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Halte à la culture d’impunité !

29 avril 2017, 07:18

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Thomas Jefferson: «When injustice becomes law, resistance becomes duty.»

Il y a, peut-être, une lueur d’espoir pour nous Mauriciens et le reste des Africains. La justice a réussi à surmonter les traditionnelles failles du système kafkaïen. La récente condamnation de Hissène Habré, 74 ans, ancien dictateur sanguinaire du Tchad (1982-1990), marque un tournant dans notre histoire contemporaine. Et redonne espoir à ceux qui constatent que l’impunité des riches et des puissants est devenue légion.

C’est bel et bien la première fois qu’un ancien chef d’État, trouvé coupable dans son pays (bilan de sa répression : plus de 40 000 morts), est jugé par une juridiction africaine dans le pays (ici le Sénégal) où il avait trouvé refuge. Cette action en justice aura été longue et laborieuse. Les pauvres familles des victimes ont dû se battre contre le système ; un système qui protège les riches et qui est maintenu dans sa forme actuelle par des avocats, souvent véreux, qui profitent du commerce de la guerre ou des sous de la corruption institutionnalisée.

En hommage à leurs proches assassinés, souvent pour des raisons politiques, par leur obstination et leur obsession de la justice, des pauvres ont pu faire juger un dictateur en Afrique – sans passer par la Cour pénale internationale (CPI), accusée d’être partiale, car regardant uniquement vers l’Afrique en tolérant les tyrans des pays du Nord, qui pourtant manient l’arme nucléaire.

Il nous faut, en fait, saluer le rôle de Macky Sall, président du Sénégal, qui a tout fait pour que ce procès ne capote pas. Sous son leadership, l’Afrique a pu démontrer, cette semaine, que l’État de droit n’est pas qu’un concept sur papier. Et que si la CPI n’est pas acceptée en Afrique, ce n’est pas pour autant que les Africains cautionnent l’injustice – et l’impunité.

Du temps d’Abdoulaye Wade, le dossier Habré ne progressait pas. Il se perdait dans les méandres des procédures. Mais Macky Sall, une fois au pouvoir à Dakar, a redonné l’espoir à tout un continent. Certes, l’enquête sur le «septembre noir» de 1984 au Tchad est incomplète – de nombreuses personnalités n’ont pas été inquiétées, à commencer par le président actuel, Idriss Déby, qui était le chef de l’armée pendant les massacres –, mais c’est un signal fort néanmoins. Un premier pas.

Et déjà, à travers le continent, les défenseurs des droits humains commencent à se mobiliser pour lancer des procédures judiciaires contre les dictateurs (il y en a !).

Le temps de l’impunité pour les bourreaux de leur peuple est-il terminé ?

Va-t-on leur emboîter le pas, un jour, à Maurice pour que les familles qui nous dirigent nous rendent, enfin, des comptes pour l’argent qu’elles se font sur notre sueur ?

 

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La justice d’un pays est le reflet de son niveau de démocratie.

Beaucoup d’entre nous sont surpris de voir les charges contre les anciens proches du pouvoir ramgoolamien – y compris contre ce dernier – tomber, une à une, comme des mouches. Sont-ils pour autant irréprochables ou est-ce le système de justice de notre pays qui encourage l’impunité en raison de l’amateurisme ambiant (de la police jusqu’au bureau du DPP) ?

La question mérite d’être posée, alors que des milliers de justiciables, qui ne peuvent pas se payer des Gavin Glover, des Yousuf Mohamed ou des Rama Valayden, attendent depuis plus de 15 ans que leurs charges provisoires soient rayées… Combien de dossiers ont été fermés en raison du manque de preuves ?

D’où le cynisme et la colère des citoyens, qu’on peut observer sur les réseaux sociaux. Notre société perd tranquillement confiance en ses élus et ses institutions (peuplées par les politiques), mais aussi envers les instances censées les protéger contre les abus de ces derniers. Sommes-nous conscients qu’à chaque acquittement, c’est le pays qui glisse un peu plus dans l’incompréhension ?

Quand le système judiciaire faillit à sa mission de redresser les torts causés aux innocents par les coupables, les citoyens perdent confiance en la justice. Avant Habré, personne ne pensait qu’un dirigeant pouvait être condamné à vie !

L’impression d’une «culture d’impunité» plane aujourd’hui dans l’air. Allez demander aux victimes de la BAI – qui attendent qu’on leur rembourse leur argent – et ils vous diront ce qu’ils pensent de notre système de justice. C’est clair qu’ils ne font plus confiance à ceux qui leur ont fait des promesses mirobolantes. Parmi eux, il y en a deux : un qui montre son postérieur et l’autre qui, apparemment, aime bien qu’on «lick» ses parties… Infect, ce duo, même s’ils sont aux antipodes aujourd’hui !

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 Que fait l’opposition ? Hé ben, quand vous avez un leader de l’opposition comme Xavier-Luc Duval, qui se félicite pour ses PNQ molles, mais qui prend grand soin de cacher Thierry Henry de sa conférence de presse d’hier, et qui pense fermement qu’il fait du bon boulot (c’est sûrement son fils qui lui chuchote cela à l’oreille) alors qu’il n’a d’autre choix que de s’autocensurer au Parlement (car on mangeait dans la même cuisine en 2014, 2015 et 2016), quand on a un tel politicien, on n’a pas grand espoir… je l’avoue. Duval attend son heure pour aller retrouver Ramgoolam. On verra bien…

Certes, à chaque fois, il y a sanction de l’opinion publique, par exemple sous cette rubrique. Mais l’opinion a une espérance de vie si courte que les principaux concernés n’ont qu’à bien se tenir et se faire oublier pour ensuite poursuivre leur carrière comme si de rien n’était. Demandez la formule à notre présidente ou à Ivan Collendavelloo, les amis de Sobrinho – et ils vous diront comment faire.

 Il y a de fortes chances que l’absence de sanctions et de réprimandes nourrisse le cynisme des citoyens, jusqu’à ce que le vase soit trop plein un jour… Entre-temps, comme contre-pouvoir, on veillera au grain ! Et on écrira pour que les écrits restent et s’impriment sur la conscience populaire.