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Dans mon voisinage, dans cette humanité commune…

27 août 2017, 09:06

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Dans mon voisinage, dans cette humanité commune…

Dans mon voisinage, dans cette humanité commune que je partage apparemment avec d’autres, il se trouve des hommes (vous connaissez des femmes dans ce milieu, vous ?) qui s’investissent dans le socioculturel. Le mot-clé est définitivement «investir», car dans le socioculturel, soit on s’investit pour le bien de ses membres, soit on y investit pour soi-même. C’est le modèle classique des politiciens d’ailleurs. Qui veulent tous nous faire croire qu’ils s’investissent pour notre bien, alors qu’ils investissent, bien trop souvent, pour eux-mêmes d’abord. C’est-à-dire pour tout le capiteux découlant du pouvoir (voyages, flonflons, respect suscité ou crainte engendrée) soit pour de l’argent – le salaire même étant plutôt «inespéré»  pour certains. Bien sûr qu’il existe des politiciens sincères comme il existe du leadership sincère  d’organisations socioculturelles, mais en fait, c’est rare et c’est pour cela que les politiciens et les Dulthumun de ce monde s’entendent comme larrons en foire et que l’argent public est systématiquement kidnappé pour souder leurs intérêts mutuels et concordants. 

   

Si je ne trouve aucune raison pour justifier pourquoi canaliser l’argent public vers des intérêts sectaires dans un État se proclamant unitaire, il faut reconnaître que fondamentalement, dans tous les pays du monde, les citoyens ont tendance à se regrouper, à s’enclaver, qui dans sa réalité culturelle ou religieuse, qui dans ses convictions politiques ou sociales ou dans d’autres zones d’intérêt propre. On peut ainsi être, à la fois, musulman, membre du MSM, joueur de bridge convaincu et fan de Manchester United. On n’en est pas moins bon  citoyen pour ces seuls faits, même si l’on peut aussi ne pas l’être ! De plus, dans chacun de ces rôles, il est sans doute légitime de se faire entendre et de faire du «lobbying»  pour sa cause. Une caractéristique fondamentale, cependant, différencie une organisation dite socioculturelle des autres, car elle est sectaire, c.-à-d. organisée à l’exclusion de l’autre. Ainsi, personne ne peut m’empêcher de m’enregistrer aussi comme un fan de Manchester United, même si c’est Crystal Palace qui m’intéresse de prime abord, par contre (et j’ai déjà essayé !), il me sera impossible de devenir membre de la Voice Of Hindu, parce que je suis chrétien, du moins de naissance.     

D’autre part, le procès que l’on a fait cette  semaine aux dirigeants d’organisations socioculturelles qui changent de camp politique ne me  paraît pas clair et me frappe même comme étant peut-être hypocrite. Question : pourquoi est-ce que ce serait normal que les organisations du secteur privé puissent s’adapter à travailler avec le gouvernement élu du jour, quel qu’il soit, mais pas une organisation socioculturelle ? En quoi est-ce que Dulthumun doit être loyal à Ramgoolam que celui-ci soit PM ou PM déchu ? Le vrai problème, comme je le vois, c’est que les politiciens ont tout pourri en se rapprochant et en politisant le moindre recoin de la vie citoyenne qu’ils estiment capables de leur apporter des votes aux élections. 

Ainsi, il n’est franchement pas normal que les directions politiques du pays s’intéressent à ce point et cherchent des allégeances à travers des élections municipales ou régionales, des élections à la Sanatan Dharma Temples Federation, des élections à l’union des étudiants de l’université, des nominations au  Medical Council, des rotations de responsabilités au Bar Council … Les politiciens sont des hommes, comme vous et moi. Ils ne deviennent, quoiqu’ils puissent dire, ni omnipotents, ni omniscients quand ils se retrouvent élus au Parlement. Et, dans un sens important, il est clair que si le politicien veut tout contrôler, il ne le pourrait pas si le citoyen voulait bien garder sa distance, sa liberte de reflechir et sa dignité.  

