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Le Japon nous convie chez nous !

27 août 2016, 07:50

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C’est ce matin que s’ouvre la sixième Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD-VI). Quelque 10 000 délégués sont présents à Nairobi, dont le président Uhuru Kenyatta, le Premier ministre japonais et celui de Maurice. Fait notable de cette manifestation d’envergure : c’est bien la première fois que la conférence, qui existe depuis 1993, se tient hors du Japon – et en Afrique.

Cela veut beaucoup dire et démontre que l’Afrique, qui joue un rôle stratégique grandissant dans l’économie mondiale, sera, une fois encore, sous les feux des projecteurs. Et on dira une nouvelle fois que le continent passe du statut de continent assisté à celui de partenaire convoité par les puissants de la planète.

L’initiative japonaise doit être mise sur la toile de fond d’une compétition internationale pour accélérer les échanges de biens et services avec l’Afrique. Les États-Unis, la Chine, l’Europe, l’Inde, les pays arabes – ils veulent tous intensifier les échanges avec les Africains et évoquent des projets de développement, de paix et sécurité humaine. Ce faisant, ils permettent de se focaliser sur les besoins de l’Afrique en matière de développement, et poussent tout un chacun, multinationale, pays comme simple entreprise, à développer sa stratégie africaine.

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Mais l’Afrique n’est pas un bloc qu’on peut conquérir comme on ferait un business plan sur papier. C’est un concept purement géographique qui renvoie à de multiples régions hétéroclites et à des peuples hétérogènes. Les médias internationaux présentent surtout deux facettes de notre continent. Côté pile : une série de discours techniques sur cette terre d’opportunités économiques et commerciales ; ce vaste continent peuplé surtout de jeunes à  l’opposé de l’Europe et qui connaît des taux de croissance macro-économique parmi les plus forts du monde ; cette partie du globe si riche en  matières premières qui attire les multinationales pétrolières et minières. Et côté face : toute la détresse humaine d’un continent qu’on a durablement pillé, et qu’on continue de piller, un demi-siècle après les indépendances africaines.

Les sommets Europe–Afrique, États-Unis–Afrique, Inde–Afrique, Chine–Afrique et Japon–Afrique, qui réunissent pratiquement tous les chefs d’État africains, soulignent, tous, le changement de paradigme. Au lieu d’une approche bilatérale, les initiatives,  relatives au commerce et au développement, ambitionnent d’impacter sur le continent dans son ensemble. En d’autres mots, moins d’aide et davantage de commerce et d’investissements.

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J’ai eu la chance, dans une précédente vie, de voyager et de travailler dans plus d’une douzaine de pays en Afrique. Ces voyages m’ont permis de voir de mes yeux que le continent est différent d’une sous-région à une autre, d’une ville à une autre. Je l’ai déjà écrit : toute généralisation à propos de son environnement dynamique serait simpliste, voire inappropriée. De même, les crises politiques et les conflits qu’on recense sont caractérisés par une diversité aussi grande que l’Afrique elle-même. Et malgré toute l’attention internationale, les conflits éclatent de partout...

Dans la presse, on tend à focaliser sur des pays, et à ramener les conflits africains à des échelles nationales. Or un vaste éventail de ces menaces sont d’ordre transnational et sont certainement interconnectées. Aussi, comme on le sait, l’histoire, qui n’a pas été tendre envers les pays d’Afrique, a laissé des cicatrices béantes, aujourd’hui des vulnérabilités.

Tout cela complique les stratégies qu’un petit pays comme Maurice par exemple (qui n’a aucune expertise dans le domaine sécuritaire) aimerait développer.

Par exemple, l’Afrique est aussi et surtout une plaque tournante en termes de trafic de drogue, d’armes à feu, de personnes... et les relations entre civils et militaires sont cruciales pour la stabilité de la plupart des pays africains. Dans le temps, l’armée servait à protéger les régimes en place au lieu du territoire. Les exemples de dysfonctionnement abondent. Il y a des millions d’armes  à feu en libre circulation sur le continent. La plupart sont des armes de petit calibre aux mains des mouvements rebelles, souvent pas répertoriés.

Les experts qui se penchent sur l’Afrique sont quasi unanimes. Pour résoudre les conflits africains, il faudrait des stratégies multidimensionnelles, surtout celles qui sont limitées par les règles du droit, et qui sont mises en œuvre par les dirigeants africains eux-mêmes et soutenues sans relâche par les partenaires internationaux.

Le drame de l’Afrique, c’est que le continent a encore besoin des autres pour se retrouver entre voisins. Aujourd’hui c’est le Japon qui convie la grand-messe alors que l’Union africaine, elle, s’enlise…