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La tyrannie d’une minorité
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La tyrannie d’une minorité
La démocratie permet l’alternance du pouvoir. Au Ghana, avec 53 % des voix, le chef de file de l’opposition Nana Akufo-Addo vient de remporter l’élection présidentielle contre le président sortant John Dramani Mahama. Quelque 10,7 millions d’électeurs se sont rendus aux urnes. Mahama, qui était en visite chez nous en août 2015, et avec qui l’État mauricien avait conclu quelques accords bilatéraux, a concédé sa défaite. En bon démocrate, il a appelé Nana Akufo-Addo pour le féliciter de sa victoire à la présidentielle. En l’espace de quatre ans, le Ghana est passé du statut d’élève modèle en Afrique à celui de mauvais élève. L’inflation est galopante, l’endettement de l’État (à plus de 60 % du PIB) et le déficit budgétaire empirent, mais Mahama mentait et disait que les perspectives étaient bonnes. Le peuple ne l’a pas écouté.
Autre scrutin, autre contexte. En Gambie, en revanche, le président sortant Yahya Jammeh, au pouvoir depuis 22 ans, a annoncé vendredi qu’il ne reconnaissait pas les résultats de l’élection du 1er décembre. Cette déclaration intervient une semaine après qu’il a publiquement reconnu sa défaite face à l’opposant Adama Barrow, le chef de file de la coalition de l’opposition. Selon la Commission électorale de la Gambie, M. Barrow l’a emporté avec 45,6 % des voix, devant M. Jammeh à 36,7 %. «J’avais loyalement accepté les résultats, en croyant que la Commission électorale était indépendante, honnête et fiable, je les rejette dans leur totalité», a déclaré M. Jammeh, dénonçant des «erreurs inacceptables» de la part des autorités électorales de son pays. Ce refus de reconnaître sa défaite bouleverse la situation en Gambie. Le Sénégal, pays voisin et respecté en Afrique de l’Ouest, comme l’était le Ghana hier, fait aujourd’hui pression pour que Yahyah Jammeh respecte le choix démocratique et qu’il organise la transition pacifique du pouvoir. Ce qui n’est pas gagné.
À cause des acteurs comme Jammeh, qui s’accrochent au pouvoir, la démocratie se retrouve en crise. Pas que chez nous, où le passage de témoin entre Sir Anerood et son fils pose un problème de validation démocratique, mais un peu partout à travers le monde. Les récents événements qui nous secouent pointent, au moins, vers une faille du système démocratique : le citoyen, comme vous et moi, est de plus en plus réduit à un simple électeur, que l’on consulte chaque cinq ans, mais qui entre-temps n’a pas vraiment voix au chapitre. La conduite des affaires se fait, en général, sans nous. Le sentiment est que l’on assiste impuissant à un système bloqué, coupé des électeurs.
La politique a été prise en otage par nos politiciens. C’est le constat de plus en plus partagé. Avec Internet et les réseaux sociaux, l’exigence démocratique est plus grande qu’avant. Et les critiques contre notre système électoral sont légion. Mais malgré les critiques, rien ne change positivement. Le pouvoir d’un changement reste concentré entre les mains de quelques personnes qui contrôlent l’accès aux partis politiques. Et les électeurs n’ont, de ce fait, pas de prise sur le réel. On peut, à la rigueur, alterner l’équipe au pouvoir, comme on l’a fait exactement deux ans de cela. Mais on ne peut pas faire plus si la nouvelle équipe fait pire que l’ancienne. Car nous subissons la tyrannie d’une minorité d’entre nous qui profite du système électoral et qui ne va pas remettre en cause notre démocratie représentative et nos dynasties politiques...
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