Ainsi, il est sans doute flatteur (et souvent très utile) d’entendre dire à la radio ou de voir écrire dans un  journal que M. X ouY  est «proche» de M. Jugnauth ou de  M. Ramgoolam. Mais cette posture est souvent aussi incommodante qu’elle n’est déshonorante. Car, en milieu démocratique adulte, tout citoyen qui a une cervelle devrait raisonner et faire usage de son libre arbitre. Travailler avec le gouvernement du jour ne saurait être proscrit, même quand on n’approuve pas ce que fait ce gouvernement. Il y va des intérêts du groupe que l’on représente et, régulièrement, de celui du pays même. Par contre, la contrepartie d’une telle approche est de ne pas se taire sur ce qui est moins que satisfaisant dans la gestion gouvernementale et de ne pas se cantonner à ses seuls intérêts à l’exclusion ou même aux dépens du bien commun. L’alternative vers laquelle on dérive depuis longtemps déjà, c’est le clanisme qui protège les siens et punit les autres, qui divise et émascule ainsi la nation en tentant de canaliser chacun vers un camp ou l’autre. Or, devenir le «toutou»  de quelqu’un ne permet que de sucer les os qu’on veut bien vous jeter et de… japper à l’occasion – toujours dans la même direction, même si le danger est ailleurs ! 

 Cette servilité obséquieuse, malheureusement assez répandue, est un mal que je ne souhaite à personne !

Dans mon voisinage ces dernières semaines, dans cette humanité commune que je partage apparemment avec d’autres et au-delà de la partisanerie, on trouvait aussi ce chauffeur d’autobus qui, ivre, aurait fait valser des meubles et de l’électroménager sur la tête de sa mère ; ce toxicomane de 36 ans menaçant, de sa seringue infectée de SIDA, ses proches qui osaient lui refuser de l’argent pour sa prochaine dose ; les «fous de dieu» qui sévissaient à Barcelone, celui qui a égorgé un jeune couple, Neha et Navin, qui s’aimait ; cette personne qui profitait de ce qu’une jeune femme, Lara Rijs, soit éméchée dans sa chambre pour l’attaquer et la poignarder.On y trouvait aussi l’illuminé de Pyongyang et le complotiste narcissique qu’est Trump…

Dans mon voisinage ces dernières semaines, dans cette humanité commune que je partage  heureusement avec d’autres, et au-delà du compartimentage politique, on trouvait aussi les employés heureux et débrouillards de Beachcomber (dans bonZour !), et Rob Gomez qui, dans l’État du Maine, se refusait de prendre la 1re place d’une course à pied en dépassant celui qui, le devançant jusque-là, s’était écroulé à 50 mètres de l’arrivée, le remit debout et le porta jusqu’à la ligne d’arrivée (ABC News).  On pouvait aussi partager l’incroyable aventure du Solar Endeavour de Piccard/Borschberg (RFI) ou la fabuleuse fraternité agissante de Ty Pennington dans un épisode d’Extreme Makeover ;  Home Edition (DSTv). 

Ce qui rend possible que se côtoient ainsi le sublime et le médiocre, c’est bien entendu l’intelligence du vouloir vivre ensemble. On ne lynche plus, on n’envoie plus au bagne, on ne proclame plus d’autodafé aussi  souvent qu’à l’époque. La diversité admirable qui voit des mormons vivre aux côtés de rappeurs style Jay-Z, qui permet au génial Bill  Gates de côtoyer un cloporte comme Trump, qui célèbre Morgan Freeman (Through the wormhole) et le général Lee ou Washington et qui peut élire un Barack Obama, même s’il n’est pas vaish (aux USA, on dit plutôt «blanc»... apparemment)  caractérise une société saine et adulte. Pour  pouvoir vivre ensemble, il ne faut ni exclure l’autre, ni dénaturer les faits, ni réécrire l’histoire, ni être prisonnier des thèses de qui que ce soit.    

Après tout, nous dit-on, l’Homme est un être de raison. Homo sapiens ? Il serait bon de le démontrer le plus souvent possible !