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Entre la Grande-Bretagne, l’Espagne et le Pakistan
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Entre la Grande-Bretagne, l’Espagne et le Pakistan
Comme nous le rappelait notre collègue Lina Myte Pascal, dans une excellente chronique, «Dumb Mauritians», il importe de contextualiser afin d’éviter de faire des analyses superficielles, ou irrationnelles, quand on souhaite faire des parallèles entre, disons, Maurice et l’Europe. Tout comme il est important de tirer des enseignements d’ailleurs puisque, souvent, les mêmes causes produisent des effets similaires. Cette semaine, nous faisions un parallèle entre l’affaire MedPoint et le sort de Pravind Jugnauth devant le Privy Council, et l’affaire Gürtel et le Premier ministre espagnol, Mariano Rajoy. Notre point, au-delà du fait si l’un ou l’autre chef du gouvernement est reconnu coupable ou pas : le seul fait d’avoir à répondre sous serment devant un tribunal, alors que l’on dirige un pays et que l’on doit projeter une image intègre, surtout dans le cadre d’une affaire de corruption, bafoue, à bien des égards, l’autorité du Premier ministre, quel qu’il soit. Cela se vit en Espagne, cela se ressent aussi chez nous. Toutes proportions gardées.
Le Pakistan, pays de 200 millions d’âmes où les militaires s’ingèrent carrément dans la gestion du pays, pourrait aussi générer quelques enseignements utiles. Certes, les données ne sont pas les mêmes, mais il importe qu’on analyse les événements qui ont amené, en fin de semaine, la Cour suprême pakistanaise à ordonner la destitution du Premier ministre Nawaz Sharif pour (tiens, tiens, tiens… encore une fois !) corruption ! À ce stade, les analystes ne savent pas si c’est un bon signe d’une démocratie vigoureuse, ou un mauvais signe d’un coup politique porté par les militaires ! Cela pourrait être un mix des deux.
Qu’à cela ne tienne, il nous faut aussi souligner que cette situation, même si pas exceptionnelle (au Pakistan aucun PM n’a pu compléter son mandat de cinq ans depuis l’Indépendance en 1947), le départ de Nawaz Sharif (une troisième fois après des accusations similaires en 1993 et un coup d’État en 1999) est le fruit d’un travail d’investigation journalistique, soit les fameux Panama Papers. Selon le Consortium des journalistes d’investigation, auquel nous appartenons, trois des enfants de Sharif posséderaient, selon des prête-noms, plusieurs appartements luxueux à Londres. Le décalage entre ces signes extérieurs de grande richesse et les revenus du PM était trop grand pour que la justice ferme les yeux, au nom d’un intérêt supérieur de l’État. Et c’est ainsi que la Cour suprême a demandé au président du Pakistan de prendre les dispositions afin d’assurer la poursuite de l’ordre démocratique après que le Premier ministre a été sanctionné.
Chez nous, la Cour suprême a invalidé la condamnation pour corruption de Pravind Jugnauth par la cour intermédiaire et a, par la suite, accédé à la requête du DPP pour que l’affaire soit entendue à nouveau, cette fois-ci au niveau des Law Lords britanniques. Un procès qui déterminera l’avenir politique de Pravind Jugnauth. Un procès qui sera aussi suivi ailleurs dans le monde, non seulement en Espagne et au Pakistan. Car c’est, peut-être, la première fois que le sort d’un Premier ministre d’un État souverain se jouera devant des juges d’un pays contre lequel nous menons une guerre diplomatique. Mais, bien sûr, on me dira qu’il n’y a pas de rapport de causalité. Les Law Lords étant perçus comme incorruptibles, même s’ils sont au service de Sa Majesté...
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