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Démocratie en lecture double

4 septembre 2016, 09:00

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Démocratie en lecture double

 

 

 

M.Yaasin Pohrun est une des 75 personnes qui font, un jour, acte de candidature suite à une annonce du ministère des Services financiers. Ce dernier est à la recherche d’un attaché de presse. Il n’y avait pas d’attaché de presse jusque-là. On ne sait pas comment se passent les interviews ou le «short listing», mais nous sommes dans un pays où le gouvernement en place prône la méritocratie. Mieux, il a été élu sur la base d’un manifeste électoral qui affiche explicitement que (commandement nº 12, page 8) : «Tout citoyen sera libre de démontrer publiquement son appartenance politique sans crainte de sanction, de discrimination, ou de harcèlement de la part du gouvernement.» M. Pohrun est, en finalité, choisi comme attaché de presse du ministre Bhadain. La nomination est entérinée par le PMO. Personne ne sait si M. Pohrun a une «appartenance politique», mais il a été, au temps du gouvernement précédent, l’attaché de presse du ministre Mohamed. Selon le PM, M. Pohrun «ankor kominik» avec Shakeel Mohamed. On ne saura pas si les deux parlent d’«appartenances politiques» ou pas du tout, mais le PM, prenant son manifeste électoral en grippe, décrète qu’il faut «tir li ek prend ene lotte».

 

Quand réalisera-t-on que nommer, sur une base de «nou banne», est mathématiquement OBLIGÉ de créer beaucoup plus d’électeurs mécontents que le système de «méritocratie» ? Sans compter qu’il mènera inévitablement à plus de situation de «choc» et de «fou dehors» !

 

Lecture nº 1 : Nous avons un gouvernement qui croit au mérite.

Lecture nº 2 : Nous avons un chef de gouvernement qui n’y croit pas.

Question annexe : Quand réalisera-t-on que nommer, sur une base de «nou banne», est mathématiquement OBLIGÉ de créer beaucoup plus d’électeurs mécontents que le système de «méritocratie» ? Sans compter qu’il mènera inévitablement à plus de situation de «choc» et de «fou dehors» !

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Ms Dilma Rousseff a été destituée. Motif ? Elle aurait manipulé le budget pour qu’il apparaisse moins déficitaire qu’en vrai ! C’est une faute, mais elle n’est sans doute pas le premier dirigeant d’un pays (ou d’une compagnie d’ailleurs), qui souhaite que ses «résultats» et son bilan soient aussi chouettes que possible ! Ceux qui auront voté contre elle au Sénat étaient-ils motivés par la recherche de la vérité et d’une intégrité parfaites à la tête de l’État ou en ont-ils fait une question d’opportunisme politique, la droite saisissant ainsi l’occasion d’être à la tête du pays alors qu’elle avait raté de peu de prendre le pouvoir en 2014, aux élections générales ? D’autant que nombre d’entre eux sont loin, très loin, d’être des modèles d’intégrité : 37 des 65 membres du Sénat ayant voté la destitution de Ms Rousseff sont poursuivis pour corruption ou autres crimes, selon une enquête du Los Angeles Times…

 

Lecture nº 1 : Un pays de droit.

Lecture nº 2 : Un coup d’État légal.

Question annexe : Mais comment est-ce que la démocratie «produit» (ou laisse passer) autant de pourriture ?

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Madame Soornack et M. Gooljaury ont fait des affaires. On leur a ouvert des portes qui ne s’ouvrent pas pour le commun des mortels. Madame Soornack, par exemple, installée à l’aéroport dans son Airway Coffee Shop, n’a pas du tout été inquiétée, pendant des mois et des années, pour payer son loyer. Plusieurs dizaines de millions de roupies d’impayés se sont ainsi accumulées. On ne sait pas si les comptes (avec loyers) indiquaient du profit – possiblement pas, puisqu’elle a réclamé et même obtenu une petite baisse de loyer – mais le compte «cash» se portait plutôt bien. Évidemment ! M. Gooljaury, de son côté, a obtenu les faveurs de la MPCB, pour des prêts de plus de Rs 500 millions, pour qu’il développe ses «bizness» divers. On croit savoir que le remboursement desdits prêts n’a jamais été une priorité. M. Gooljaury et Madame Soornack se sont aussi retrouvés dans les clauses contractuelles qu’il fallait dans l’affaire Dufry/Frydu. Un petit bail du domaine public n’est pas paru incongru non plus.

 

Lecture nº 1 : Démocratisation de l’économie.

Lecture nº 2 : Démocratisation de l’économie (pour les miens seulement).

Question annexe : Et si l’on démocratisait, pour mieux, l’accès au leadership politique du pays?

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Il y a eu des élections au Gabon. M. Ali Bongo, fils d’Omar Bongo, a «gagné» ces élections selon la commission électorale, par 5 594 voix sur un collège électoral de 627 805. M. Bongo avait 60 000 voix de retard avant l’annonce des résultats de la dernière région dont les résultats n’étaient pas encore connus, c’est-à-dire. son fief dans le Haut-Ogooué. Il y remportait finalement 95,5 % des voix à un taux de participation de plus de 99 %. Le candidat de l’opposition, M. Jean Ping, dont la première épouse est Pascaline, fille d’Omar Bongo et loin d’être, lui-même, blanc comme neige, crie au vol de l’élection. Il cite de nombreux cas où les résultats publiés dans les 2 500 bureaux de vote contredisent les résultats consolidés au niveau des régions. Le Gabon, producteur de pétrole, a un PNB/tête de 10 735 $ en 2015 (Maurice était à 18 333 $).

 

Lecture nº 1 : Une démocratie produit un vainqueur sur le fil.

Lecture nº 2 : Deux «fami» pour une seule assiette.

Constat annexe : Nous avons bien de la chance d’avoir ici un système électoral fiable et respecté ! Même si notre choix est souvent limité à la peste et au choléra…

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Le temps de digérer tout cela, de décider si le monde est «foutu» ou pas, on peut presque comprendre ceux qui choisissent, plutôt, de like Ibrahimovic, de se passionner pour une éclipse du soleil ou d’aller faire du shopping, puisque l’on est en fin de mois. Ce faisant, cependant, on cédera le terrain à ceux qui, sous la prétention de nous représenter, ne se soucient guère que de leur intérêt, de leurs besoins, de leur écuelle et masquent bien leur jeu sous des prétentions tonitruantes, mais non agissantes, de… démocratie ! Il est donc de notre devoir de rester optimiste, de faire plus que de simplement s’indigner et de croire que l’on peut encore aspirer à mieux ! Difficile certes, mais cependant capital ! Comment, en effet, préserver la démocratie, si les démocrates… s’éclipsent ?