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Culture et contre-culture : Kas Poz ek Kas Pake !

1 décembre 2016, 07:14

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«Plus jamais on ne dira – ni même ne pensera – que la culture est le parent pauvre. Pauvre de nous, si nous tournons le dos à tant de richesses. Qui parfois ne coûtent rien. Si ce n’est la valeur inestimable du temps passé à les imaginer (…) Pas zis kas poz. Kas pake», souligne, fort justement, dans sa note liminaire, notre collègue Aline Groëme-Harmon, dans le premier numéro de Kas Poz, magazine culturel de La Sentinelle, dans les kiosques depuis hier. Une nouvelle plateforme citoyenne que je vous recommande.

Nous entrons de plain-pied dans un mois festif où la culture et ses lumières seront au rendez-vous, de nuit comme de jour, à chaque coin de rue. La culture est partout capitale, dans toutes nos sphères, même quand nous ne la voyons pas avec des yeux écarquillés, même quand elle s’exprime sans tam-tam médiatique, sans gros budget, sans jeux de scène ou de lumière. Elle reflète l’image de notre société pressée, prise dans un engrenage mécanique, industriel et sponsorisé qui, bien des fois, nous dérive de ce qu’il y a de plus pré- cieux en nous, de ce qui touche notre âme et celle des artistes.

On s’arrête, de temps en temps, sur une manifestation. Et une manifestation, toujours, chasse l’autre manifestation. Une chanson peut nous faire oublier la précédente, pareil pour les textes, journaux, livres. Mais la pensée, elle, s’enracine, durablement. Le rythme, lui, résiste et réside. Les deux s’impriment, avec une encre indélébile, dans notre mémoire collective. La mémoire conserve avec fidélité des traces secrètement imprégnées. «Ce que les doigts touchent, la main veut s’en saisir/Le poète n’est pas voleur de feu, il est incendie/L’amant n’est pas amoureux, il est consumé/L’univers a fait la vie à son image, la vie a besoin de la mort/C’est le bourgeon nouveau qui fait tomber la feuille ruinée», écrivait jadis un poète 100 % mauricien.

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La culture est un terme fourre-tout. Entre du talent pur comme un musicien qui décroche le Nobel en littérature et l’affairiste de certains qui voient la culture surtout comme une machine à fric. La culture renvoie à de multiples significations pour différentes personnes. On parle de culture de travail tout comme de culture de tabac, par exemple. En bref, culture est cet ensemble, pas toujours cousu, des connaissances et des pratiques, des savoir-faire, des traditions, coutumes, costumes, propres à un territoire ou une société (famille ou individu) qui se transmet socialement et médiatiquement. Et elle finit par conditionner, dans une large mesure, les comportements individuels. D’où l’importance de nourrir une contre-culture qui foisonne déjà (il y a pas mal de galeries d’art, d’opéras, d’écrits et d’expos malgré le désinvestissement ou le désintéressement des autorités) – par exemple écouter la voix des artistes pour changer la donne politique qui finit, hélas, par impacter sur tout, sur notre culture, polluant nos esprits et empêchant l’émergence laborieuse d’un mauricianisme assouvi.

Par contre-culture, on ne veut pas vraiment dire «mouvement», terme fréquemment utilisé dans les années 60 en substitution à contre-culture. Pour nous, la contre-culture n’agit pas comme un opérateur idéologique mais désigne surtout cette expérience commune qui tend vers une alternative à la société telle qu’elle est organisée. Mais comme la culture, elle-même, comprend des contours imprécis, il devient assez difficile de définir et de promouvoir la, ou plutôt une, contre-culture, surtout sur une échelle globaliste et non conflictuelle. Si la culture est consensus, la contre-culture est alors une alternative au consensus. Kas poz ek kas pake !

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1968-2018. De concert avec Kas Poz, toutes les publications de La Sentinelle préparent d’ores et déjà la célébration des 50 ans de l’Indépendance de Maurice, comme d’autres groupes, d’ailleurs, qui contribuent au socle des valeurs mauriciennes. Plusieurs thèmes ont retenu notre attention, dont l’évolution de la langue créole. Avec notre ami Barlen Pyamootoo, génial écrivain du terroir, nous nous intéressons aux mots et expressions et sirandanes qui ont disparu ou sont en voie de l’être et d’autres, qui naissent sur l’express ou ailleurs, peu importe…

Ces mots sont liés à des voitures (Minor), gâteaux (poutou, ounde), cigarettes (Matelot), bijoux (batana), vêtements et sous-vêtements (horni ou lamores), prénoms (Niclès), etc. Des expressions récentes, parfois énigmatiques, qui épousent l’évolution de la société : bez ar bas ou kas poz ou kas pake !