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Mayotte : un couac diplomatique
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Mayotte : un couac diplomatique
«On ne va pas se laisser faire !» Depuis ces derniers temps, cette phrase revient comme un leitmotiv chez l’intellectuel comorien. C’est un discours de combattant. «Expliquez-nous comment, depuis 1979, les Comores n’ont jamais pu organiser les Jeux des îles ? Où est la coopération régionale dont on se targue tant et pourquoi vous, à Maurice, vous en êtes à vos troisièmes JIOI comme pays hôte ?» me demandaient plus d’un interlocuteur comorien, lors d’un passage sur l’archipel en novembre 2015.
L’Union des Comores comprend la Grande Comore, Mohéli et Anjouan – et aussi Mayotte selon les Comoriens. Avant même leur indépendance (1975), ceux-ci sont en litige avec la France sur le dossier mahorais. C’est un différend bilatéral qu’il faut bien évidemment trancher en se fondant sur le droit international, mais ce différend ne devrait pas, entretemps, entraver le travail de rapprochement qu’effectue, avec beaucoup de tact et de challenges, la Commission de l’océan Indien depuis les années 1980.
Si les relations difficiles entre les Comores et la France ont éclaté, à nouveau, au grand jour lors des derniers Jeux des îles à La Réunion, elles remontent en fait au XIXe siècle. Mais mercredi soir, au Labourdonnais Hotel de Port-Louis, lors de la passation de pouvoir entre le SG mauricien, Jean-Claude de l’Estrac, et son successeur, SE Hamada Madi Bolero, l’assistance, restée debout, a bel et bien senti la tension diplomatique entre la présidence française de la COI et le nouvel homme fort du secrétariat général, le Comorien Bolero.
Certes, on savait qu’en raison du litige territorial entourant Mayotte, la cohabitation entre le successeur de De l’Estrac et les autorités françaises n’allait pas être du gâteau. En prenant du temps, lors de son premier discours, pour clarifier son action à la tête de la COI et pour souligner l’importance du droit international et du soutien des pays membres pour résoudre le problème mahorais, le nouveau SG s’est maladroitement coiffé d’un chapeau bilatéral et s’est, ainsi, éloigné de l’habit de l’«Indianocéanien».
Pourtant, il existe un principe établi et pratiqué au sein de la COI : on n’y discute pas des contentieux bilatéraux. Imaginez-vous, si la COI était un forum pour cela et que Maurice y apportait le dossier Tromelin, et Madagascar son litige autour des Îles éparses, et que les Français continuaient à regarder dans le rétroviseur de l’histoire et voient toujours les Comores comme «l’archipel des sultans batailleurs» (terme jeté comme une blague mercredi, lors des discours officiels)
La COI traversera sans doute l’une de ses plus graves crises si le climat ne s’améliore pas et si on favorise les conflits au lieu des rapprochements. Pour reprendre les mots de De l’Estrac – premier (et dernier ?) Mauricien à prendre la tête de la COI – il nous faut reconnaître le chemin parcouru. «Ensemble, nous avons fait émerger sur la scène mondiale cet espace unique de peuples divers mais solidaires, partageant les valeurs de solidarité, gestionnaires apaisés de leurs diversités, tissant inlassablement des liens de coopération dans une ambition commune devenue une communauté de destin.»
***
En attendant que des diplomates et des politiciens règlent le problème mahorais, ils sont plus de 10 000 Comoriens à mourir dans des kwassas (bateaux-taxis) qui se renversent entre les 70 km qui séparent Anjouan et Mayotte (devenue un eldorado pour un nombre croissant de Comoriens). Il ne se passe plus une semaine sans que des morts ne remontent à la surface, mais on en parle moins que les migrants syriens, qui meurent en traversant la Méditerranée. Cela pourrait changer avec M. Bolero – qui veut focaliser sur la sécurité humaine – à la tête de la COI, mais est-ce son rôle comme SG, ou comme prochain dirigeant des Comores ?!
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