectivement de 3,3 %, 6,0 % et 5,2 %. Selon Statistics Mauritius, un revirement devrait intervenir cette année, entraînant une croissance de 6,4 % dans la formation brute de capital. Reste à voir comment ! Car le public et le privé n’arrivent toujours pas à booster leurs investissements.

Les chiffres des cent premières compagnies témoignent une nouvelle fois de la période difficile que traverse le secteur de la construction. De Rs 30 milliards en 2014, les revenus totaux du BTP ont reculé à Rs 25 milliards l’an dernier.

Même l’État ne parvient pas à augmenter les dépenses d’investissement. D’où justement le niveau maîtrisé du déficit budgétaire.